496 : Victoire de Tolbiac
Bainville l’a bien expliqué : les deux premières dynasties – la Mérovingienne, celle de Clovis, et la Carolingienne, celle de Charlemagne – se sont épuisées dans leurs efforts stériles pour reconstituer l’Empire romain, ce qui était une vision géo-stratégique périmée, et ont échoué, leurs belles réussites ne débouchant finalement sur rien, faute d’une vision plus réaliste des choses, qu’il allait revenir à la troisième dynastie – la Capétienne – de mettre en oeuvre : à savoir, la constitution d’un Etat fort, et la création de la Nation française, objectif certes moins ambitieux que la reconstitution de l’Empire, mais qui correspondait, lui, à la marche de l’Histoire.
Pour autant, le bilan des deux premières dynasties ne doit pas être sous-estimé, ni, surtout, l’importance décisive du règne de Clovis.
D’abord pour ses deux brillantes victoires de Tolbiac sur les Alamans et, neuf ans plus tard, de Vouillé sur les Wisigoths (voir l’éphéméride du 25 mars) : à partir de Tolbiac – victoire amplifiée et comme couronnée par celle de Vouillé… – Clovis redonne pour la première fois à la Gaule l’unité territoriale qu’elle avait du temps de l’Empire romain, de sa frontière naturelle du Rhin à celle des Pyrénées.
Mais surtout – et c’est une conséquence directe du triomphe de Tolbiac – Clovis se convertit au catholicisme, adoptant la religion du « Dieu de Clotilde », son épouse catholique : en réalité, la bataille de Tolbiac s’engagea très mal pour les troupes de Clovis, et se poursuivit plus mal encore; en fait, vers la fin de l’après-midi, tout était perdu et il semblait que le désastre total fût imminent.
C’est alors que, découragé, Clovis implora le Dieu que sa femme priait, lui promettant que, s’il lui donnait la victoire, lui, Clovis, se convertirait.
Contre le cours des choses, et contre toute la logique de la journée, le roi des Alamans, à ce moment-là, fut tué d’un coup de hache; «…l’espoir changea de camp, le combat changea d’âme… » et, de vaincu qu’il était alors, promis à une mort certaine, Clovis vit le désastre se transformer, soudain, en triomphe !
A la Noël suivante, il se faisait baptiser, et plusieurs milliers de ses guerriers avec lui. La religion catholique, déjà traditionnelle dans le pays, se voyait confirmée par le pouvoir royal, et cette alliance du temporel et du spirituel devait imprimer à la nation qui deviendra la France une empreinte indélébile, qui sera comme son épine dorsale tout au long des siècles, lui permettant de traverser tant et tant d’épreuves, jusqu’à aujourd’hui :
« Pour moi, l’histoire de France commence avec Clovis, choisi comme roi de France par la tribu des Francs, qui donnèrent leur nom à la France. Avant Clovis, nous avons la préhistoire gallo-romaine et gauloise. L’élément décisif pour moi, c’est que Clovis fut le premier roi à être baptisé chrétien. Mon pays est un pays chrétien et je commence à compter l’histoire de France à partir de l’accession d’un roi chrétien qui porte le nom des Francs… C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine, et de religion chrétienne… » Charles de Gaulle
A l’époque, les Francs étaient divisés en deux peuples : les Francs saliens (dont Clovis était le roi) et les Francs ripuaires (du latin « ripa », rive, car leur capitale était Cologne, sur la rive gauche du Rhin). Le roi des Francs ripuaires était Sigebert le boiteux. De l’autre côté du Rhin, les Alamans formaient comme une confédération de peuples germaniques, toujours menaçants envers les Francs. En 496, ils envahirent carrément les terres de Sigebert, qui appela Clovis à l’aide : c’est l’origine et la cause de la bataille de Tolbiac.
