Journal de l’année 14 de Jacques Bainville : Les notes sont quasiment quotidiennes jusqu’au 31 décembre. Sauf du 14 au 27 août à cause des contraintes de la guerre. Nous conseillons vivement de les lire au jour le jour, comme elles furent écrites. Sachons que notre situation française et européenne d’aujourd’hui découle largement des grands événements relatés ici !
« Il faut défaire l’unité allemande »
Il appartiendra à une sage diplomatie de mettre l’Autriche à l’abri d’entraînements auxquels les Etats sont sujets comme les hommes, et surtout de faire en sorte qu’elle ne soit plus exposée à succomber au tentateur prussien, ce qui ne pourra se faire que par la suppression de la Prusse.
Si le vieux Caton, celui qui obtint que Rome détruisît Carthage, revivait parmi nous, il répéterait tous les jours aux Alliés : Il faut défaire l’unité allemande et anéantir la Prusse qui est, depuis deux siècles, le fléau des nations, l’esprit du mal qui empoisonne le monde européen…
Il faudra que l’Autriche, au futur Congrès, se résolve à n’être qu’un membre utile et modeste de la société européenne, à remplir ce rôle d’élément modérateur et conservateur que l’ancienne diplomatie française lui avait si judicieusement attribué. Lorsque la Maison d’Autriche, devenue inoffensive en Allemagne après la paix de Westphalie, eut en outre été guérie, après la guerre de Succession d’Espagne, de ses ambitions espagnoles, l’idée de la monarchie française fut d’en faire une sorte de gendarme de l’ordre européen et de la paix européenne au sud de l’Allemagne et aux portes de l’Orient. Voilà l’idée qu’il faudra reprendre demain. ■ JACQUES BAINVILLE
* Repris du Journal de Jacques Bainville (1901/1918) – Tome I – Plon 1948
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