Par Aristide Renou.
De sa page Facebook le 8 juin. Au sujet des lignes qui suivent, un lecteur a écrit cet avis que nous partageons : « Une fois de plus… Simple, clair et concis. Enfin un peu d’argumentation et de logique dans un monde de slogans… » [Jean-Michel Coletti]
A propos des personnes qui ont été tuées (récemment ou moins récemment) par les forces de l’ordre à la suite d’un refus d’obtempérer, j’aimerais beaucoup que l’on cesse d’utiliser un argument idiot qui consiste à dire qu’un refus d’obtempérer ne mérite pas la mort – ou, comme je l’ai lu sous la plume de Laurent Mauduit : « Une infraction au code de la route, même avec un délit de fuite, ne mérite pas la peine de mort ! »
Cette manière de décrire les choses est évidemment destinée à couper court à tout débat et à toute réflexion : étant donné que nulle personne tant soit peu sensée ne peut estimer qu’un refus d’obtempérer vaut la peine capitale, toute mort causée par les forces de l’ordre sera immédiatement considérée comme une faute très grave.
Sauf qu’il s’agit d’un contresens grossier, étant donné que l’usage de la violence par les forces de l’ordre n’a strictement rien à voir avec une peine.
Une peine est ce que la justice vous inflige lorsque vous avez commis un crime ou un délit. Cette peine doit, normalement, être prononcée à la suite d’un procès équitable et proportionnée à la gravité de votre faute.
L’usage de la violence par les forces de l’ordre n’est – en théorie du moins – pas destiné à punir les contrevenants mais à les obliger à se soumettre à la loi. La proportion qui doit être observée est celle entre la violence déployée par le contrevenant pour se soustraire à la loi et celle qui est nécessaire pour vaincre cette résistance. Etant entendu par ailleurs que, à la différence de la justice qui peut et même qui doit prendre son temps pour rendre son verdict, les forces de l’ordre doivent la plupart du temps employer la violence dans des situations d’urgence et de stress intense, qui laissent très peu de place à la réflexion.
La proportionnalité que l’on est en droit d’attendre de la part des forces de l’ordre dans l’usage de la violence sera donc beaucoup moins stricte que celle que l’on est en droit d’attendre de la justice dans le prononcé des sanctions. Et le principe directeur sera entièrement différent.
Le principe qui guide – ou qui devrait guider – la justice est : à chacun son dû. Le principe qui guide – ou qui devrait guider – les forces de l’ordre est : force doit rester à la loi.
Il serait totalement injuste de condamner quelqu’un à mort pour un refus d’obtempérer. En revanche, la mort du contrevenant du fait de l’action des forces de l’ordre peut être entièrement excusable, car l’usage de la violence n’est jamais sans risque, y compris mortel, car il existe toujours un moyen très simple de ne pas s’exposer à ce risque, qui est de ne pas résister (quitte à contester après devant les tribunaux), et enfin car force doit rester à la loi – si du moins nous voulons qu’existe un ordre légal.
(Et si l’on estime que l’ordre légal existant mérite d’être renversé c’est encore autre chose. Mais lorsqu’on veut faire la révolution, on ne se plaint pas de la violence arbitraire du pouvoir. C’est cette violence arbitraire qui est censée justifier la révolution.)
La vraie question est donc, pour le répéter : la violence employée était-elle nécessaire pour faire face à celle déployée par le contrevenant ? Tout le reste n’est que diversion ou sophisme mélenchonesque. Merci. ■