« Entre deux trémolos sur la « République fragile » et l’« Europe nécessaire », Michel Barnier souhaite, surtout, ne pas faire de vagues. »
Par François Marcilhac.
Un discours indigent pour un moment historique : voilà résumée la prestation à laquelle s’est livré ce mardi 1er octobre le Premier ministre.
Un moment historique, au sens où c’est la première fois que, sous la Ve République, la configuration de l’hémicycle en trois blocs équivalents interdit tout espoir de dégager une majorité de gouvernement. Un discours de politique générale indigent, tant le Premier ministre, qui semblait le premier à ne pas croire à l’exercice auquel il se livrait, a pratiqué l’affichage dans presque tous les domaines, cherchant le salut dans les faux-fuyants. À l’exception notable de mesures d’apaisement bienvenues en Nouvelle-Calédonie, de l’avancée à novembre de la revalorisation du SMIC et de la volonté, du reste fort imprécise, de faire participer « les plus fortunés » (particuliers et entreprises) à l’effort de redressement de nos finances publiques, les annonces gouvernementales dans des domaines aussi cruciaux que la santé, l’éducation, la sécurité et l’immigration, là où Barnier était attendu, se résument à des mesures indignes de bricolage, loin de la rupture ambitieuse dont la France a tant besoin — à moins de prendre au sérieux, s’agissant de l’immigration, la remise en cause à peine esquissée de l’accord franco-algérien de 1968, qu’il n’a même pas explicitement nommé.
Ce manque de courage résume à lui tout seul la politique de Michel Barnier, dont manifestement la seule ambition est de durer jusqu’en juin 2025, date à laquelle Macron pourra de nouveau dissoudre. Jusque-là il s’agira pour le Premier ministre de ne pas froisser suffisamment le RN pour que celui-ci se joigne à une motion de censure déposée par le Nouveau Front populaire et, surtout, à satisfaire le centre gauche, dont le défaut aboutirait au délitement de son gouvernement. C’est ainsi qu’il faut comprendre sa décision de rouvrir le débat sur l’euthanasie et son insistance sur le sacro-saint « État de droit », maladroitement malmené par son ministre de l’Intérieur.
Entre deux trémolos sur la « République fragile » et l’« Europe nécessaire », Michel Barnier souhaite, surtout, ne pas faire de vagues. Prisonnier du centre gauche, il fera une politique de centre gauche qu’il demandera à certains de ses ministres de ponctuer de mâles accents en matière de sécurité ou d’immigration, histoire de conforter le RN dans son attentisme. ■ FRANÇOIS MARCILHAC