« Ces trémolos sur la transparence et le mensonge sont rigolos. En dehors de ces questions, le mensonge est en temps normal l’huile dans les rouages de la vie sociale et publique. »
Par Elisabeth Lévy.
Cet article – percutant, comme, en général, ceux d’Elisabeth Lévy – est paru dans Causeur hier 17 octobre. En réalité, elle passe ses nerfs et sa colère contre le système ou régime d’irresponsabilité générale qu’est le nôtre, citoyens compris, où tout le monde laisse filer tout ce qu’il est commode et agréable de laisser filer et regarde ailleurs s’agissant des conséquences et des échéances auxquelles s’attendre. Il n’y a à proprement parler rien à ajouter à ces considérations de bon sens faites depuis longtemps déjà sur la nature des régimes d’opinion,. Ainsi, il y a des lustres, Maurras appelait déjà notre République « la femme sans tête », ce qui n’empêche pas cette dernière de coiffer un grand corps adipeux et fort coûteux, dont en effet les irréformables structures ruinent le Pays et absorbent une part sans limites des fruits du travail, de l’effort du peuple travailleur. Jusqu’à l’une de ces explosions politiques dont la France a toujours attendu qu’elles se produisent pour se réformer quelque peu. C’est sans doute ce que veut dire Elisabeth Lévy en la circonstance…
Nous sommes tous responsables du dérapage des comptes publics, observe la directrice de la rédaction de Causeur.
« La commission devrait aussi s’intéresser aux gabegies structurelles. »
La commission des Finances de l’Assemblée nationale se transforme en commission d’enquête sur le dérapage des comptes publics.
Rappel de quelques chiffres, désormais connus de presque tout le monde: dans le précédent budget, le déficit du présent exercice était annoncé à 4,4% du PIB. Il a ensuite été relevé à 5,1% en cours d’exercice. Finalement, nous sommes à 6%. Résultat : une différence de 60 milliards d’euros à trouver en urgence.
Menteurs
Certes, il faudra effectivement savoir comment ce dérapage budgétaire a été possible. Mais en attendant, l’affaire est déjà devenue une nouvelle arme de notre guéguerre politique. On entend tous la petite musique qui monte : « ils ont menti, voire maquillé. Ils savaient et n’ont rien dit… » Ces trémolos sur la transparence et le mensonge sont rigolos. En dehors de ces questions, le mensonge est en temps normal l’huile dans les rouages de la vie sociale et publique. Chers lecteurs, essayez donc de dire tout ce que vous pensez pendant une journée ! Le mensonge est aussi parfois une stratégie politique. Par exemple, la gauche a raconté durant des semaines qu’elle avait gagné les élections législatives, ce qui est faux, et pourtant personne ne hurle qu’on doit la vérité aux électeurs. Donc il faut arrêter le délire. En l’occurrence, je ne crois pas que nos dirigeants aient menti volontairement, et encore moins falsifié : ils ont laissé filer et regardé ailleurs. Bruno Le Maire avait demandé un collectif budgétaire en cours de route ; le président Macron a refusé parce qu’il a un peu pris cela par-dessus la jambe (l’intendance suivra…) et que les européennes arrivaient.
Le droit de savoir
Ensuite, nous avons connu deux mois de vacance du pouvoir. Personne ne se sentait responsable du sujet, et il n’y avait pas de Premier ministre à qui rendre compte. Bref, nos gouvernants sont peut-être incompétents – il ne faut pas l’exclure(!) – mais j’en ai assez d’entendre dire qu’ils sont malhonnêtes. Les Français ont bien le droit de savoir, dit-on. Encore faudrait-il qu’ils veuillent savoir. Tout le monde veut réduire la dette… à condition que ça tape sur les autres. Et on adore croire qu’en taxant les riches, tout changera. La commission d’enquête nous dira quels postes précisément (c’est la polémique du jour…) ont dérapé. Et c’est important de le savoir. Mais, elle devrait aussi s’intéresser aux gabegies structurelles. On ferait de sacrées économies en supprimant d’un décret tous les doublons, triplons et quadruplons d’officines inutiles. Le CESE par exemple ne sert à rien, mais pourtant il existe aussi des doublons à l’échelle des régions et parfois des intercommunalités ! La vérité, c’est que nous sommes tous responsables. De la distribution d’argent public contre rien, du clientélisme… Si les dépenses ont dérapé, ce n’est pas parce que Bruno Le Maire et les autres s’en sont mis plein les poches, mais parce qu’ils ont répondu à de multiples pressions, demandes et revendications. Elles sont souvent légitimes: moi aussi, je voudrais plus de profs, plus de médecins, plus de flics et plus de magistrats. Moi aussi, je ne veux que le bonheur des retraités, des étudiants ou des chômeurs.
Mais j’aimerais aussi qu’on sorte de ce rapport névrotique à l’État, considéré comme l’Oncle Picsou à qui il faut arracher son magot. Désolée : il n’y a pas d’Oncle Picsou. Et pas de solution indolore. Si nous voulons nous en sortir, il faudra travailler plus et moins attendre de la collectivité. ■ ÉLISABETH LÉVY
Cette chronique a été diffusée sur Sud Radio
Surprenante, cette exonération de nos dirigeants : ils regardaient ailleurs ! Ailleurs ? mais où ?
Rappelant des vérités bien connues sur le laisser-aller et l’irresponsabilité généralisés, Mme Lévy pourrait aussi imputer auxdits responsables de les avoir encouragés. Ils ne se sont pas battus. Ils n’ont pas démissionné, ils ont détourné l’attention, donné le mauvais exemple, détourné les lois, joué la comédie, « communiké ». Se servant luxueusement, ils ont renoncé à tout ce qui demandait prudence, humilité, efforts et sacrifice… Ni responsables ni coupables pour autant ! Non c’est notre faute collective.
Je retrouve dans ce papier l’une des entourloupettes les plus choquantes du blabla officiel : « pas d’enrichissement personnel »: classement sans suite. Toucher un traitement privilégié et négliger ses devoirs, en profiter pour écrire des romans, c’est un abandon de poste, une désertion, une déréliction. Pis qu’un enrichissement personnel ou en bande organisée !
Que nous dit-elle encore ? Ils ont pratiqué le clientélisme, Ils ont cédé aux revendications multiples… mais celles-ci sont légitimes ! Ont-ils menti ? par action, par omission ? mais le mensonge, c’est l’huile adoucissante de la vie !
Le chapeau de JSF contextualise à bon escient. Dont acte. Mais pourquoi faire tant d’honneur à ce papier essuie-tout ?
Pour réduire le déficit du budget il faut abroger notamment les cadeaux fiscaux faits ^par Macron et les siens aux catégories les plus aisées mais aussi de demander si les 160 milliards d’aides publiques annuelles aux entreprises sont justifiées en correspondant bien à quoi elles ont été accordées et si c’est vraiment justifié.
Ne cherchez pas de responsable particulier : C’est l’Etat Profond qui crame régulièrement la caisse. C’est structurel et non pas conjoncturel car ce système réunit le plus mauvais du capitalisme et de l ‘économie dirigée, sans en avoir les avantages. Tant que la table ne sera pas renversée, les gouvernements successifs, quels qu’ils soient n’y changeront rien.