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Par Pierre Builly.
Violette Nozière de Claude Chabrol (1978).
Quelle énigme!
Introduction : Le film est inspiré de l’histoire réelle de Violette Nozière qui défraya la chronique judiciaire et criminelle en 1933 et 1934. Au cours des années 1930, Violette est une adolescente qui se prostitue en secret. Ses parents, Baptiste et Germaine ne remarquent rien.
Mon appréciation favorable va bien d’abord aux acteurs – la toujours exceptionnelle Isabelle Huppert en premier lieu, bien sûr – mais aussi Stéphane Audran qui, après avoir été une des plus jolies femmes de Paris entamait là, non sans courage, une sorte de reconversion en femme marquée par la vie qui la conduirait à la mégère odieuse de Coup de torchon et à la hideuse femme en gris de Mortelle randonnée et Jean Carmet, très retenu, et très bien dirigé.
Un bon point aussi au climat décrit, à la reconstitution de l’époque : l’appartement surchargé et exigu du couple Nozière (qui m’a fait curieusement songer à l’appartement des Doinel, dans Les Quatre cents coups : même parcimonie d’espace, mêmes escaliers crasseux qui doivent sentir le chou suri et le poireau aigre, mêmes espaces restreints et lits étroits), les décors des bistrots, la tenue des passants, la tonalité générale de ces années où les illusions de la Victoire sont bien loin, les Années folles bien mortes et où l’on pressent sourdement que l’on est entré dans une nouvelle Avant-Guerre.
Mais j’accroche mal à la façon dont Chabrol traite le sujet, laissant subsister plein de zones floues et donnant un caractère énigmatique au récit, avec ses pistes ouvertes, qui, comme il ne s’agit pas d’un film onirique à la David Lynch, ne me convainc pas.
J’entends bien que, comme pour plusieurs faits divers crapuleux de l’Histoire (de l’affaire du Courrier de Lyon à l’affaire Dominici), on n’est là sûr de rien (mais peut-être le mystère est-il moins grand là que dans les deux crimes que j’ai cités). J’entends également que Chabrol peut n’avoir pas voulu adopter une thèse précise – Nozière avait-il ou non abusé de sa fille comme elle l’a prétendu ? – et a choisi volontairement certaines invraisemblances pour nous faire saisir la facilité d’emprunter de fausses pistes.
Mais ces pistes qui ne sont pas – j’insiste – des rêveries, qui rendraient tout plausible, ni même des récits antagoniques me retiennent et me choquent. Et là, je suis bien proche de mettre un mauvais avis…
Un point de détail : la réhabilitation de Violette a été, certes, prononcée par la Cour d’appel de Rouen, en mai 1963 ; mais je serais curieux (qui pourrait nous éclairer ?) de connaître les ‘’Attendu’’ de ce jugement : la Cour a-t-elle accordé un satisfecit pour la bonne conduite de la meurtrière, en prison et après son mariage ? Ou a-t-elle jugé que l’assassinat du père, incontesté, aurait été justifié, du fait de l’inceste, et que, lors du procès initial, la jeune fille n’aurait pas dû être condamnée ? ■
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Chroniques hebdomadaires en principe publiées le dimanche.