Pour en revenir à la bataille de Tolbiac, lorsque Clovis vit ses guerriers se faire massacrer et comprit qu’il perdait la bataille – et, bientôt, la vie… – il invoqua alors le Dieu de sa femme Clotilde. Grégoire de Tours rapporte ainsi sa prière, dans le chapitre II de l’ « Histoire des Francs » :
« Ô Jésus-Christ, que Clotilde affirme Fils du Dieu Vivant, toi qui donnes du secours à ceux qui sont en danger, et accordes la victoire à ceux qui espèrent en toi, je sollicite avec dévotion la gloire de ton assistance : si tu m’accordes la victoire sur ces ennemis, et si j’expérimente la vertu miraculeuse que le peuple voué à ton nom déclare avoir prouvé qu’elle venait de toi, je croirai en toi, et me ferai baptiser en ton nom. J’ai en effet invoqué mes dieux, et, comme j’en fais l’expérience, ils se sont abstenus de m’aider, ce qui me fait croire qu’ils ne sont doués d’aucune puissance, eux qui ne viennent pas au secours de ceux qui les servent. C’est toi que j’invoque maintenant, je désire croire en toi, pourvu que je sois arraché à mes adversaires »
Leur chef tué à ce moment-là d’un coup de francisque, les Alamans se mettent à fuir; contre toute attente, le désastre annoncé se transforme en triomphe absolu.
De Jacques Bainville, Histoire de France, Chapitre I, Pendant 500 ans la Gaule partage la vie de Rome :
« …Ce pays fertile, industrieux, couvert de riches monuments, où une classe moyenne tendait toujours à se reconstituer comme un produit du sol après chaque tempête, était d’instinct conservateur. Il avait horreur de l’anarchie. Les communistes du temps, les Bagaudes, dont les tentatives révolutionnaires avaient toujours été vaincues, n’étaient pas moins redoutés que les Barbares du dehors. La Gaule romaine désirait un pouvoir vigoureux. C’est dans ces conditions que Clovis apparut.
À peine Clovis eut-il succédé à son père Childéric qu’il mit ses guerriers en marche de Tournai, sa résidence, vers le centre du pays. Il entreprenait de dominer les Gaules. À Soissons, gouvernait le « patrice » Syagrius, pâle reflet de l’empire effondré. Saint Remi vit que le salut n’était pas là. Quelle autre force y avait-il que le Barbare du Nord ? Qu’eût-on gagné à lui résister ? Clovis eût tout brisé, laissé d’autres ruines, apporté une autre anarchie. Il y avait mieux à faire : accueillir ce conquérant, l’aider, l’entourer pour le mettre dans la bonne voie. De toute évidence, c’était l’inévitable. Il s’agissait d’en tirer le meilleur parti pour le présent et pour l’avenir.
Clovis, de son côté, avait certainement réfléchi et mûri ses desseins. Il était renseigné sur l’état moral de la Gaule. Il avait compris la situation. Ce Barbare avait le goût du grand et son entreprise n’avait de chances de réussir, de durer et de se développer que s’il respectait le catholicisme, si profondément entré dans la vie gallo-romaine. L’anecdote fameuse du vase de Soissons prouve à quel point il voyait juste. L’exécution sommaire d’un soldat sacrilège fit plus que tout pour le triomphe de Clovis. On reconnaît le grand homme d’État à ces audaces qui créent des images immortelles.
Il fallait encore que Clovis se convertît. Sa conversion fut admirablement amenée. Ce Barbare savait tout : il recommença la conversion de l’empereur Constantin sur le champ de bataille. Seulement lorsque, à Tolbiac (496), il fit vœu de recevoir le baptême s’il était vainqueur, l’ennemi était l’Allemand. Non seulement Clovis était devenu chrétien, mais il avait chassé au-delà du Rhin l’ennemi héréditaire. Dès lors, il était irrésistible pour la Gaule romanisée.
On peut dire que la France commence à ce moment-là. Elle a déjà ses traits principaux. Sa civilisation est assez forte pour supporter le nouvel afflux des Francs, pour laisser à ces Barbares le pouvoir matériel. Et elle a besoin de la force franque. Les hommes, elle les assimilera, elle les polira. Comme sa civilisation, sa religion est romaine, et la religion est sauvée : désormais le fonds de la France religieuse, à travers les siècles, sera le catholicisme orthodoxe. Enfin, l’anarchie est évitée, le pouvoir, tout grossier qu’il est, est recréé en attendant qu’il passe en de meilleures mains, et ce pouvoir sera monarchique. Il tendra à réaliser l’unité de l’État, l’idée romaine aussi. Rien de tout cela ne sera perdu. À travers les tribulations des âges, ces caractères se retrouveront.
