Par Dominique Jamet.
COMMENTAIRE – C’est à nouveau un bel article – sans solution – que Dominique Jamet a offert à nos amis de Boulevard Voltaire (BV, 24.01.2025). Un article dont le véritable mérite, en plus du talent, de la culture et de la lucidité de son auteur, est de refléter le sentiment général de la plupart des Français : la nostalgie du rang perdu, la défiance envers le Chef de l’État, le détachement – pour ne pas dire le dégoût – envers tout ce que De Gaulle appelait le Système, et l’avenir sans visibilité ni contours, pour la France comme pour le monde, où tout se bouscule. Les solutions qu’évoque Jamet sont hors du Système et relèvent de l’imaginaire national : Jeanne d’Arc, ou le chevalier au panache blanc. À l’heure des drames nationaux, il est arrivé que, du fond du peuple français, ces figures de légende deviennent réalité. Des réalités éphémères. Ce fut tout autre chose lorsqu’en 987 l’élection d’Hugues Capet au trône de France fonda un régime qui dura huit siècles et fut à l’origine de toutes nos grandeurs, à la recherche desquelles, au fond, nous courons encore !
«Telle la sœur Anne du conte de Perrault, nous aimerions bien sûr voir surgir à l’horizon la nouvelle Jeanne d’Arc ou le chevalier au panache blanc en qui s’incarnerait la France, sauvée du péril comme Notre-Dame de l’incendie.»
En 2017, les Français ont porté Emmanuel Macron à la présidence de la République. C’était une erreur. Leur excuse est qu’ils ne le connaissaient pas. En 2022, ils l’ont réélu, par défaut. Ils le connaissaient pourtant. Depuis qu’ils ont commis cette faute, ils ont désavoué trois fois dans les urnes le chef de l’État et son parti. Tous les sondages effectués ces dernières années ont établi que M. Macron bénéficie de la confiance d’environ 20 % des électeurs et qu’environ 70 % souhaitent son départ. Lui, cependant, s’incruste, imperturbable, et affirme en toute occasion qu’il ira jusqu’au bout du mandat que le peuple français lui a virtuellement retiré. Il s’est trouvé une majorité dans l’Assemblée nationale ingouvernable élue en juillet 2024, majorité de rencontre faite de deux blocs inconciliables, pour renverser le Premier ministre honorable et maladroit qu’il avait désigné et faire ainsi payer à un bouc émissaire qui n’y était pour rien le bilan de celui qui l’avait nommé.
De la IIIe à la Ve République
Existe-t-il dans notre Histoire une situation semblable ? Oui, celle du premier président de la IIIe République dont le nom, étrangement, résonne avec celui de son lointain successeur, le maréchal de Mac…Mahon. Celui qui était « resté », impavide sous le feu russe, sur sa position, minée, la tour de Malakoff, lors du siège de Sébastopol, finit par lever le camp après qu’une nouvelle majorité, républicaine, eut tout simplement refusé d’entrer en relation avec les présidents du Conseil qu’il avait cru pouvoir nommer sans tenir compte du vote populaire. Ce précédent indique, me semble-t-il, la marche à suivre, qui contraindrait l’actuel « chef de l’État », aussi parfaitement légal qu’il est devenu totalement illégitime, de baisser le rideau et de mettre ainsi un terme à la mauvaise comédie, avilissante pour les citoyens spectateurs comme pour son metteur en scène et pour ses acteurs, qui se donne au palais de l’Élysée depuis bientôt sept mois. Il serait aussitôt mis fin au blocage des institutions dont M. Macron, censé être le garant, est l’unique responsable.
