« Il n’y a pas de liberté d’expression absolue en France. Et ceux de Charlie ne sont pas des martyrs de cette cause, ils sont martyrs de leurs opinions, ce qui est très différent. »
Richard de Seze a publié ce 8 janvier sur sa page Facebook, « quelques réflexions » sur la liberté d’expression et sur Charlie qu’il nous paraît utile de partager avec les lecteurs de Je Suis Français pour la simple raison qu’elles rappellent quelques vérités assez simples trop souvent oubliées ou ignorées du fait du conformisme établi, plus pesant encore que toute censure.
Je voudras partager quelques réflexions, et d’abord un sentiment : j’ai un respect moyen pour le journalisme d’enquête économique, assez moyen pour le journalisme d’enquête sociétal, faible pour le journalisme d’enquête politique, très faible pour le journalisme d’opinion et quasi nul pour le journalisme partisan – que je pratique avec bonheur.
J’ai un respect moyen car dans la plupart des cas on n’apprend pas grand chose, pas assez, pas assez mis en perspective, ou carrément on n’apprend rien et on voit l’incurie (au mieux) et la désinformation (au pire) s’étaler à pleines pages.
Vous aurez compris le respect que j’accorde aux “journalistes” de Charlie Hebdo et à leur expression libre, expression d’une haine fanatique pour ma religion, mes idées et mon pays.
On nous dit depuis hier que la liberté d’expression est une chose républicaine et sacrée : non. Bruno Le Roux a demandé aux médias de ne plus abriter les propos de Zemmour et Edwy Plenel reprochait avant-hier à ses confrères d’accorder une quelconque importance au livre de Houellebecq. Ce sont deux exemples récents, vérifiables, incontestables de ce que des républicains pensent de la liberté d’expression.
Allons un peu plus loin. Nous avons appris cette semaine, grâce au Défenseur des Droits, qu’une « circulaire » (la note n°05-13 relative à la cérémonie gouvernementale du 14 juillet 2013 émanant de la Direction de l’ordre public et de la circulation (DOPC) de la Préfecture de Police de Paris) interdisait «les banderoles, affiches et tout autre support portant une revendication» dans le périmètre de sécurité, ce qui a permis aux policiers, pendant plusieurs mois avant et après, d’arrêter les porteurs de T-shirts et drapeaux LMPT. Voilà comment un gouvernement républicain traite CERTAINS de ses opposants, cependant que dans le même temps les manifs antifas peuvent défiler avec des pancartes stipulant « un flic, une balle, justice sociale ».
Continuons d’avancer. La justice française condamne à de la prison ferme (http://www.liberation.fr/…/a-mayotte-prison-ferme-pour…) des personnes ayant déposé une tête de cochon dans une mosquée cependant que les Femen peuvent pénétrer dans les églises, vandaliser des cloches, et mimer des avortements sur un autel avec du foie de veau (intéressant sujet d’examen : la tête de cochon est-elle plus illégale qu’un foie de veau ?). Voilà comment la justice française et républicaine, sur ce seul exemple qu’on pourrait multiplier à loisir, traite la liberté d’expression.
Vous aurez remarqué au passage qu’être un simple citoyen français ou appartenir à un mouvement (qui plus est si proche du PS, parti au pouvoir, que certains militants se retrouvent sur les listes électorales de Valls) déséquilibre complètement votre rapport à la justice et le regard que la justice porte sur vous. Voilà ce que l’égalité républicaine et démocratique propose à notre songeuse réflexion.
Enfin, si la liberté d’expression est libre, elle permet à Charlie Hebdo et à Soral, dont les fanatismes ne sont pas si antagonistes, dont les intellects fonctionnent de la même façon, dont les manières sont aussi brutales, grotesques et haineuses les unes que les autres, de tenir des propos stupides, haineux, irresponsables et volontairement méchants et odieux – dans la grande tradition de la haine voltairienne et du mépris des conséquences (n’oublions pas que Pétain a pu, à peine arrivé au pouvoir, bénéficier du remarquable travail de fichage des étrangers et des juifs français auquel s’était livré avec délices la IIIe République) : en quoi aurais-je à respecter cette liberté ? Surtout dans un pays qui, de Gayssot à Taubira et Vallaud-Belkacem, entend réglementer mon expression, m’interdire certains propos et même pénaliser les sites qui choisissent de ne pas présenter l’avortement sous un jour systématiquement favorable ? Dans un pays qui veut m’interdire de fumer dans une voiture s’il y a un enfant, qui veut réglementer le niveau sonore de mes écouteurs, qui entend m’interdire d’allumer un feu de cheminée, dans un pays si soucieux de mon corps qu’il est prêt à me priver de minuscules et précieuses libertés (NB. Ma fille a vingt ans, je ne conduis pas, je ne fume pas, je n’ai pas de cheminée), au nom de quoi m’expliquerait-on qu’un unique droit doit, lui, être illimité, sachant que cette absence de limites n’est que celle consentie par le consensus gouvernemental qui prise fort la caricature à la Charlie mais a du mal à admettre celles de Miège ?
Je m’empresse d’ajouter à quel point la censure me paraît une chose bénéfique et nécessaire. Je détesterais que n’importe quel imbécile ou intelligent pervers puisse dire et montrer n’importe quoi (OK, en France, au XXIe siècle, ça arrive très très très souvent – mais on parle principes, là). Bref, il n’y a pas de liberté d’expression absolue en France, et c’est tant mieux. Et ceux de Charlie ne sont pas des martyrs de cette cause, ils sont martyrs de leurs opinions, ce qui est très différent. ■
Je crois que la terre est ronde. Mais le jour où on interdira les ‘platistes » (ceux qui disent que la terre est plate), je commencerais à en douter…