Cependant il s’en fallait encore de beaucoup que la France fût fondée et sûre de ses destins. La monarchie franque n’avait été qu’un pis aller dans la pensée des hommes d’Église qui l’avaient accueillie. Malgré ses imperfections, elle va servir, pendant près de trois cents ans, à préserver les Gaules de la ruine totale dont les avait menacées la chute de l’Empire romain. »
Sur Clovis, et l’importance capitale de son règne, voir l’éphéméride du 25 décembre (baptême de Clovis); l’éphéméride du 27 novembre (sa mort); sur le sens véritable de l’épisode du vase de Soissons, voir l’éphéméride du 1er mars; et, sur son autre victoire décisive de Vouillé, voir l’éphéméride du 25 mars.
1009 : Consécration de l’Abbaye de Saint Martin du Canigou
C’est l’évêque d’Elne, Oliba, qui mène les cérémonies.
On aura une foule de renseignements et de photos de qualité sur les deux sites suivants :
art roman – st-martin-du-canigou
notes.romanes.free.fr/images/catalan66/stmartin/texte
1449 : Entrée de Charles VII dans Rouen libérée
Charles, le Bien Servi, le Victorieux, fit réhabiliter solennellement Jeanne d’Arc dès 1456, et la fit laver de tout soupçon d’hérésie.
Souverain efficace, il entreprit la réorganisation du royaume, et développa l’économie, avec l’aide de Jacques Coeur.
Il est le père de Louis XI.
De Jacques Bainville, Histoire de France, chapitre VI, La Guerre de Cent ans et les révolutions de Paris :
« …Comme Charles le Sage, Charles VII avait tout à refaire : l’administration, les finances, l’armée, en un mot l’État. Et le roi de France n’avait que de misérables ressources : à la cour somptueuse de Bourgogne, dans le grand apparat de la Toison d’Or, on se moquait du « roi de Gonesse » monté sur « un cheval trottier ». Et non seulement Charles VII ne disposait que de faibles moyens, mais tout le monde avait perdu l’habitude d’obéir : les grands vassaux donnaient le mauvais exemple. Il faudra juger le duc d’Alençon, coupable d’avoir négocié avec l’Angleterre.
Le beau feu d’enthousiasme et de patriotisme qui avait pris naissance à Domremy ne pouvait durer toujours. Surtout il ne pouvait suffire à remplacer l’organisation et la discipline. Rétablir l’ordre, chasser les Anglais : ce fut, pendant vingt ans, la tâche de Charles VII. Il l’accomplit à la manière capétienne, petitement d’abord, pas à pas, posant une pierre après l’autre, aidé dans sa besogne par des gens de peu ou de rien, des bourgeois administrateurs, l’argentier Jacques Cœur, le maître de l’artillerie Jean Bureau. « Le bien servi » fut le surnom de Charles VII. Il eut le talent de se faire servir, d’écouter les bons conseils, d’exploiter les dévouements, d’être ingrat au besoin, bref de tout ramener au bien de l’État. Le résultat fut qu’à la mort du roi, l’Angleterre, en France, ne tenait plus que Calais. La victoire de Formigny (1450) effaça Crécy, Poitiers, Azincourt… »
Dans notre album L’aventure France racontée par les cartes, voir la photo « Guerre de Cent Ans (4/4) : deuxième rétablissement »
1555 : L’amiral Nicolas Durant de Villegagnon débarque dans la baie de Guanabara (Brésil)
Dirigeant 600 colons français, il y fera construire Fort-Coligny et Henryville.
Mais des disputes théologiques éclateront au sein de la colonie. En 1567, les Portugais détruiront ce qui reste des établissements et fonderont Rio de Janeiro.
Un des membres de l’expédition française, le moine André Thévet, rentrera avec une herbe encore inconnue : le tabac.
Jean Nicot ambassadeur de France au Portugal en 1559, durant son séjour à Lisbonne, planta dans les jardins de son ambassade quelques graines de cette plante : il fit parvenir à Catherine de Médicis de la poudre de tabac pour soigner les migraines de son fils, François II.
