1534 : L’Affaire des « placards »
Imprimés à Neuchâtel sous l’instigation du pasteur François Antoine Marcourt, les « placards » sont des sortes d’affiches protestantes : elles sont « placardées », dans la nuit du 17 au 18 octobre, dans toute la France, et jusque dans les appartements du roi François 1er à Amboise.
Cet épisode aura des conséquences dramatiques pour les protestants de France. François 1er, croyant au complot, décidera de faire la chasse aux « hérétiques », mettant ainsi un terme à la tolérance religieuse qui régnait en France depuis quelques années.
Calvin (ci dessous), compromis dans cette affaire, s’enfuit à Nérac, auprès de la bienveillante Marguerite de Navarre, puis à Bâle.
Le Roi soleil met fin à 87 ans de tolérance religieuse en abolissant l’Edit signé par son grand-père Henri IV (en 1598) au profit de l’Edit de Fontainebleau.
Il faudra attendre 1787, et Louis XVI, pour que la tolérance religieuse soit établie en France (éphéméride du 29 novembre).
Si l’on se replace dans le contexte de l’époque, force est de constater que Louis XIV a eu raison de révoquer l’Edit de Nantes, que son père – Louis XIII – et son principal ministre – Richelieu – auraient d’ailleurs très bien pu révoquer sans difficulté en 1629, comme l’explique très clairement François Bluche :
« …Seul un Louis XIII pouvait, en son temps, abolir les clauses de Nantes en évitant les horreurs de celles de Fontainebleau. On peut dire qu’il a laissé à son fils un cadeau empoisonné. Car, en 1629, après la guerre subversive du Midi, tout le monde eût trouvé logique – et, c’est le cas ou jamais de le dire, de bonne guerre – de voir abolir les privilèges (provisoires, circonstanciels, encore récents) de 1598. Mais cela ne convenait point au cardinal de Richelieu, ménager des princes protestants de l’Empire. Parmi les responsables de la Révocation, il ne faut jamais oublier Louis XIII et son ministre… » (François Bluche, Louis XIV, Fayard, page 613).
L’erreur de Louis XIV, et même sa faute politique, si l’on peut en juger sans trop de prétention trois siècles plus tard, ce ne fut pas de révoquer l’Edit de Nantes, mais de persécuter les protestants. L’Edit de Nantes, en effet, aucun Etat digne de ce nom ne pouvait s’en accommoder, et il n’avait, du reste, aucun équivalent, en aucun autre royaume ou Etat de l’époque ; la particularité de cet Edit était que, au moment où il fut signé par le grand-père (Henri IV) il était indispensable de le signer, car il était la seule façon de ramener la paix civile en clôturant plus ou moins définitivement le désastreux chapitre des Guerres de religion ; mais, les réalités ayant changé un siècle après, il était tout aussi indispensable que le petit-fils (Louis XIV) le révoquât si l’on voulait construire un Etat moderne, ou tout simplement normal.
Louis XIV a donc bien fait de ramener le Royaume de France à la normalité ; c’est la persécution – inutile et critiquable – qui accompagna la Révocation qui doit être mise en cause.
D’ailleurs, toujours en se référant au contexte de l’époque – et même si l’argument n’est pas des plus valables… – il faut bien voir l’extraordinaire popularité de la mesure :
« …Dans Paris, ville de la Ligue, la Révocation a porté à l’extrême la popularité un peu ternie du monarque. Jamais on ne le sentit autant que le 30 janvier 1687. Le Roi, rapporte l’abbé de Choisy, atteignit « au comble de la gloire humaine lorsqu’il vint dîner à l’Hôtel de Ville après sa maladie : il se vit aimé de son peuple; jamais on ne témoigna tant de joie, les acclamations ne finissaient point. Il était dans son carrosse avec Monseigneur (son fils, le Dauphin, ndlr) et la famille royale. Cent mille voix criaient : Vive le Roi ! »… » (François Bluche, Louis XIV, Fayard, page 609).
Dans son magistral Louis XIV, François Bluche (lui-même réformé) dresse une sorte de bilan de la Révocation.
Il y voit six suites fâcheuses, mais « un nombre au moins égal de conséquences favorables au Royaume » (pages 614, 615, 616).
1. Les « suites fâcheuses »
• même s’il y eut des conversions sincères, les convertis « sont, en majorité, mal convertis »;
• les communions pascales seront, en conséquence, « des communions forcées et sacrilèges »;
• « …Bien plus qu’auparavant, et on le leur avait déjà reproché durant la guerre de Hollande, les protestants du royaume (qui voient dans une déroute française l’espérance d’un traité contraignant le Roi à revenir à l’Edit de Nantes) ressembleront au parti de l’étranger « .