Le fondateur de la Ve République, dont il connaît certainement le nom et dont nul sauf lui n’a oublié l’exemple, a indiqué la marche à suivre. Si celui qui se présenta, il y a huit ans déjà, comme le premier des « marcheurs » s’obstine à occuper le trône sans pouvoir exercer les fonctions qui y sont attachées, il est certain qu’une grève générale, non violente et nationale, qui n’aurait aucun caractère social, aucun aspect politicien, mais qui serait animée et justifiée par l’unique souci du salut public, viendrait à bout de la résistance puérile d’un vieil enfant gâté, narcissique, voire à la fois autiste et pervers, tant le rapport à la réalité du pays qu’il est supposé diriger et du monde qui nous entoure, cumulant aveuglement et surdité, semble chaque jour davantage relever d’une pathologie sévère, incompatible avec les fonctions qui sont censées être les siennes, et tant l’espace de pouvoir où il continue de jouer son rôle se rétrécit chaque jour comme dans Le roi se meurt, le chef-d’œuvre de Ionesco. D’ores et déjà, et même dans l’hypothèse, optimiste, où le Président désormais majoritairement tenu pour le pire que nous ayons subi depuis 1958, revenait du pays des songes et des mensonges où il s’attarde, il découvrirait, comme dans le fameux conte d’Andersen où le roi est nu, l’état dans lequel il a mis et laissera une France fragmentée, divisée, pessimiste, diminuée, affaiblie, reléguée sur tous les plans : économique, financier, diplomatique, industriel, agricole, moral et civique. C’est un grand crime, au regard de l’Histoire, d’annoncer qu’on conduira le peuple qui vous a élu sur le plateau d’Austerlitz et de le mener en effet, mais jusque sur les rives de la Bérézina.
De Gaulle, puisqu’il paraît nécessaire de le rappeler à son malheureux épigone, avatar moderne de ce pauvre Icare qui se brûla les ailes pour s’être trop approché du soleil, de Gaulle avait quelques défauts – qui n’en a pas ? – et, parmi ces défauts, on pourrait lui reprocher ce manque d’humanité qui laissa plusieurs taches sur son uniforme et qui est souvent le propre des grands hommes, et singulièrement des grands hommes d’État, mais le seul souci qu’il eut et qu’il manifesta avec succès tant qu’il fut aux affaires était celui de la France, de sa prospérité, de son unité, de sa grandeur. Plus les années passent, plus on doit constater, au rebours de toutes les lois de la perspective, que la stature du général grandit avec l’éloignement.
À la recherche du rang perdu
Mais nous, nous les Français, serons-nous vraiment, bientôt sans doute, quand le nom de Macron ne sera plus qu’un mauvais souvenir, à la hauteur de la France et à la hauteur des défis d’un monde qui change, d’un monde qui bouge, d’un monde dangereux où il va nous falloir repartir à la recherche du rang perdu ?
Rien ne l’indique, hélas, au moment où ces lignes sont écrites, et il faut avoir la foi chevillée au corps, comme Clemenceau, comme de Gaulle, dans la destinée manifeste qui ferait de la France la princesse lointaine des contes, des grands désastres et des résurrections miraculeuses, pour y croire encore à l’heure où nous n’existons plus sur la scène internationale, où des militaires putschistes, des démagogues ignares, opportunistes ou corrompus nous chassent à grands coups de pied au cul de ce qui était, il y a peu, la Françafrique, où le régime algérien, nous narguant impunément, refuse aussi bien de reprendre les délinquants que nous voudrions lui restituer que de nous rendre un citoyen français à qui son courage a valu d’être kidnappé sur sa terre natale sans être défendu efficacement par son pays d’adoption – le nôtre -, où l’irruption sur le grand théâtre du monde d’un Superman au teint orange qui nous renvoie à nos faiblesses affecte de nous considérer moins comme des alliés à ménager que comme des vassaux insignifiants, nous renvoie à notre néant ? Telle la sœur Anne du conte de Perrault, nous aimerions bien sûr voir surgir à l’horizon la nouvelle Jeanne d’Arc ou le chevalier au panache blanc en qui s’incarnerait la France, sauvée du péril comme Notre-Dame de l’incendie. Pour l’instant, à vrai dire, nous ne voyons que la route qui poudroie et le pouvoir qui merdoie. ■ DOMINIQUE JAMET
Très bien d’évoquer le précédent Mac Mahon ( pour ce qui est de la situation du Président n’ayant plus qu à « se soumettre ou se démettre ») .
Pour ce qui est de Michel Barnier qui n’à pas fait long feu , son budget avec des hausses de taxes et impôts à pu jouer en sa défaveur ; il a donc eu ce qu’il méritait. Ouste !
