Très teinté de tous les stéréotypes de « la société occidentale éclairée d’aujourd’hui » (Soljenitsyne) l’article du Figaro de ce matin (réservé aux abonnés) peut être lu, comme quelques rares autres, pour être plus ou moins informé des résultats des élections autrichiennes de dimanche. [En Autriche, une coalition des perdants contre le FPÖ ?]
« L’analyse » y est ainsi résumée : « Le parti de Herbert Kickl est arrivé en tête des élections législatives autrichiennes, recueillant 29,2 % des suffrages. Mais au nom de la lutte contre l’extrême droite, les autres partis s’organisent pour qu’il ne gouverne pas. »
Ainsi, en tous lieux de l’Europe actuelle dont, en son centre, l’Autriche demeure un haut symbole, se forment de vastes mouvements patriotes, anti-immigrationnistes, souverainistes, ou populistes, immuablement appelés extrême-droite quel que soit le spectre et l’ampleur de leur assise électorale. Une contre-Europe (au sens bruxellois) qui pourrait être utile au jeu politique de la France, si elle en avait un. Il n’est pas interdit de penser, voire de souhaiter, que ces mouvements s’épaulent, et se coordonnent pour faire aboutir, dans leurs pays respectifs, les objectifs qui leur sont communs.
Ainsi, se forment parallèlement des coalitions de perdants seulement unis par la volonté d’empêcher les gagnants de gouverner. Telle devient la norme,, la forme nouvelle – à dénoncer et à combattre- des démocraties du monde dit occidental. Dont acte. Nous n’en sommes nullement surpris ayant appris de l’Histoire qu’il n’y a pas loin de la démocratie idéologique au totalitarisme. Nous y sommes presque.
Le Viol des peuples ! Voilà quelle formule apparaît comme tout à fait convenable pour spécifier les modalités opérant dans les systèmes démocratiques, depuis le libéralisme économique jusqu’aux «démocraties populaires» communistes, en passant par les nazisme et autres merciers socialistes apparentés, sans total préjudice du fascisme italien (quoique celui-ci mériterait d’être observé de plus près que l’on n’est autorisé à le faire en France, tout comme le franquisme espagnol et la salazarisme portugais).
La formule que j’utilise en entrée est évidemment inspirée par le titre de Serge Tchakotine «Le Viol des foules par la propagande politique». Il y a cependant une différence entre ce que Tchakotine a mis au point – sur la base des recherches scientifiques sur les réflexes conditionnés poursuivies par lui après Pavlov – et ce à quoi il est arrivé que l’«on» cherche désormais à soumettre les peuples. En effet, si Tchakotine et consort (à savoir le Komintern, qui l’avait dépêché [autour des années 20-30, à préciser] en Allemagne et en France pour y exporter la Révolution bolchevique) portaient leurs efforts sur l’exercice d’une propagande agissant quasi strictement sur le «politique», il s’agit aujourd’hui de laver les cerveaux «du début à la fin» : implémenter dans les cerveaux ce qu’il est «correct» de manger, de respirer, de discuter, de regarder, d’entendre et, – surtout et par-dessus tout ! – la manière UNIFORMÉMEMENT MÉCANISÉE de se comporter ; tantôt, il arrivera donc que, par exemple, une simple démarche constituera un indice suffisant pour repérer tout contrevenant potentiel, selon la seule manière de se déplacer «dans l’espace public» – au passage, observons que l’on ne dit même plus «dans la rue»…
Demande-t-on leur «consentement» aux peuples ? Par les élections, me répondra-t-on. Mais non, l’accord n’est pas plus consenti ici qu’il ne l’est dans le cas des femmes abusées, «dans la rue» et ailleur. La preuve en est que les peuples peuvent parfois circuler avec des idées «provocantes» en tête, provocations qui justifient évidemment que l’on puisse les coincer dans un coin puisque, au fond, «ils ne demandent que cela»…
«Le peuple ne sait pas ce qu’il veut», disait déjà Hegel, justifiant à l’aide de ce préjugé «sociologique» bien commode qu’une certaine pseudo «élite» fût en charge de le savoir pour lui ; exactement comme un vulgaire bonhomme sait mieux que la bonne femme qui passe, un peu moralement prude, ce que son «langage corporel» exprimé «dans l’espace public» révèle de sa volonté réelle.