L’abondance de l’actualité (pour reprendre la formule consacrée…) ne nous a pas permis de passer plus tôt cette petite réflexion sur un reportage ahurissant, et scandaleux dans ce qu’il révèle , que France info avait consacré aux dérapages du LKP, au plus fort de la crise que la Guadeloupe vient de traverser.
Encore le mot dérapage est-il un tendre et doux euphémisme, pour parler d’une réalité qui mériterait rien moins qu’une bonne charge de CRS et une action devant les tribunaux…..
Ne sont-ils pas engageants (!), ces GO d’un nouveau genre, d’une Guadeloupe transformée par le LKP en Club lui aussi d’un nouveau genre ?…..
Au plus fort de la grève générale imposée par le LKP (on va voir pourquoi nous disons imposée…), France Info, dans un louable souci d’impartialité, avait donné la parole à plusieurs opposants au LKP. Parmi ceux-ci, une femme, chef d’une petite entreprise, qui avait eu le courage de parler à voix haute, au micro de la station, devant un barrage du-dit LKP.
Et qui avec beaucoup de cran, à quelque mètres des énergumènes dont on va voir la réaction, protesta vigoureusement contre l’entrave à la liberté du travail, expliquant qu’elle comprenait tout à fait que l’on puisse faire grève, mais qu’elle devait travailler pour nourrir ses quatre enfants, et que le droit de grève n’était pas le droit d’interdire à ceux qui ne voulaient pas faire grève de travailler etc… etc…
Le ton monta, elle se mit même à pleurer à l’antenne lorsqu’un groupe du barrage d’à côté la prit à partie violemment, l’insultant et la menaçant; toujours devant les micros. On était donc aux premières loges de ce spectacle sonore ahurissant, indigne d’un pays civilisé. L’un des membres du SO du LKP vint même parler au journaliste : « elle est folle… c’est une prostituée… » ; puis, cerise sur le gâteau, on a même pu entendre, à la fin du reportage « t’a pas enregistré au moins ?….. ».
Ca se passe comme ça chez Mac Donald, dit une pub pour le néfaste-foude. Il n’y a pas que chez Mac Donald ! Ca se passe comme ça aussi en Guadeloupe, aujourd’hui, là où l’incurie du gouvernement abandonne la rue à ce qui n’est rien d’autre qu’une milice faisant régner la terreur.
Comme aux bons vieux temps des bonnes vieilles terreurs révolutionnaires, des bonnes vieilles démocraties populaires etc… etc….
Au risque de me faire insulter par certains, je vais poser une question impie: faut-il vraiment continuer à conserver un territoire qui coûte net 2000 € par an à chaque français? Que disent les LKP et les autres? Ils s’indignent de ce que les prix des marchandises de première nécessité importées de métropole ne soient pas suffisamment subventionnées. Pourtant, il y a de quoi produire une agriculture vivrière dans ces îles, et d’ailleurs, c’était le cas jusqu’en 1950. Il est vrai que, comme pourraient me le rétorquer les esprits subtils, dans le climat actuel, si l’on donnait l’indépendance à ces îles, nous devrions payer encore plus ; je propose donc que l’on libère définitivement la France de ses colonies.
La question mérite en effet, au moins, d’être posée…..
Moi aussi je prends le risque de me faire insulter mais pas par les mêmes.
C’est une grève générale venue des entrailles, avec les excès inévitables de langage et les radicalisations de ceux qui sont élevés dans le “baisse les yeux, ferme ta bouche”.
Même si certaines revendications sont irréalistes, les raisons de manifester sont justes.
La vie est chère: au moins 50% plus cher qu’en métropole. C’est gérable uniquement pour les fonctionnaires qui touchent justement 40% de plus pour la vie chère.
Malgré les maladresses de toute manifestation de cette ampleur, malgré les “la Guadeloupe est à nous, elle n’est pas à eux” inhérents à une douleur non encore cicatrisée, je regarde ces hommes avec respect.
Mon cher Sébasto, il me semble que vous placez le problème là où il ne se trouve nullement. D’abord, qui parle de manquer de respect? Ai-je exprimé mon mépris pour les guadeloupéens? Il ne me semble pas. Simplement, je me demande par quelle aberration des îles situées à 15000km de la France exigent que ce pays finance indéfiniment le différentiel de niveau de vie observé aux Antilles. Différentiel qui, je vous le ferai observer, est en progression constante. La vie ne devient -elle pas de plus en plus chère aussi pour les habitants de l’hexagone? Faut-il en plus qu’ils subissent des charges supplémentaires pour que la ménagère antillaise achète des produits importés à grands frais de l’autre côté de l’atlantique? Ne serait-il pas plus judicieux de créer sur place, comme c’était le cas il y a cinquante ans, une production vivrière? Faut-il taire également « par respect », que le taux d’endettement et la proportion de RMI y est le triple de la métropole? Que la propension au travail y est très faible et le taux d’épargne nul? Et si vous me répondez que ce sont des séquelles de l’esclavage, je vous répondrai que je ne suis tout simplement pas d’accord pour reconnaître ad vitam aeternam une dette insatiable envers quiconque. Aucun peuple ne peut vivre avec une dette éternelle sur le dos.
