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A lire dans JSF : Le clivage du « nouveau monde » par Rémi Hugues.
Quatre livres fondamentaux de Charles Maurras réédités par B2M, Belle-de-Mai éditions
Enquête sur la monarchie. (Édition de 1925), 39 €, 836 p.
Le manifeste royaliste en ouverture du XXe siècle ! (Parution courant 1900). Maurras y pose la célèbre question : « Oui ou non, l’instauration d’une monarchie héréditaire, antiparlementaire traditionnelle et décentralisée est-elle de salut public ? » !
L’Avenir de l’intelligence, 25 €, 244 p.
Une étude de l’histoire politique et intellectuelle du XVIe au XXe siècle, où Maurras à montre comment les intellectuels et artistes attachés à produire des œuvres de l’esprit sont passés « de l’autorité des princes de notre Sang sous celle des marchands d’Or », les immenses fortunes industrielles et bancaires qui limitent la liberté de l’esprit. Maurras en appelle à une alliance entre les intellectuels et le patriotisme des Français pour renverser cette mécanique.
Kiel et Tanger, 29 €, 428 p.
Maurras y constate la tragique infériorité du régime républicain en matière de politique internationale, spécialement face à la menace allemande de l’époque. Prévoyant la guerre à venir il conclut à la nécessité de remettre un roi à la tête du pays. Prolongeant le réalisme de la pratique capétienne des relations internationales, ancêtre de la pensée géostratégique française.
La Démocratie religieuse, 31 €, 620 p.
Parution en 1921, compilant trois textes préalablement écrits par Charles Maurras : Le Dilemme de Marc Sangnier (1906) – – La politique religieuse (1912) – – L’Action française et la religion catholique (1914). Cet ouvrage voit dans la démocratie une religion nouvelle qui vide le politique de sa puissance.
Et aussi…
Henri Massis, Georges Bernanos, Maurras et l’Action française, présentation de Gérard Pol, 18 €, 104 p.
Léon Bloy, Le salut par les juifs, avant-propos de Laurent James, 20 €, 156 p.
Commandes et renseignements : B2M, Belle-de-Mai éditions – commande.b2m_edition@laposte.net
* Frais de port inclus
Point de vue sur le mouvement étudiant dans le Figarovox
Élisabeth Lévy est journaliste et directrice de la rédaction de Causeur. Dans son dernier numéro intitulé «Mouvement étudiant, le printemps de l’ignorance», le magazine Causeur publie une longue enquête sur le mouvement étudiant.
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Votre dernier numéro est consacré à la révolte des étudiants dans les universités. Vous titrez: «mouvement étudiant, le printemps de l’ignorance». Les jeunes d’aujourd’hui sont-ils vraiment plus «cons» que ceux d’hier ?
Quand on observe la minorité active et ignorante propager avec jobardise et dans un français pauvret des clichés à deux balles sur «le racisme d’Etat» et «les stéréotypes de genre» on se dit en effet que, les jeunes, c’était mieux avant. Mais pas d’amalgame! Le printemps de l’ignorance dont nous parlons, c’est le mouvement étudiant, et il concerne une micro-minorité qui a réussi à semer le bazar dans les facs de lettres et de sciences humaines. Cependant, il prospère sur un terreau extrême gauchiste qui lui, n’épargne ni les grandes écoles ni les facs de sciences.
Les activistes version 2018 sont-ils «plus cons» que leurs aînés, comme vous le dites joliment? Sur ce point je m’en remets à votre sagacité, après tout c’est votre génération. En revanche qu’ils soient moins bien éduqués, pour ne pas dire plus incultes, est une triste évidence. Ce printemps aura vu la révolte des bac + 0. Ce sont les enfants-rois d’une école qui a habillé d’un jargon ridicule et pompeux son renoncement à transmettre l’héritage au grand nombre. Et bien sûr, ils sont tout aussi conformistes dans la rebellitude que tous leurs prédécesseurs. Ces néo-militants font usage d’un salmigondis prétentieux et creux, rédigé dans une orthographe déplorable comme celle qu’a épinglée le Canard enchaîné dans un dossier de presse de l’UNEF. Le syndicat étudiant y craignait que les femmes choisissent des filières, accrochez-vous, «avec des qualités ou des prérequis dont elles pensent disposer actuellement ou étant à l’heure portée». «Le problème, ce n’est pas notre orthographe», claironne la vice-présidente du syndicat, qui poursuit des études de genre à Paris VIII (Saint Denis). Eh bien un peu, si! Il m’arrive de penser qu’on devrait leur céder et les laisser croupir dans les facs-dortoirs qu’ils semblent tant priser. Mais ce n’est pas de leur faute s’ils sont les enfants d’une école qui semble avoir adopté comme programme la médiocrité pour tous, d’une gauche qui méprise tellement les enfants de pauvres qu’elle a fermé les internats d’excellence et supprimé les bourses au mérite, et de médias qui caressent leurs lubies dans le sens du poil.
