Par Mathieu Bock-Côté
Cette analyse*, remarquable dans sa brièveté, ne néglige pas le cas particulier, la marge. Mais elle se porte immédiatement vers le général, le social, la norme. Et, comme nous-mêmes ici, Mathieu Bock-Côté ne renonce pas aux fondamentaux : la nature humaine, la nature politique et sociale, la nature tout court, vainement niées par l’idéologie moderne ou postmoderne. LFAR
Depuis quelques années, la société occidentale s’est ouverte à la réalité des transsexuels.
Elle cherche à comprendre ceux qui se sentent étrangers à leur corps et qui croient être d’une autre identité sexuelle que celle qu’on leur a reconnue à la naissance.
Table rase
Mais de ce souci légitime et nécessaire pour les trans, nous sommes en train de basculer dans l’idéologie trans. C’est-à-dire qu’on entend appliquer la grille de lecture trans à l’ensemble de la société.
Ce glissement est inquiétant.
On l’a encore constaté ces derniers jours avec une histoire qui nous vient de Colombie-Britannique.
D’abord les faits : Kori Doty refuse de se considérer comme homme ou femme. C’est une chose.
Mais il est manifestement en croisade. Comme nous l’apprenait la CBC, il lutte pour que son enfant ne soit inscrit ni comme garçon ni comme fille, sur les documents officiels. Pour l’instant, il y est parvenu sur sa carte d’assurance-maladie.
À terme, il aimerait donner ce droit à tous les parents.
Son objectif avoué : élever son enfant dans l’indifférenciation sexuelle.
Un jour, l’enfant décidera s’il est un garçon ou une fille. Mais pour l’instant, il préfère lui imposer une identité flottante, désincarnée.
Précisons qu’à ce qu’on en sait, l’enfant ne semble témoigner d’aucun trouble de l’identité sexuelle. C’est le parent qui décide explicitement de lui imposer son idéologie et sa vision du monde en prétendant le libérer de la pression étouffante de la société.
Et pourtant, des cas semblables risquent de se multiplier dans les années à venir. On y verra un symptôme de la diffusion de la théorie du genre, qui se prétend scientifique.
Cette théorie repose sur l’idée suivante : le masculin et le féminin sont de pures constructions sociales artificielles. Entre le sexe biologique et l’identité sexuelle d’une personne, le lien serait ténu, pour ne pas dire inexistant.
La théorie du genre ne se contente pas de dire que la définition du masculin et du féminin varie au fil des époques, ce qui va de soi : elle veut simplement abolir cette distinction.
L’individu, quel qu’il soit, devrait pouvoir choisir son sexe. Ainsi, il pourrait décider intégralement de son identité, sans que la nature ou la culture s’en mêlent. Il se définira seulement par son désir et ses fantasmes.
C’est le fantasme effrayant de la table rase.
Nature
Autrement dit, on prend désormais la marge pour la norme. Mais si c’est une chose de respecter les marges, c’en est une autre de les prendre pour modèles. Grâce à l’État, et peut-être demain, grâce à l’école, on veut imposer l’idéologie trans au commun des mortels.
Mais on oublie que la nature humaine n’est pas qu’un amas de préjugés.
À de très rares exceptions, souvent dramatiques et qui méritent évidemment notre sympathie et notre soutien, être homme ou femme va de soi, ce n’est pas un choix, c’est même un fait de nature aussi insurmontable qu’absolument évident.
La nature humaine est sexuée et cela fait sa beauté. À vouloir arracher l’individu à la nature humaine, à terme, on le détruira. •
* Journal de Montréal, 4.07
Cette analyse est remarquable. J’apprécie le respect légitime à ceux qui sont en marge, mais je soutiens également que la marge ne peux devenir la norme. Oui c’est une chose de respecter les marges, c’en est une autre de les prendre pour modèles.
Robert