Le Lundi de Louis-Joseph Delanglade que nous avons publié hier – Entretenir la flamme – a suscité aussitôt des commentaires intéressants et, d’ailleurs, contradictoires. Nous avons retenu les deux premiers qui sont argumentés et opposés. On les lira avec intérêt. LFAR
Le commentaire de Pierre Builly
Presque en rien d’accord avec cet édito : j’ai ressenti, pour ma part, une immense joie par cette désignation. Après les échecs enregistrés pour les Jeux de 1992, 2008 et 2012, Paris ne pouvait pas renoncer à organiser l’événement mondial sportif le plus important qui se puisse.
Les avoir obtenus, dans le « deal » que le CIO a proposé avec Los Angeles, n’était pas anodin ni facile : il fallait surtout tenir bon sur 2024, ne laisser aucune échappatoire permettant de penser que notre Capitale pourrait se contenter de 2028. Cette fermeté têtue a payé et il faut en féliciter les promoteurs de cette candidature.
Se poser la question du « rendement financier » de la désignation est puéril : bien sûr que les Jeux vont – dans une stricte démarche comptable – coûter plus qu’ils ne « rapporteront ».
Eh ! Ne croit-on pas que l’Opéra de Paris, les centaines de musées éparpillés çà et là sur le territoire et dont certains ne reçoivent que quelques centaines de visiteurs par an mais entretiennent gardiens et billetteries sont « rentables » ? Que le défilé du 14 juillet est rentable ?
Outre que l’organisation matérielle des Jeux va transformer radicalement une banlieue pourrie – comme le stade de France, conçu pour la Coupe du monde de football de 1998 l’a fait pour l’autre partie de la Plaine Saint Denis – et laisser à la place de taudis un nouveau quartier, les infrastructures de transport seront accélérées et modernisées, une grande piscine sera construite, etc.
Qu’on daube sur la dérive financière des performances des sportifs montre aussi en quel mépris on tient, dans nos milieux, le « geste » sportif : pour moi, qui suis depuis toujours fana du spectacle sportif, la performance est bien plus émouvante et admirable que des trucs révérés par ceux qui préfèrent… je ne sais pas, moi, la peinture au kilomètre des Renoir ou des Monet. Revoir Renaud Lavillenie réussir son 3ème essai victorieux à 5,96 à Londres me fera toujours plus d’effet que l’accumulation des gribouillis de Picasso.
Je conçois parfaitement qu’on puisse ne pas aimer l’émotion sportive, qu’on soit insensible à la haute cuisine, qu’une simple ritournelle populaire puisse laisser indifférent.
Je conçois aussi qu’on puisse trouver plaisir aux Offices de nuit de Solesmes, aux solennelles peintures de Poussin, aux tragédies tardives de Corneille : ce n’est pas mon cas et je n’y vibre pas : suis-je si méprisable ? C’est possible, mais je ne suis sûrement pas le seul en mon cas.
Et donc vive les JO, vive les sportifs (surpayés ? dopés ? Et alors ? si vous croyez que les artistes contemporains ne sont ni l’un, ni l’autre, vous vous mettez gravement le doigt dans l’œil), vive les émotions que nous rencontrerons dans 3 ans à Tokyo, dans 7 ans à Paris !
Le patriotisme « vvisible » s’est réfugié dans le sport et, à chacune de nos grandes victoires, beaucoup de gens ont eu beaucoup de bonheur à agiter des drapeaux tricolores et à chanter « La Marseillaise » : c’est bien dérisoire ? Possible… Mais c’est déjà ça… À nos gouvernements de profiter de ces moments de communion nationale pour diriger l’émotion populaire sur l’amour du pays.
Et c’est cela la vraie objection, la vraie question : en 1998 le bonheur de la victoire aurait pu donner lieu à un chant d’amour à la France, toutes couleurs confondues, à un moment d’exaltation vraiment nationale ; au-dessus des différences visibles, il y avait « notre » victoire…
Espérons…
Le commentaire d’Antiquus
J’approuve quant à moi l’édito de L.J. Delanglade, et je ne partage pas l’enthousiasme de Pierre Builly.
En 1998 je n’ai nullement éprouvé ce moment de « communion nationale », et je dirai même que j’espérais bien que les croates eussent le dessus sur l’équipe black black beur. La comparaison avec l’opéra de Paris et les musées est fallacieuse car ces monuments sont durables alors que les JO ne sont qu’une flambée éphémère.
A propos de flambée, tout va flamber à cette occasion : les prix, les loyers, les denrées, mais aussi la délinquance, le vandalisme, et la situation des parisiens français en sera encore dégradée. Et une fois les monceaux d’ordures nettoyés et les touristes partis, gorgés de mauvaise nourriture et peut-être nantis d’une chaude-pisse, il faudra payer l’addition et ce sont les impôts qui vont flamber à leur tour.
