Sommaire
Actualité :
Mali : la France entre Barkhane et le G5 Sahel
Dossier Rwanda : Allons-nous enfin savoir qui sont les assassins du président Habyarimana ?
– Le curieux missile du Kivu
– Que contient le dossier du juge Herbaut, successeur du juge Trévidic ?
Livres :
Sétif, encore et encore…
Editorial de Bernard Lugan
Face au chaos libyen qu’ils ont provoqué, s’obstinant à nier le réel et encalminés dans le néocolonialisme démocratique, les « Occidentaux » ont prétendu reconstruire la Libye autour d’un fantomatique gouvernement d’ « Union nationale ». Présidé par M. Fayez Sarraj, ce GUN est en réalité l’otage des milices islamistes de Tripolitaine et des Frères musulmans de Misrata.
Face à cette politique « hors sol », la Russie a déroulé un plan reposant sur les rapports de force militaires. Sa conclusion fut le voyage que le général Haftar – l’homme avec lequel la « diplomatie » européenne refusait de parler directement -, effectua à Moscou les 27 et 28 novembre 2016.
Du jour au lendemain, les nains politiques de l’UE réalisèrent alors que le « rebelle obstacle à la démocratisation de la Libye » était en réalité le maître de la Cyrénaïque, qu’il disposait de la seule force militaire du pays, qu’il contrôlait 85% de ses réserves de pétrole, 70% de celles de gaz, 5 de ses 6 terminaux pétroliers, 4 de ses 5 raffineries, et qu’il avait l’appui de la confédération tribale de Cyrénaïque ainsi que celui des tribus kadhafistes de Tripolitaine[1].
Le 25 juillet 2017, le président Macron a organisé une rencontre entre Fayez Sarraj et le général Haftar, ce dernier voyant ainsi sa stature internationale confortée. Les deux hommes ont conclu un accord non signé et non ratifié.
Que peut-il en résulter alors que le général Haftar est le maître de la Cyrénaïque quand Fayez Sarraj ne contrôle même pas Tripoli et vit sous la menace permanente des milices ?
Les deux hommes se sont engagés à organiser des élections. Certes, mais la Libye a déjà connu plusieurs scrutins qui n’ont à aucun moment permis d’avancer sur le chemin de la paix. De plus, comme le Conseil des tribus n’a pas été partie prenante à cet accord, si Seif al-Islam Kadhafi n’y est pas associé d’une manière ou d’une autre, il demeurera lettre morte.
*
La situation s’aggrave au Mali où, en dépit de l’accord de paix, les groupes armés signataires s’entretuent. Le climat sécuritaire du pays est plus mauvais aujourd’hui qu’il y a quatre ans, quand le président IBK a été élu. A l’insécurité dans le nord, s’ajoute en effet le centre du pays où, pudiquement, les observateurs parlent de « violences communautaires » pour ne pas dire guerre ethno-tribale, l’islamisme n’étant ici que la surinfection d’une plaie ethnique.
*
Les Casques bleus de la mission de paix au Congo (Monusco) ont mis la main sur un missile sol-air récupéré sur une milice du Kivu armée par Kigali. Il porte les mêmes numéros de série et a été fabriqué à la même date (avril 1987), que les deux missiles qui ont abattu l’avion présidentiel rwandais le 6 avril 1994. Ces éléments sont contenus dans un rapport officiel de la Monusco dont le rédacteur demande qu’il soit transmis au P5 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité) ou au P3 (les trois membres occidentaux du conseil de sécurité), à défaut, aux autorités judiciaires françaises en charge de l’enquête concernant l’attentat du 6 avril 1994.
Ce rapport a maintenant plus de 10 mois. Si l’ONU ne l’a pas encore transmis au juge Herbaut, cela démontrerait une fois de plus que certaines puissances ne veulent toujours pas, 22 ans après l’attentat qui fut le déclencheur du génocide du Rwanda, que la vérité soit faite sur son (ses) commanditaire(s). •
[1] Pour tout ce qui concerne les tribus de Libye et leurs alliances, voir de Bernard Lugan Histoire de la Libye des origines à nos jours.