• « …La révolte des camisards, qu’on se gardera de condamner en bloc ou de transformer en épopée, va s’ajouter aux difficultés intérieures de la France et au poids de la guerre extérieure »;
• « …Avec l’émigration de 200.000 réformés, notre pays entame son capital démographique, perdant chemin faisant une élite économique, sociale, intellectuelle. »
• Enfin, « Nos ennemis – la Prusse-Brandebourg, les Provinces-Unies, la Grande-Bretagne – y gagnent plus encore que ce que nous perdons. Le Refuge francise l’Europe, mais fortifie les pays d’accueil et renforce leur hostilité native envers la France. »
2. « Les conséquences favorables au Royaume »
« …Il existe en revanche, on l’oublie trop, un nombre au moins égal de conséquences favorables au royaume :
• En abolissant l’Edit de Nantes, le Roi retourne aux règles traditionnelle de notre droit public.
• Il cesse, en particulier, de parjurer le serment du sacre (haereticos exterminare…). Henri IV n’avait pas eu le temps d’amender sa législation; Louis XIII n’avait fait le travail qu’à moitié.
• L’unité religieuse, rêve du règne et obsession du clergé, est obtenue, même si la suite des évènements va faire apparaître cette unité plus abstraite que réelle.
• L’unité nationale est étonnamment confortée. La politique anti-protestante de Louis XIV resserre pour trente ans, autour du Roi et de l’Etat, les évêques, le clergé moyen et petit, la bourgeoisie, le menu peuple. Ce consensus apparaîtra surtout en 1709, quand le monarque appellera à la mobilisation générale contre l’envahisseur. De Malplaquet (1709) à Denain (1712, ci contre), le réveil des militaires et des civils n’est explicable, à ce degré de force et de constance, que dans l’esprit de cette union nouvelle. Ce n’est plus l’alliance du trône et de l’autel, mais à nouveau l’union du trône, de l’autel et du peuple.
• L’Edit de Fontainebleau a achevé la conquête des cœurs, assuré un véritable et durable loyalisme en certaines provinces conquises. Dans les plus catholiques d’entre elles, la Flandre, la Franche-Comté, les agents de l’Espagne avaient eu beau jeu d’opposer la stricte fidélité du roi catholique, respectueux de la contre-Réforme, aux compromis du roi très chrétien, caution de la tolérance civile et du pluralisme religieux. Désormais ce contraste disparaît : un Lillois fervent, un Bisontin dévot n’ont plus de scrupules à collaborer avec « le restaurateur des autels ».
• Dès le début de la succession espagnole, la France – en la personne de son roi Louis XIV et de son candidat au trône catholique, Philippe duc d’Anjou – a en sa possession les éléments moraux qui lui feront gagner le trône de Madrid et (puisque, ici, ne pas perdre équivaut à gagner) la guerre d’Espagne. Sous le régime de l’édit de Nantes, Philippe V eût, au contraire, rencontré les mêmes obstacles que Napoléon en 1808. Il n’aurait, d’ailleurs, peut-être pas été désigné par Charles II comme son successeur. »
1698 : Début de la construction de Neuf-Brisach
En 1697, les traités de Ryswick (ville hollandaise des faubourgs de La Haye), mettent fin à la guerre de la Ligue d’Augsbourg. La France perd la place forte de Brisach sur la rive droite, allemande, du Rhin. Afin de combler le vide défensif que crée la perte de Brisach entre Strasbourg et Mulhouse, Louis XIV décide de la construction d’une nouvelle ville fortifiée, face à Brisach mais, cette fois, sur la rive gauche du fleuve, française.
C’est Louis XIV lui-même qui choisit, entre trois projets, une place forte au plan octogonal ; la construction débute le 18 octobre 1698 avec la pose de la première pierre. Un canal est spécialement creusé jusqu’aux Vosges pour acheminer le grès rose nécessaire à la construction. Les fortifications de la nouvelle citadelle sont achevées en 1702 ; le 11 octobre 1731 a lieu la pose de la première pierre de l’église Saint-Louis, achevée en 1736. La mairie est achevée en 1758.
Dans notre album L’aventure France racontée par les cartes, voir la photo « Le génie de Vauban ».
