Il y a treize jours, dans l’année, pendant lesquels il ne s’est pas passé grand-chose, ou bien pour lesquels les rares événements de ces journées ont été traités à une autre occasion (et plusieurs fois pour certains), à d’autres dates, sous une autre « entrée ».
Nous en profiterons donc, dans notre évocation politico/historico/culturelle de notre Histoire, de nos Racines, pour donner un tour plus civilisationnel à notre balade dans le temps; et nous évoquerons, ces jours-là, des faits plus généraux, qui ne se sont pas produits sur un seul jour (comme une naissance ou une bataille) mais qui recouvrent une période plus longue.
Ces jours creux seront donc prétexte à autant d’évocations.
• 1. Essai de bilan des Capétiens, par Michel Mourre (2 février)
• 2.Splendeur et décadence : Les diamants de la Couronne. (12 février)
• 4. Deux hauts lieux indissociables de la Monarchie française : la cathédrale Notre-Dame de Reims, cathédrale du Sacre, et la Basilique de Saint-Denis, nécropole royale. 2. Saint-Denis (19 février)
• 5. Quand Le Nôtre envoyait à la France et au monde le message grandiose du Jardin à la Française. (13 mars)
• 7. Quand Louis XIV a fait de Versailles un triple poème : humaniste, politique et chrétien. (28 avril)
• 9. Quand la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais a reçu, au XIIIème siècle, son extraordinaire vitrail du Miracle de Théophile (28 mai)
• 10. Quand Chenonceau, le Château des Dames, à reçu la visite de Louis XIV, âgé de douze ans, le 14 Juillet 1650. (26 juillet)
• 11. Le Mont Saint Michel (11 août)
• 12. Quand François premier a lancé le chantier de Chambord. (29 septembre)
• 13. Quand Léonard de Vinci s’est installé au Clos Lucé. (27 octobre)
Aujourd’hui
Quand François Premier a lancé le chantier de Chambord
Le roi donne commission à François de Pontbriand, son chambellan, d’ « ordonner toutes les dépenses qu’il y aurait à faire pour la construction du château. »
I. Le Château
« Allons chez moi !... » aimait à répéter le Roi, qui fut, pour Monique Chastenet, « l’un des plus enragés bâtisseurs de toute l’histoire de France. »
Auteur d’un remarquable Chambord (Editions du Patrimoine) Monique Chastenet pense, d’ailleurs qu « il est probable que, parmi les nombreux projets qui nourrirent la réflexion du Roi, ceux de Vinci eurent une importance primordiale »…. mais que le Roi, « passionné d’architecture… maniait lui même le crayon, et son bon plaisir, sans cesse changeant avait force de loi. Plus que tout autre, François Premier est l’auteur de Chambord… ».
Edifié au milieu de nulle part, dans un style qui marie influences les plus diverses et harmonie, Chambord semble un mirage. « On se croirait dans les royaumes de Bagdad ou de Cachemire« , écrit Alfred de Vigny, que ce rêve de pierres et de tourelles captivait. Tout en exaltation et démesure, cette demeure qu’imagina un François Premier entouré des plus grands génies de la Renaissance, n’a cessé de fasciner. On a souvent dit, à juste titre, que dans le domaine du grandiose Chambord annonçait déjà, et préfigurait, le Versailles du Roi Soleil.
Pierre de Bourdeille, seigneur de Brantôme, devant ce château encore imparfait et inachevé évoquait déjà le « ravissement de l’esprit ». Car Chambord n’est pas un château de plus. C’est un manifeste royal autant qu’une vision du monde.
En un mot : un chef-d’œuvre.
…dans le domaine du grandiose Chambord annonce déjà, et préfigure, le Versailles du Roi Soleil…
Les principaux maîtres maçons engagés pour la réalisation de cette demeure furent Jacques Sourdeau, un des bâtisseurs de Blois, et Pierre Trinqueau. Plus de 1800 ouvriers y ont été employés. Il sera terminé par Charles IX et Henri III.
Merveille de la Renaissance, le château de Chambord compte 440 pièces, 365 cheminées, 14 escaliers principaux, dont le célèbre escalier à double révolution surmonté de la grande lanterne, et 70 secondaires. L’ensemble mesure 156 mètres sur 120 mètres.
François Premier y recevra son grand adversaire de toujours, Charles Quint, le 18 décembre 1539. Emerveillé, celui-ci aura ce mot célèbre :
« Chambord est un abrégé de ce que peut effectuer l’industrie humaine ».
Louis XIV y assistera à la première du Bourgeois Gentilhomme, de Molière (musique de Lully) en octobre 1670.
Le château appartiendra ensuite au Maréchal de Saxe, puis sera offert par souscription nationale au duc de Bordeaux, petit-fils de Charles X et dernier représentant de la branche ainée des Bourbons (qui deviendra du coup le Comte de Chambord).
L’UNESCO l’a classé en 1981 au Patrimoine mondial de l’humanité.
Chambord Entrez dans l’univers du génie
C’est le 30 mai 1952 qu’eut lieu, à Chambord, le premier spectacle Son et Lumière de France… Vincent Auriol, président de la République, viendra y assister, le 5 juillet suivant. Cinq ans plus tard, en 1957, on associera, au château du Lude, des personnages en superposition au spectacle Son et lumière proprement dit.
