Faut-il rendre justice à Eric Zemmour ? Comme journaliste, chroniqueur, analyste, passionné de la France, courageusement anxieux pour son avenir ? Certainement. Il nous a informés, avisés, expliqué nombre d’analyses brillantes et justes que nous avons suivies d’enthousiasme pendant des années. Il plaçait tout débat au plus haut et vrai niveau. Ses tibulations électorales sont autre chose. On sait la valeur que nous accordons à ces épisodes et aventures. Chacun jugera. JSF
Par Jean Kast.
Cet article est paru hier 16 octobre dans Boulevard Voltaire. Nous n’y ajouterons pas de commentaire particulier. Si ce n’est qu’il nous semble, avec pertinence et réalisme, rendre justice. Sa lecture nous paraît intéressante, simplement.
Retour à la case télévision. Trois ans après la fin de ses chroniques quotidiennes dans l’émission Face à l’info et le début de sa carrière politique, Éric Zemmour prépare son retour sur les écrans. Le président de Reconquête tourne actuellement l’adaptation télévisuelle du Suicide français (Albin Michel), l’un de ses plus grands succès en librairie, paru en 2014 et écoulé à quelque 500 000 exemplaires. Selon Le Parisien, le projet est d’en faire une mini-série documentaire de quatre épisodes de 52 minutes, destinée à être diffusée sur la chaîne Planète+ du groupe Canal, dans un an au plus tôt. L’information a, depuis, été confirmée par Diane Ouvry, attachée de presse d’Éric Zemmour.
Produite par Pallas Télévision, qui signe régulièrement des sujets pour M6 ou France 5, l’adaptation est en cours de tournage à Paris. Éric Zemmour aurait été aperçu, costume cravate et écharpe bleue autour du cou, au jardin mémorial des enfants du Vél’ d’Hiv, ainsi que rue Nicolas-Appert, dans le XIe arrondissement de la capitale, là où siégeait la rédaction de Charlie Hebdo jusqu’à l’attentat islamiste de janvier 2015 qui a coûté la vie à douze de ses employés.
Un livre honni à gauche
À sa sortie, le best-seller de celui qui n’était alors qu’un simple journaliste avait suscité l’ire de la gauche médiatique. Le Monde avait dénoncé « la dérive individuelle d’un polémiste, qui flirte clairement avec l’extrême droite », une prose « rance », une « lecture complotiste » contestée par « les meilleurs experts ». Libération avait moqué les thèses d’un « troll identitaire », « homophobe, islamophobe et sexiste ». Sans doute un peu jaloux du succès de celui qui avait précédemment été son contradicteur sur i-Télé, Christophe Barbier n’avait pas hésité à s’en prendre aux lecteurs d’Éric Zemmour. « Parmi ses supporteurs, on trouve quelques agrégés, mais beaucoup de beaufs », avait alors estimé le directeur de L’Express.
Mais, dix ans plus tard, on peut se demander qui, des « beaufs » ou des commentateurs germanopratins, avait vu juste. « La France se couche, la France se meurt », écrivait alors Éric Zemmour. À l’heure de la perte de souveraineté de notre pays sur son propre sol, de son envahissement par des foules haineuses, de sa dette abyssale, de son image ridiculisée sur la scène internationale, qui peut sérieusement donner tort à l’analyse de l’auteur à succès ? Chaque jour qui passe nous offre une nouvelle illustration de cet affaiblissement de l’État-nation français, de cette déconstruction méthodique des anciennes hiérarchies sous l’effet des idéologies socialistes, immigrationnistes ou néo-féministes.
Le défaut d’avoir eu raison trop tôt
Interrogé dans Soir 3, le 14 novembre 2014, Éric Zemmour avait donné les raisons du succès de son livre. « Je pense qu’il y a beaucoup de gens qui ne reconnaissent plus leur pays. Ils sont malheureux. Ils ont l’impression que ce n’est plus la France, déclarait-il. Et moi, je mets des mots sur leurs maux. […] Car on a empoisonné la France et le peuple français. Et il s’est laissé empoisonner par ce que j’appelle les trois D : déconstruction, dérision, destruction ».
Aujourd’hui, ils ne sont plus qu’une poignée d’hurluberlus à nier la décadence de la France. La quasi-totalité de la droite a fini par faire siennes les analyses d’Éric Zemmour et les commentateurs parisiens ont mangé leur chapeau. L’adaptation télévisée du fameux pamphlet témoigne de cette réhabilitation. Celle d’un homme coupable, sans doute, d’avoir eu raison trop tôt.. ■ JEAN KAST