1748 : Traité d’Aix-la-Chapelle
Ce traité, qui mit fin à la Guerre de Succession d’Autriche, fut une grande occasion manquée, pour la France, d’étendre ses frontières du Nord-Est, comme ses victoires le lui permettaient…
Ce conflit qui opposa la Prusse, la France, la Bavière, la Saxe et l’Espagne à l’Autriche et à l’Angleterre – de 1740 à 1748 – eut pour principal enjeu les terres héréditaires des Habsbourg d’Autriche et la succession au trône impérial. Bien que difficile pour nos armées, et parsemé de revers, il vit malgré tout la France remporter de brillants succès – notamment à Fontenoy (voir l’éphéméride du 11 mai) – et conquérir facilement les Pays-Bas Autrichiens (à peu de choses près, l’actuelle Belgique).
Pourtant, à Aix-la-Chapelle, lors des négociations de paix, le comte de Saint-Séverin, qui représentait la cour de Versailles, n’exigea rien pour la France : « Sa Majesté très-chrétienne a le souci de faire la paix non en marchand mais en roi », annonça-t-il. L’opinion française fut très remontée contre son gouvernement, lui reprochant de n’avoir pas su exploiter les succès de ses armées.
Le roi de Prusse Frédéric II, allié de circonstance de la France, apparut comme le seul gagnant de la guerre : aussi le traité d’Aix-la-Chapelle est-il à l’origine des deux expressions bien connues : « bête comme la paix« , et « travailler pour le roi de Prusse ».
En fait, Louis XV décida de rendre les Pays Bas autrichien à Marie Thérèse (et accepta aussi de chasser Charles III, prétendant à la couronne d’Angleterre) préférant adopter un rôle d’arbitre plutôt que de conquérant, dans la perspective du renversement des alliances, déjà en préparation secrète. Ce qui pouvait parfaitement se concevoir, mais qui eut pour résultat immédiat, et malheureux, que les frontières françaises restèrent les mêmes, et que la France ne profitait pas de ses victoires pour poursuivre son expansion vers le Nord-Est et le Rhin.
Sur le « renversement des alliances, scellé vingt-deux ans plus tard par le mariage du duc de Berry – futur Louis XVI – et de Marie-Antoinette, voir notre éphéméride du 16 mai
Malheureusement, cette politique intelligente et prévoyante, résolument progressiste – au vrai et bon sens du terme – et en pleine adéquation avec les intérêts profonds de la nation française, ne fut pas, ou mal comprise par l’opinion; habituée, par routine, à la guerre contre l’Autriche qui durait depuis plus de deux siècles (depuis Charles Quint !…) l’opinion préféra suivre les Encyclopédistes, qui combattirent follement cette sage décision : changer d’ennemi, maintenant que la France avait triomphé de l’Autriche, et même s’en faire une alliée contre la puissance montante : la Prusse.
Encyclopédistes, puis Révolution, République et Empire, tous tombèrent dans la même faute : continuer à se battre contre l’Autriche, et admirer la Prusse. La France devait payer cher cette folie : 1870, 1914, 1939…
Comment qualifier un tel aveuglement autrement que « intelligence avec l’ennemi » ?
1793 : Mort de Bonchamps
Mortellement blessé devant Cholet, Charles Artus, marquis de Bonchamps, expire après avoir gracié 5.000 prisonniers républicains, enfermés dans l’église de Saint Florent-le-Vieil, qu’on allait massacrer : « Grâce aux prisonniers, Bonchamps l’ordonne ! » furent ses dernières paroles.
David d’Angers, dont le père fut l’un de ces graciés, réalisera la très belle statue qui orne son monument funéraire (Photo).
D’Anne Bernet : « …Alors que la guerre de Vendée bascule dans l’horreur et que les armées républicaines mettent en œuvre les premières mesures d’extermination votées par la Convention à l’encontre des « Brigands », ce 17 octobre 1793, le général angevin, mortellement blessé devant Cholet, refuse d’entrer dans l’implacable logique du monde totalitaire en train de naître et lui oppose le pardon évangélique, la faisant voler en éclats. Les cinq mille prisonniers républicains détenus dans l’abbatiale de Saint-Florent-le-Vieil ne mourront pas. Parmi eux, il en est un dont le fils deviendra célèbre sous le nom de David d’Angers.
« Des hommes libres acceptant la vie de la main des esclaves. Cela n’est pas républicain ! Taisons ce déplorable événement. Les Brigands n’ont pas de journaux. Tout cela s’oubliera. » écrit alors Barère à Paris.
Trente-cinq ans plus tard, au sommet de son talent, le sculpteur Pierre-Jean David n’a pas oublié l’homme qui sauva son père. En marque d’éternelle gratitude, encourant la désapprobation de ses amis républicains autant que la méfiance des royalistes, il décide d’offrir au général de Bonchamps un tombeau à sa mesure… »
Dans notre album Totalitarisme ou Résistance ? Vendée, « Guerres de Géants » , voir la photo « Le dernier ordre de Bonchamps ».
