« L’objectif ultime reste la réconciliation, mais celle-ci ne peut exister que dans un cadre d’égalité et de respect mutuel » Mais aussi dans le cadre d’une France forte et non pas « couchée ».
Par Paul Melun.
Les voix sont nombreuses en ce moment – jusque dans les hautes sphères du régime – à appeler à une réaction ferme de la France, à un « Ça suffit » déterminé et puissant en réponse aux provocations de l’Algérie, ou plus exactement à sa politique de constante récrimination et d’hostilité à l’égard de notre nation. Paul Melun, dans le JDD du 10 janvier, y joint sa propre voix. L’alerte donnée en son temps par l’ambassadeur Xavier Driencourt a donc porté ses fruits, et l’actualité que l’on sait s’est chargée d’en décupler les effets. Dans l’épreuve de force envisagée, voire prévisible, on sait que la France dispose d’atouts importants, que l’Algérie pourrait y perdre plus que la France, mais elle a, pour sa part, l’arme redoutable – et plus encore redoutée – de « la rue arabe », largement algérienne, agitable et mobilisable par Alger. Du moins le croit-on, ou le fait-on croire, dans la capitale algérienne.
La France doit s’y préparer, s’y disposer, s’organiser sérieusement, y engager tous ses moyens. Sur son sol. Et le faire savoir. Si, comme l’écrit Paul Melun, « l’objectif reste la réconciliation », il faut savoir qu’il ne peut être atteint que si la France impose le respect et cesse d’étaler sa faiblesse. Notre régime, hélas !, n’a guère d’aptitude à remplir cette condition.
CHRONIQUE. Réduire drastiquement le nombre de visas, conditionner les transferts d’argent… Après l’incarcération de l’écrivain Boualem Sansal et le renvoi de l’influenceur « Doualemn », l’essayiste Paul Melun appelle la France à répondre avec fermeté aux provocations de l’Algérie.
« L’Algérie continue d’instrumentaliser le passé pour justifier une propagande anti-française »
Face aux provocations de l’Algérie, il est temps pour la France de réaffirmer sa souveraineté. L’épisode du renvoi en France de l’influenceur « Doualemn » par les autorités algériennes marque un tournant dans une relation déjà mise à rude épreuve. Cet homme, interpellé à Montpellier pour des appels à la violence, avait été expulsé légalement vers son pays d’origine. Mais Alger, dans un geste aussi inédit que provocateur, a choisi de le renvoyer sur le sol français, méprisant ainsi les règles diplomatiques les plus élémentaires.
Ce comportement, qualifié par Bruno Retailleau de tentative d’humiliation, illustre une stratégie délibérée de déstabilisation. Mais cet incident ne saurait être considéré comme un acte isolé. Il s’inscrit dans une série d’hostilités manifestes récentes : l’incarcération scandaleuse de l’écrivain Boualem Sansal, voix lumineuse de la liberté d’expression face à un régime autoritaire, ou encore le refus obstiné de l’Algérie de reprendre ses ressortissants sous le coup d’obligations de quitter le territoire français (OQTF).
La France ne peut plus tolérer une telle posture d’irrespect. Depuis 1962, elle a fait preuve d’une abnégation exemplaire dans la reconnaissance des pages sombres de son histoire coloniale. Les excuses ont été formulées, les archives ouvertes, les gestes de réconciliation multipliés. Le président Macron s’est engagé personnellement dans ce devoir de mémoire. Et pourtant, l’Algérie continue d’instrumentaliser le passé pour justifier une propagande anti-française. Elle se complaît dans le rôle de victime historique pour masquer ses propres défaillances intérieures.
Augmenter la pression
À cette stratégie du ressentiment, il faut répondre par une fermeté sans ambiguïté. La France doit rappeler que sa patience n’est pas infinie. Il est impératif d’envoyer un message clair : les intérêts français ne sont désormais plus négociables.
Cela passe par des mesures concrètes. Réduire drastiquement le nombre de visas accordés aux ressortissants algériens si les provocations persistent. Conditionner les transferts d’argent, qui représentent plusieurs milliards d’euros annuels, à un respect réciproque des engagements pris – si les provocations se poursuivent, bloquer les transferts. Suspendre les aides au développement tant qu’Alger adoptera une attitude de confrontation. Enfin, exercer des pressions économiques ciblées dans les secteurs bancaires ou énergétiques pour rappeler au régime algérien que la France dispose de moyens d’action puissants.
Ces mesures ne relèvent pas de la déclaration de guerre, mais de l’affirmation d’une souveraineté. La France, forte de son histoire et de ses principes, doit s’exprimer dans un langage compréhensible par Alger : celui de la détermination. Rien n’a changé depuis Thucydide, « le fort fait ce qu’il peut faire et le faible subit ce qu’il doit subir. » La France est une puissance majeure et ne saurait tolérer d’être traitée avec un tel mépris.
Instrumentalisation de la guerre d’Algérie
Par ailleurs, l’Algérie exploite, par ses médias nationaux et réseaux sociaux, la présence de citoyens algériens et franco-algériens sur le sol français pour diffuser un discours anti-français. Depuis des années, des récits gallophobes sont ainsi entretenus, nourris par l’instrumentalisation et la déformation des événements liés à la guerre d’Algérie. Sur notre sol, cette influence insidieuse ne peut rester sans réponse. La France doit se montrer intraitable face à ceux qui, sous couvert de liberté d’expression, prônent la haine ou font l’apologie du terrorisme.
« L’objectif ultime reste la réconciliation, mais celle-ci ne peut exister que dans un cadre d’égalité et de respect mutuel »
Si de jeunes franco-algériens ou algériens entendent commettre des crimes, des délits ou attiser la violence, des condamnations sévères doivent être appliquées, assorties d’expulsions systématiques. La question de la déchéance de nationalité pour les binationaux coupables de tels actes mérite d’être étudiée avec sérieux. Il ne s’agit pas de stigmatiser, mais de protéger la sécurité du pays et d’affirmer que nul ne peut défier impunément les lois de la République française. La naïveté n’a plus sa place ; la fermeté est une exigence impérieuse.
L’objectif ultime reste la réconciliation, mais celle-ci ne peut exister que dans un cadre d’égalité et de respect mutuel. La France, en cessant de s’abaisser devant un passé constamment brandi comme une arme, pourra redéfinir les bases d’une relation saine et durable avec l’Algérie. Il est temps que les demi-mesures cèdent la place à la fermeté. Il en va de la dignité de la France et de la confiance de son peuple en ses dirigeants. ■ PAUL MELUN
Gabriel Attal publie lui aussi une tribune martiale ddans Le Figaro du 10 janvier sous le titre : « Face aux provocations incessantes, il faut dénoncer l’accord franco-algérien de 1968 ». On peut la lire tout en s’étonnant de cette prise de conscience tardive et partielle, venant d’un homme politique intégré de longue date à la macronie.
Réconcilier la France et l’Algérie sur la base d’un accord respectant les intérêts mutuels est une tâche complexe, mais elle peut être abordée, pour autant que nous en ayons, après avoir déterminé quels sont nos intérêts bien compris, le courage politique et le courage tout court.