Qu’E .Macron parte ou bien reste avec des premiers ministres en CDD de 3 mois n’à plus d’importance puisque le résultat des législatives lui a coupé les ailes, et, au demeurant, quel successeur attendre avec le niveau des postulants ? On fait grand cas des Retaillau, Darmanin et ce genre qui n’ont pour but que de » siphonner » l’életorat RN ; sont ils assez naïfs pour croire que le précédent Nicolas Sarkozy avec son conseiller pour la galerie soit passé dans l’ oubli ?
Je ne parviens pas à comprendre que les fiers-à-bras de l’Armée française nuaient pas monté une opération commando pour libérer Boualem Samsal ; les Allemands ont bien pu délivrer Mussolini en 1943.
On y va, on casse tout et on laisse cette sale Algérie mijoter dans ses ridicules éternels.
Mais demander à des militaires du courage et de la détermination, c’est très excessif. À part Emmanuel de Richoufftz, que je connais bien et qui seul, chez les gradés, s’est posé la question « Pourquoi combattons-nous ? » je n’ai trouvé dans l’Armée que de braves patriotes surtout de faire joujou avec leurs engins qui coûtent des fortunes… mais qu’ils n’utilisent jamais sinon pour les refiler aux mafieux Ukrainiens…
100 % d’accord avec Pierre Builly sur son idée d’opération commando en Algérie pour libérer Sansal. J’y ai pensé, moi aussi de mon modeste côté !
Moins d’accord sur le reste ou même pas du tout. Nos militaires sont courageux. Et il faut qu’ils aient l’âme chevillée au corps pour garder du courage, malgré les absurdes politique dans lesquelles nos gouvernants ne cessent de les engager. C’est plutôt ça la vérité !
Sans doute me suis-je mal fait comprendre : je ne mets pas en doute le patriotisme sincère des militaires. Je dis qu’ils ne voient pas plus loin que le bout de leur nez et qu’on les stupéfie toujours, comme je l’ai fait souvent (auditeur de la 49ème s session de l’IHEDN) en leur demandant depuis combien de temps ils n’ont pas tué un ennemi.
Ce qui est leur boulot, non ?
Devise du 501ème Régiment de chars de combat – (Mourmelon) : « En tuer ! »
Excellent article de Dominique Jamet, un constat lucide et implacable de la pétaudière qu’est devenue la France
Autrefois il y avait « une religion un roi une loi » ce n’est pas une république des partis un capharnaüm d’opinions diverses et un règne limité à 4 ans qui travaille à la grandeur d’un pays. Les roitelets républicains d’un jour qui se succèdent, élus au suffrage des plus nombreux, font carrière et repartent comme ils sont venus sans se soucier des conséquences de leur passage. .
On disait autrefois « Pierre qui roule n’amasse pas mousse. » la ronde des élus et celle des partis engendrent notre ruine.
C’est parce que nous avons eu longtemps une monarchie héréditaire que nous avons agrandi et embelli notre pays et que nous avions une des nations les plus peuplées d’Europe. Ce n’est plus le cas et ça laisse la porte ouverte aux invasions.
Maurras citait souvent cette maxime, tirée de je ne sais plus quel auteur grec : « Les soldats combattent pour les chefs, et les chefs combattent pour la victoire. » Mais en réalité, les chefs militaires combattent eux aussi pour le chef suprême, qui est le chef de l’État : jadis le roi, aujourd’hui le président de la République, en l’occurrence Emmanuel Macron. Alors, n’est-ce pas c’est tout dire !
Il faudra bien que quelqu’un se lève, (peut-être quelqu’un de très jeune, comme dans le film « Andrea Roublev, » qui connait le secret, , notre secret pour faire retentir et chanter enfin notre délivrance de ce cauchemar, « où le voile des nuages sera pour ainsi dire déchiré par le soleil d’un nouveau réveil religieux ». . Rêve fou, non ce qui est fou, c’est de ne rien faire. En attendant ce moment, agissons, préparons le chemin là où nous sommes, en le portant dans notre cœur et notre intelligence.