Mon cher Antiquus, loin de moi l’idée que puissiez mépriser quiconque et je vous prie de m’en excuser si c’est ainsi que vous l’avez ressenti.
Seule la mise en oeuvre d’une politique de reconnaissance des différences associée à une extension de la participation démocratique et à un renouveau de la notion de citoyenneté fondé sur le principe de subsidiarité sera de nature à résoudre le problème de la Guadeloupe (et autres).
Loin que l’existence de groupes identitaires soit incompatible avec la démocratie, la reconnaissance des communautés peut au contraire créer les conditions d’une meilleure participation à la vie publique.
La démocratie consiste à reconnaître l’égalité politique des citoyens, pas à nier leurs particularités aussi longtemps que les attributions juridiques qu’elles entraînent restent compatibles avec la loi commune.
Il s’agit de faire en sorte que la diversité cesse d’être extérieure à la citoyenneté, que la citoyenneté cesse d’être synonyme d’uniformité.
L’analyse de la situation par Michel de Poncins est instructive :
http://www.generationfa8.com/texte.php?nom_page=actualite_fr&id=323
la comparaison entre La Réunion et l’Ile Maurice n’est qu’un exemple parmi d’autres.
Bonne lecture
J’applaudis des deux mains, cher Sébasto, à vos prémisses. Il faut que chaque communauté s’auto-organise selon ses particularismes. Seulement ce n’est absolument pas l’autosuffisance que réclament les manifestants des DOM TOM. Ce qu’ils réclament, c’est que nous payions davantage, afin d’arriver à l’égalité de niveau de vie, c’est à dire exactement le contraire de ce que vous recommandez.
En l’année 2000, l’administration de l’île a décidé de reconstruire l’escalier qui conduit à La Soufrière. Les entreprises sollicitées ont refusé car l’enveloppe de réparation était insuffisante. On a confié le travail aux employés municipaux qui ont tout le matériel pour réaliser ces travaux. Les dits employés ont refusé car c’était trop fatiguant et risqué (!!!).
Alors la métropole a envoyé des militaires du régiment du Train de Mourmelon. Le travail a été fait. Cette histoire est véridique, je connais l’officier et le sous-officier qui commandaient ce détachement.
Encore faudrait-il mon cher Antiquus que cela soit possible.
La Constitution française s’oppose » à ce que soient reconnus des droits collectifs à quelque groupe que ce
soit, défini comme une communauté d’origine, de culture, de langue ou de croyance « . Cette déclaration du Conseil constitutionnel a le mérite de la clarté. Les principes sur lesquels elle s’appuie relèvent en effet d’une idéologie bien précise. Cette idéologie est celle du jacobinisme, et c’est sur elle qu’il faut maintenant s’interroger pour en identifier les racines historiques et en mesurer la portée.
Le jacobinisme correspond historiquement à la forme la plus extrême de l’idéologie de l’Etat moderne, c’est-à-dire de l’Etat-nation. C’est une idéologie qui vise à faire concorder de façon rigoureuse, à rendre homogènes sur un même territoire, l’unité politique et l’unité culturelle ou linguistique, grâce à l’action d’un pouvoir central détenteur d’une souveraineté exclusive, support visible de l’intérêt de tous et représentant unique de la totalité des citoyens.
Elle apparaît dès l’Ancien Régime, notamment avec l’émergence au XVIe siècle, chez Jean Bodin, d’une nouvelle théorie de la souveraineté.
Cette conception s’inspire de l’absolutisme papal (et au-delà, du modèle de la toute puissance divine), et va d’ailleurs de pair avec la diffusion du droit romain aux dépens du droit coutumier.
En 1789, la Révolution constitue la nation politique en abolissant les ordres de l’Ancien Régime, mais elle conserve, en l’aggravant, la même tendance au centralisme, la même conception de la souveraineté. L’obsession de l’unité est chez elle plus forte que jamais. La revendication d’égalité justifie l’ingérence toujours plus poussée de l’Etat dans les mécanismes de la vie sociale. On voit par là combien l’individualisme et l’étatisme sont voués à marcher du même pas.
Ayant le monopole de l’organisation juridique, l’Etat-nation ne peut tolérer le maintien en son sein d’entités juridiques et empêche donc les communautés et les régions sur lesquelles il exerce son pouvoir de s’instituer ou de se maintenir comme de telles entités.
Je ne puis que souscrire à ce que vous écrivez, mon cher Sébasto. Cependant, s’il est vrai que la révolution intellectuelle que vous proposez-l’abolition du jacobinisme, et aussi du puritanisme temporel, dont vous ne parlez pas-, sont nécessaires, elles ne sont pas suffisantes pour autant. Pour qu’un peuple comme celui des Antilles puisse constituer « une communauté d’origine, de culture, de langue ou de croyance » tout en vivant harmonieusement dans l’ensemble français, il faudrait pour cela qu’il cesse d’être imprégné de ressentiment, ce ressentiment alimentant des revendications dégradantes aussi bien pour les anciens esclaves que pour l’ancien colonisateur.