1859 : Naissance d’Henri Bergson
Étude pour un portrait de Henri Bergson par Jacques Emile Blanche
Il reçut le Prix Nobel de littérature 1927. L’important n’est d’ailleurs pas là. Il eût été un très grand philosophe sans cela. Et son importance n’en aurait pas été amoindrie.
Bergson venait d’avoir quarante-deux ans quand il fut élu à l’Académie. Sa thèse principale, l’essai sur les données immédiates de la conscience, publie en 1889, qui avait été suivie, en 1897, de Matière et Mémoire, Essai sur la relation du corps et de l’esprit, avait fondé sa réputation. Nommé en 1900 au Collège de France, occupant tout d’abord la chaire de philosophie ancienne, Bergson avait étudié dans son cours Les Ennéades de Plotin.
En 1904, succédant à Gabriel de Tarde au Collège de France, Bergson attira bientôt un vaste public avide de l’écouter enseigner la philosophie moderne. La clarté de sa parole, qui portait aisément les pensées les plus hardies, était reconnue de tous.
Pendant la Première Guerre mondiale, Bergson, élu à l’académie française en 1914, avait beaucoup fait pour la cause de la France aux Etats-Unis et il fut de ceux qui précipitèrent l’intervention américaine. En 1928, le prix Nobel vint récompenser le philosophe.
Malade, remplacé depuis 1921 au Collège de France par son disciple et confrère Edouard Le Roy, Bergson avait rejeté dans L’ évolution créatrice l’idée du néant.
A la fin de sa vie, sans renier ses origines juives – il ira, en 1940, se faire inscrire sur les listes des Juifs de zone occupée établies sur ordre allemand – Bergson avait donné au christianisme une adhésion « de volonté » qui incitera cet esprit supérieur à écrire :
« Heureux le pauvre en esprit ! Ce qui est beau, ce n’est pas d’être privé, ni même de se priver, c’est de ne pas sentir la privation », et aussi: « la morale de l’évangile est essentiellement celle de l’âme ouverte ».
Autre preuve plus concrète de cette sorte de conversion au catholicisme qui ne fut pas formalisée en raison des circonstances de la guerre et de l’occupation allemande : son testament exprime en termes explicites le souhait que ses obsèques fussent célébrées, si cela se pouvait, par un prêtre catholique.
1893 : Mort de Charles Gounod
De Charles Gounod écoutez la musique du ballet de Faust (21′)
Orchestre ISA du Théâtre Colòn de Buenos-Aires – Direction : Jongwhi VAKH, 26 octobre 2017.
1924 : Ouverture du premier Concours du Meilleur Ouvrier de France
Imaginé par Lucien Koltz dès avant la Grande Guerre – et, évidemment, retardé par celle-ci… – le Concours pour désigner le Meilleur ouvrier de France s’ouvre à Paris, ce 18 octobre : il durera jusqu’au 23 novembre !…
1988 : Maurice Allais reçoit le prix Nobel d’Economie
Pour ses travaux sur la théorie des marchés.
2015 : Canonisation de Louis et Zélie Martin
Louis et Zélie Martin sont les parents de Sainte Thérèse de Lisieux, canonisée en 1925 et proclamée 33ème Docteur de l’Eglise par Jean-Paul II le 19 octobre 1997.
Louis et Zélie Martin ou « la canonisation du mariage »
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Éphémérides, pourquoi, dans quels buts ?
Les 366 éphémérides de l’année
L’Histoire que les Brigands n’ont pas le temps d’écrire des journaux prêtée à Barère par Anne Bernet aurait été écrite par Merlin de Thionville à La Convention pendant ou après les massacres du Marillais entre la fin octobre 1793 et avril 1794.
Si plus de 2000 personnes (femmes vieillards et enfants – les hommes sont à la guerre) ont bien été massacrées au Marillais sur les bords de la Loire à cette période il faudra préciser à Anne Bernet que cette histoire de journaux non écrits par les Brigands est sortie de l’imagination féconde de Jacques Crétineau-Joly qui n’était pas à une invention près ! Comme son faux rapport de Westermann à la Convention après le 23 décembre 1793 et la Bataille de Savenay ( « je n’ai pas un prisonnier à me reprocher, j’ai tout écrasé sous les sabots de mes chevaux » etc. etc.)
Les massacres des Bleus sont suffisants il n’y a nul besoin d’en rajouter !