II. Le Parc
Autre merveille du lieu, autre facette du songe du Roi François, et inséparable de lui : le Parc !
Le Parc de Chambord couvre 5440 hectares (le plus grand domaine forestier clos d’Europe !…). Il est ceinturé d’un mur de 32 Km (le plus long mur de France !…), qui clôture quelques 5.440 hectares de superficie (c’est-à-dire la superficie de la ville de Paris intra-muros) et qui est ouvert par 6 portes (il y en avait trois à l’origine).
Commencé en 1542 – sous le règne de François 1er – par François de Pontbriand (voir l’éphéméride du 11 septembre), le mur fut terminé en 1645 : des factures de 1556 attestent qu’Henri II, le fils de François premier, donna l’ordre aux riverains de continuer les travaux en son absence. Ce mur de 2,50 m de hauteur moyenne repose sur des fondations de 70 cm de profondeur. Il est constitué de petites pierres sèches de calcaire de Beauce.
Dès 1542, François 1er créa des capitaineries royales chargées d’assurer « très estroittement la garde et conservaction des boys et buissons, bestes rousses et noires d’icellui parc, pour nostre plaisir et passe temps ou faict de la chasse ».
Classé réserve nationale de chasse en 1947, le domaine est peuplé de nombreux représentants de la faune de Sologne. Le cerf, figure emblématique de la réserve, est présent en grand nombre (environ 700 adultes). L’installation de miradors permet au public l’observation de cette faune :
Chambord Entrez dans l’univers du génie
Le cépage Romorantin, François 1er l’avait fait planter à partir de ceps bourguignons. Le directeur du Domaine de Chambord (en 2015, Jean d’Haussonville), a décidé de replanter ce cépage à l’intérieur du domaine – sur 8 ha autour de la ferme de l’Ormetrou, proche du mur d’enceinte, et sur le haut d’un versant – et de vendre dès 2019 un prestigieux vin blanc “Château de Chambord“.
Ce retour est bien la sauvegarde d’un patrimoine historique, la sauvegarde du cépage Romorantin, unique survivant de vignes authentiques non greffées, et qui n’est pas un cépage ordinaire puisque, pour une raison qui échappe aux spécialistes, il a traversé les siècles sans être tué par le redoutable Phylloxéra qui décima les vignes françaises en 1870.
Cépage de vin blanc, le Romorantin est toujours présent en Sologne où il est le cépage unique de l’appellation Cour-Cherverny, mais les vignes que replante le domaine de Chambord sont des vignes historiques retrouvées dans une parcelle bicentenaire d’un viticulteur de Soings-en-Sologne, Henry Marionnet (ci dessous), qui explique :
« Ces vignes ont été plantées il y a 200 ans, à partir des sarments prélevés sur une des vignes plantées à la demande de François 1er; en quelques sortes, ces vignes sont les petites filles de celles de François 1er. Elles ont dans leurs gènes cette faculté de résister au Phylloxera, maladie de la vigne qui sévit toujours. Ce sont ces vignes qui produisent sur mon domaine de la Charmoise notre cuvée Provignage, sans ajout de soufre, le même vin que François 1er buvait… »
Henry Marionnet rappelle que la région de l’Orléanais – entre Tours et Orléans – était au temps de François 1er la première région productrice de vins fins consommés dans les cours royales avec le cépage Auvernat (pinot noir). En 1519, pour diversifier la production, François 1er a fait venir 80.000 plants de Bourgogne qui furent plantés près du domicile familial à Romorantin qui donna ainsi son nom au cépage, puis replantés ensuite autour de Chambord, domaine royal.
Ces vignes d’une durée de vie d’environ 150 ans, ont donné ensuite d’autres plants qui vécurent 150 ans puis furent transmis à la vigne d’Henry Marionnet vieille de 200 ans : c’est donc la troisième génération de ce Romorantin planté par François 1er il y a 500 ans !
« Tant pour l’achapt de la quantité de quatre vingt milliers de complans de Beaune par luy achapté par ordonnance… conduict lesdits complants depuis ladite ville de Beaune … jusques en la ville de Romorantin… Iceluy complan ledit seigneur a ordonné estre planté ». (Extrait d’un courrier de 1518 des Archives Nationales relatant l’implantation de cépage Romorantin en Sologne).
D’autre part, d’anciens plans de Chambord attestent qu’en 1786, six hectares des terres de la ferme de l’Ormetrou sur le domaine étaient plantés de vignes. En 2015, la moitié des pieds plantés, soit trois hectares, sont issus d’une sélection massale sur des plants pré-phylloxériques certifiés d’avant 1840. Ce sont des plants dits « francs de pied », n’ayant subi aucun greffage ni aucune transformation génétique. « Il y a 15 ans, nous avons récupéré 36 ares de cette vigne sur Soings-en-Sologne« , explique alors Jean-Sébastien Marionnet. Si bien que cette variété est aujourd’hui considérée comme la descendante la plus directe des « complans de Beaune » acheminés par François 1er en 1519. « A Chambord, nous les plantons sur une terre très sableuse, légèrement argileuse… cela donnera un vin élégant et racé »
POUR CONCLURE, UNE « VISITE PRIVÉE » DU CHÂTEAU DE CHAMBORD
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