Vraiment, je ne vois pas une seule bonne raison de me réjouir. Mais peut-être des événements imprévus empêcheront-ils cette bacchanale de se dérouler, et même s’ils charrient de mauvaises occurrences, d’un mal pourra jaillir un bien. En tout cas, comme Montaigne fuyant la peste de Bordeaux, je fuirai Paris pendant les jeux, si toutefois je suis encore en vie. •
J’aime bien la fraîcheur juvénile de P. Builly, mais bien que suivant le foot par exemple de loin j’ai remarqué que quand la France gagne ce sont les drapeaux algériens qui sortent.
Je suis d’accord avec Antiquus, les conséquences économiques seront désastreuses pour les français. et personnellement je pense que le sport ( au moins aujourd’hui) n’apporte pas d’intelligence à la société !
Une seule question: ces jeux sont -ils fidèles au projet du Baron Pierre de Co bertin et à son idéal: la joie d’admirer des ( beaux) athlètes – il devrait aussi y avoir un esthétique – et de faire communier le public dans une fête des sports libérés des remugles partisanes du chauvinisme idéologique le plus éhonté. ? , sans parler des dérives financières scandaleuses? Oui, est-ce Le triomphe du fair play, de l’adversaire honoré, de la beauté dans l’effort; bref la noblesse du sport qui transcende les passions souvent idéologiques malsaines? Sans parler de la débilité des commentaires politiques ou journalistiques jusqu’à l’ écœurement total. je pense à 1998 qui m’a dégouté à jamais du foot? A chacun de faire son examen de conscience, le mien est fait .
Je ne comprend rien au sport ; je le regrette parfois car cela me parait sain ( la sédentarité est devenue un véritable fléau social ). Au delà des dérives – qui sont minoritaires : le sport professionnel , semble-t-il ,étant le plus en cause .
Reste la question des drapeaux et de l’hymne national : ne faudrait-t-il pas calmer le jeu ? impose t’on de jouer la marseillaise en début de spectacle à l’opéra par exemple , agite t’on le drapeau tricolore au théâtre
Laissons les sportifs s’exprimer dans leur jeu , leur enthousiasme sans vouloir les instrumentaliser . ( et temps pis pour le drapeau algérien : il nous laisse de marbre )
à Antiquus:
quand vous écrivez
Mais peut-être des événements imprévus empêcheront-ils cette bacchanale de se dérouler, et même s’ils charrient de mauvaises occurrences, d’un mal pourra jaillir un bien. En tout cas, comme Montaigne fuyant la peste de Bordeaux, je fuirai Paris pendant les jeux, si toutefois je suis encore en vie.
pensez-vous aux signes du ciel annoncés pour samedi prochain?
Panem et circenses ! Voilà bien la seule pensée qui me vient à l’esprit à l’évocation de ces Jeux Olympiques de Paris.Quand on voit l’état de décomposition de la société apostate actuelle qui se vautre dans des abomination de toutes sortes, je pense qu’il y a vraiment d’autres priorités pour relever la France, spirituellement s’entend car le reste est accessoire, même si, financièrement, je souscris aux dires d’Antiquus
À tous ceux qui craignent de mettre la main à la poche et qui pensent qu’une Nation devrait être semblable au coffre-fort de l’Oncle Picsou, je conseille de pétitionner pour que, afin d’équilibrer un peu les comptes, nous puissions vendre ne serait-ce que le tiers des réserves du Louvre, qui ne sont jamais exposées ou seulement à l’occasion d’une exposition fort temporaire. Cela vous fait frémir ? Moi aussi, d’une certaine mesure ; mais il faut reconnaître que c’est là une fort mauvaise gestion de portefeuille…
À ceux qui pensent que les infrastructures des JO ne seront pas pérennes, j’appelle l’attention sur le village olympique, qui constituera après les Jeux, un nouveau quartier péri-parisien qui remplacera entrepôts et friches, sur la piscine qui sera construite à Aubervilliers et bouleversera là aussi l’espace urbain, sur l’accélération de la création des lignes de métro destinées à améliorer le maillage du « Grand Paris ».
À ceux qui voient des drapeaux algériens partout, je recommande de regarder d’autres sports que le football ; je n’en ai jamais vu lors des victoires françaises en athlétisme, en natation, en escrime, en équitation, en aviron, en judo, en boxe…
Quant à celui qui aurait préféré la victoire des oustachis croates sur les tirailleurs sénégalais, que dire ?
Tiens ,Tiens : les oustachis ( pour les croates ) , les tirailleurs sénégalais , l’idéologie pointe le bout de son nez ou plutôt la beaufitude . Vous voudriez discréditer le sport dans sa faculté de rassembler que vous ne vous -y- prendriez pas autrement .
Taratata ! Moi, ce que j’aime c’est que le drapeau français étincelle et que la France gagne. Les Croates ont fait d’excellentes troupes durant les guerres de la monarchie, les tirailleurs sénégalais dans les conflits plus récents. Au bout du compte, que ce soit le maréchal de Saxe ou Eunice Barber (double championne du monde d’athlé, née en Sierra Leone), le résultat est le même…