Par François Marcilhac.
La puissance réflexe du Front Républicain, alimentée par tous les médias et tous les cercles d’influence allant du sport à la culture en passant par le show-biz, l’éducation et les universités, a encore permis de faire obstacle au bloc national. Mais loin d’obtenir une clarification, Macron n’aura réussi qu’à rendre encore un peu plus ingouvernable le pays. Alors que le scrutin majoritaire à deux tours avait toujours eu pour objectif – et pour effet – de lisser les fractures du pays afin de le rendre gouvernable au prix, certes, d’injustices politiques criantes, depuis Macron, et surtout après ces dernières échéances législatives, ces fractures, représentées au sein même de l’Assemblée, interdisent de dégager une majorité claire de gouvernement tout en reflétant des compromissions (le front républicain lui-même) qui interdisent toute comparaison avec d’autres démocraties parlementaires d’ordinaire montrées comme modèles.
Marine Le Pen a déclaré que ce front républicain était « contre-nature » : elle ne voit pas que ce sont nos institutions en fin de parcours qui sont contre-nature, en livrant le pays comme jamais au jeu des partis, qui ne sont eux-mêmes que les courroies de transmission de différentes oligarchies ou communautarismes. Elle a osé ajouter : « S’il n’y avait pas eu de désistements massifs » entre candidats du bloc de gauche et de la majorité sortante, « nous aurions eu la majorité absolue », dénonçant des « manœuvres », comme si ces manœuvres et compromissions n’étaient pas la nature même du jeu des partis. « Si » le jeu des partis n’existait pas, nous ne serions plus en république.
Enfant, on nous apprend qu’avec des « si » on mettrait Paris en bouteille. Aussi, plutôt que de se livrer à des raisonnements puérils, Marine Le Pen devrait-elle plutôt s’interroger sur les propres faiblesses d’un Rassemblement national qu’elle n’a pas su conduire, en plus de dix ans, à plus de crédibilité dans l’opinion publique – quand Giorgia Meloni, en moins de cinq ans, a su faire d’un groupuscule néofasciste un parti de gouvernement. Certes, le nombre de députés du RN est historiquement haut dans la nouvelle assemblée mais cette augmentation traduit encore plus un ras-le-bol qu’une véritable adhésion. Peut-être Marine Le Pen a-t-elle confondu « pasteurisation » du programme, se livrant à toutes les compromissions, notamment au plan sociétal, et respectabilité, sans pour autant s’attaquer à une véritable professionnalisation des cadres du parti. Alors que, depuis 2022, il était clair qu’Emmanuel Macron procéderait un jour ou l’autre à une dissolution, celle-ci a manifestement pris au dépourvu un Rassemblement national qui mise uniquement sur l’échéance de 2027 comme si la victoire à la présidentielle doit tomber comme un fruit mûr. D’où cet amateurisme dont la perception très rapide par les Français n’a fait qu’aggraver l’effet délétère d’un front républicain qui avait pour lui la grosse Bertha médiatique. Sans compter, avec les maladresses sur la double nationalité, une zemmourisation de la campagne — pensons au scotch du prénom dont Zemmour n’a jamais pu se défaire.
Sans compter aussi, aggravant les conséquences de cet amateurisme, les œillères qui ont fait préférer, à des investitures de candidats éprouvés mais dont le seul crime est d’être des catholiques pratiquants, une idiote s’affichant avec une casquette nazie, une ancienne preneuse d’otage ou une personne sous curatelle, inéligible – en tout et pour tout une vingtaine de « brebis galeuses », dixit Bardella soi-même : bref, le RN offre de lui-même le visage peu flatteur que ses ennemis aiment peindre.
Reste que le pays risque, durant les prochains mois, de naviguer à vue, entre paralysie et fuite en avant. Macron aura-t-il, avec cette dissolution, favorisé le blocage, voire la dissolution de nos institutions ? Ou, plutôt, n’aura-t-il été que le médiocre personnage politique que l’histoire aura choisi pour accompagner la fin d’un cycle, celui d’une Ve république qui ne correspond plus aux besoins du pays ? Avec l’Europe et l’immigration, le risque est que la fin de ce cycle ne fasse prendre pour notre pays un risque existentiel. Le parti bourguignon a pris possession du pays légal. Plus que jamais nous devons montrer aux Français que la République conduit notre pays à sa perte. Et que seul l’héritier de nos Rois, par nature au-dessus des partis et arbitre-né, peut redonner à notre pays, dans le cadre d’une monarchie active, une souveraineté sans laquelle il sera conduit à l’effacement. ■
Le RN ne pouvait avoir la majorité absolue et ne l’aura pas sans alliance, c’est ainsi que Meloni est arrivée au pouvoir auquel son parti était associé depuis Berlusconi. Il a deux ans pour mettre en place ses alliances dans la lignée de la voie Ciotti
Le pays réel, le pays réel… Il n’est pas « Un », il est parsemé de fractures diverses, souvent les unes tournant le dos aux autres… Un « ras le bol » n’ est pas le ciment qui lie. Tout un « pays réel » a voté au secours du » pays légal » au second tour…