Par Gabrielle Cluzel.
Cet article est paru hier 18 septembre dans Boulevard Voltaire. Il est bref, intelligent et vigoureux. Il pointe l’incapacité de Michel Barnier à « donner un autre cap » et, ce qui est évidemment corrélé, à former un gouvernement. « Comme si la barre du Titanic était bloquée », ajoute Gabrielle Cluzel. Et ce Titanic ce n’est rien moins que la Ve République, ou, ce qui revient au même, la République tout court, toutes les formules possibles ayant été essayées, épuisées. Si l’on n’est pas royaliste au sens qui est ici le nôtre, comme une majorité de Français qui majoritairement ne le sont pas à ce jour, il n’est guère possible de nier que la France se trouve confrontée, après deux siècles d’expériences diverses douloureuses et terriblement destructrices, à un sérieux problème de régime. Un de ceux qui appellent un changement profond.
Michel Barnier essaie de former son gouvernement, dans les cris et les grincements de dents. Le Premier ministre accouche sans péridurale. Et le bébé promet d’être étonnant. Voire effrayant.
On apprend ainsi que Michel Barnier a proposé le poste de ministre de la Ville et du Logement au… maire socialiste d’Avignon, Cécile Helle.
Un « vote clair »
Rappelons qu’au deuxième tour des dernières élections législatives, Cécile Helle a appelé à un « vote clair » pour Raphaël Arnault, candidat antifa fiché S. Elle s’est ensuite publiquement « réjouie » de la victoire du militant d’extrême gauche, que Alice Cordier et Mila accusent de menace de mort à leur endroit. Pour la sororité, on repassera.
On nous promettait, avec Michel Barnier, le retour de la droite ; c’est une franche réussite. Rappelons, également, qu’au classement des villes les plus sûres publié le 16 mars dernier, la cité des papes n’a pas une tiare mais un bonnet d’âne : elle pointe à la 117e place, sur 119. Avignon a aussi la solide réputation d’être une ville prodigieusement sale – ce qui va, du reste, souvent de pair avec l’insécurité -, comme le montrent, pour ceux qui n’y sont jamais allés, plusieurs collectifs d’habitants en colère, sur Facebook, et les nombreux commentaires convergents de touristes sur le site Tripadvisor. Quant au festival d’Avignon, mélange d’entre-soi woke et d’infatuation vulgaire, il ne saurait suffire à redorer le blason d’une ville dans laquelle les beaux messieurs et les belles dames du Pont ont laissé la place à des punks à chien et des activistes à cheveux bleus, et où l’on pense en rond (toujours à gauche) plus qu’on danse.
Est-ce donc pour ces brillants résultats, et parce qu’il rêve de dupliquer dans toutes les villes de France, avec les impôts qu’il pourrait augmenter, le formidable miracle avignonnais, que Michel Barnier voulait lui confier ce portefeuille ?
Sourdistan
Ouf, Michel Barnier a pris un râteau, un vent, un camouflet : la dame a fait sa mijaurée et refusé. Mais il s’en est fallu de peu. « On a promis le Kärcher™, on a eu Kouchner » : la boutade d’Éric Zemmour à propos de Nicolas Sarkozy est passée à la postérité. Emmanuel Macron, lui, s’était dit favorable à appeler Bardella, on a bien failli, in fine, avoir un ministre aux sympathies antifas. Est-ce donc là la « rupture » promise par la droite quand elle a adoubé Michel Barnier ?
Ne comprennent-ils donc rien à rien ? N’ont-ils pas entendu la gronde qui est sortie des urnes ? La France, souvent renommée à raison Absurdie, est-elle devenue aussi le Sourdistan pour que ses gouvernants, indifférents à toutes les alarmes qui retentissent, continuent d’avancer dans le mur ? Michel Barnier juge la situation budgétaire « très grave ». De fait, le Mozart de la finance a écrit, en sept ans, un très beau requiem.
Mais est surtout « très grave » son incapacité patente à donner un autre cap, comme si la barre du Titanic était bloquée. ■ GABRIELLE CLUZEL