Devenu ainsi célèbre, le tabac fut alors surnommé l’herbe à Nicot ou herbe à la Reine.
La plante qui s’est fait le plus d’amis de par le vaste monde !
1630 : Journée des Dupes
Entre sa mère – qu’il ne reverra plus, et qui mourra en exil, à Cologne – et Richelieu, Louis XIII choisit Richelieu… (éphéméride du 3 juillet)
1630-la-journee-des-dupes
1668 : Naissance de François Couperin
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Écouter : Couperin Dixième Concert La Tromba
1753 : Mort de Bertrand-François Mahé de la Bourdonnais
Portrait par Antoine Graincourt
Gouverneur de l’île Bourbon (La Réunion) et de l’île de France (Maurice), Amiral, administrateur de la Compagnie française des Indes orientales.
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Dans notre album L’aventure France racontée par les cartes, voir la photo « Rêves d’Empire : Inde française (I/II) «
1763 : Mort de Dupleix
Fils de commerçants, Joseph François Dupleix est né à Landrecies en 1697. En 1720, il s’engage au service de la Compagnie des Indes, pour créer en Orient de véritables possessions territoriales servant de base à la conquête d’une grande zone d’influence qui fournira des matières premières à la métropole et lui servira de débouché pour ses propres productions.
S’étant taillé un Empire en Inde, il est nommé gouverneur de la Compagnie en 1741. Cependant, en 1748, la signature du traité de Londres met fin à la rivalité entre français et anglais dans la péninsule indienne : en 1754, il est rappelé en France, et son Empire des Indes passe définitivement sous la coupe britannique à l’exception de 6 comptoirs (Surat, Chandernagor, Pondichéry, Mahé, Yanaon et Karikal) qui seront rendus définitivement à l’Inde en 1954.
L’Empire français des Indes n’aura duré que de 1742 à 1754.
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Et, dans notre album L’aventure France racontée par les cartes, voir la photo « Rêves d’Empire : Comptoirs des Indes. (II/II) »
Après avoir subi le vandalisme de la Révolution, Notre-Dame de Paris est transformée en temple de la Raison. Le 7 Novembre 1793, l’hébertiste Chaumette fait décréter la célébration d’une fête en l’honneur de la Raison « dans la ci-devant église métropolitaine », c’est-à-dire Notre-Dame de Paris.
On ne sait pas, on ne sait plus, si c’est le grotesque qui dépasse le ridicule, ou l’inverse. Avec les guillotinages de masse, on avait le naufrage des Lumières dans la Terreur: là, on a le naufrage de la Raison dans le Ridicule.
Ces sottises là, il faut savoir que des Français – bien sûr en très faible nombre – les ont organisées, suivies, trouvées admirablement annonciatrices d’un monde radieux à venir. Il faut savoir qu’une certaine France en a été capable. Et le reste chez certains. Demandez donc à Vincent Peillon…
Fête de la Raison, le 10 novembre 1793 : dans un décor d’inspiration antique, où disparaît toute référence à la cathédrale Notre-Dame de Paris, quelques jeunes filles, prêtresses de la philosophie, célèbrent le culte à la déesse « Raison », personnifiée par une jeune femme vêtue d’une tunique drapée et d’un bonnet phrygien.
De Michel Mourre :
« ….Ainsi, le 20 brumaire, An II (10 Novembre 1793), une artiste lyrique, Mademoiselle Aubry, vêtue d’une robe blanche et d’un manteau bleu, coiffée d’un bonnet rouge et symbolisant la raison, vint s’asseoir sur une estrade disposée au milieu de l’ancienne cathédrale, à hauteur du transept, tandis que des chœurs chantaient à ses pieds, l’Hymne à la Liberté de Gossec, sur des paroles de Marie-Joseph Chénier. L’après-midi, la foule se rendit à la Convention, où l’ex capucin Chabot fit décréter que l’église Notre-Dame serait appelée désormais le temple de la raison.
Des cérémonies analogues eurent lieu en province. Mais cette campagne anti religieuse déplaisait à Robespierre et aux nombreux conventionnels disciples de Rousseau, et le culte de la Raison disparut avec les hébertistes (mars 1794) pour faire place au culte de l’Être suprême, presque aussi éphémère ».
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