Enfin, il y a aussi des phénomènes de reproduction sociale et des injustices contre lesquels il faut se révolter!
Certes, mais pour ces jeunes gens, qui ont tous dû lire la même fiche sur Les Héritiers de Bourdieu (et Passeron), que l’on puisse exiger d’eux, à chaque étape de leur scolarité, des résultats et des acquis correspondants à leur niveau supposé, c’est déjà le comble de l’injustice. La méritocratie, c’est vraiment trop injuste! Cependant, le plus décourageant, c’est qu’une partie de leurs professeurs, au lieu d’être les intercesseurs du réel, les encourage dans leur combat pour le droit au diplôme. Certes, le gouvernement a fait évacuer les facs occupées. Mais outre que l’organisation des examens est très perturbée, on continue, avec la loi ORE et Parcours sup, à entretenir la fiction selon laquelle tout bachelier doit avoir une place en fac. Qui va d’ailleurs de pair avec la fiction d’un bac obtenu par plus de 80 % d’une génération. Et avec cette autre encore, qui selon Marcel Gauchet plait beaucoup aux profs, selon laquelle un doctorat passé à Trifouilly les Oies en vaut un autre, soutenu à la Sorbonne. Tout le monde sait à quoi s’en tenir, d’où la ruée de ceux qui en ont les moyens vers les formations sélectives, souvent privées, comme les «Cathos» de Paris et de province. Mais personne ou presque ne dit la vérité.
La vérité, c’est que la compétition du talent est infiniment préférable à la cooptation de la naissance.
Quelle vérité?
La vérité c’est que, dans le monde entier, il n’existe pas une seule formation non sélective qui ait la moindre valeur et que les diplômes qu’ils prétendent obtenir sans effort ne leur serviront à rien. La vérité, c’est que leur combat contre la sélection est un combat contre l’excellence, et contre le savoir. La vérité, c’est que si 80 % d’une génération obtient le bac, seulement 35 % obtient un diplôme d’études supérieures, ce qui signifie que le libre accès est un leurre. La vérité, c’est que la compétition du talent est infiniment préférable à la cooptation de la naissance. Quand on songe à l’idolâtrie que nombre de jeunes vouent aux grands sportifs, incarnation d’un monde ultra-compétitif, il est curieux que l’idée même de compétition soit devenue un objet de détestation et d’effroi. L’idéologie victimaire a fait des ravages dans les esprits: aucun jeune de 18 ans ne se dira aujourd’hui spontanément reconnaissant envers son pays, ni même envers les grands artistes du passé et les merveilles qu’ils nous ont léguées. En revanche, il vous alignera très vite la liste de ce que la collectivité lui doit dès sa naissance, sans qu’il ait lui-même à faire quoi que ce soit: un emploi, un logement, et même aujourd’hui, des enfants. Je caricature bien sûr, beaucoup de jeunes ont encore le goût de l’effort, quand ils ont la chance qu’on le leur ait inculqué. Mais j’ai l’impression qu’en quarante ans, cette mentalité de créanciers a progressé. On a tout de même vu des lycéens manifester pour les retraites….
Faut-il vraiment prendre tout cela au sérieux?
Ce n’est pas parce que c’est cocasse, voire ridicule, que ce n’est pas sérieux. On peut continuer à former les bataillons de sociologues bourdivins dont la France ne saurait se passer, et c’est sans doute ce qu’on fera. Il faudrait cependant rappeler qu’il n’y a plus de Parti socialiste triomphant pour employer tous ces sociologues dans des associations ou des municipalités…
Cependant, le désastre de l’enseignement des humanités – mot qui a d’ailleurs disparu de notre vocabulaire – et des sciences sociales est une affaire sérieuse. La sociologie est bourdivinisée et même sous-bourdivinisée car les épigones du maître n’ont pas son talent, l’histoire boucheronisée (Patrick Boucheron, coordinateur de l’Histoire mondiale de la France étant la nouvelle star de la discipline). Une fois passée la sélection féroce du premier cycle, on assiste, y compris dans les institutions les plus élitistes, au triomphe de l’idéologie et pas de la plus subtile. Et comment le serait-elle, quand son principal article de foi est la haine de ce qui n’est pas elle?
La longue enquête que nous publions révèle qu’à Normale sup et l’EHESS des adultes raisonnables doivent écrire en langue inclusive sous peine d’être dénoncés par de petits gardes roses.
Pouvez-vous la décrire plus précisément?
À moins de considérer comme une pensée la division du monde entre les dominants et les dominés on chercherait en vain une théorie unificatrice. Martine à la fac joue à Nuit debout, c’est-à-dire à la convergence des luttes, de l’écriture inclusive à la Palestine en passant par l’antispécisme et l’indigénisme des études décoloniales. Bref, c’est tous les jours la fête au vieux mâle blanc! La longue enquête sur le mouvement que nous publions révèle notamment que, dans les ex-temples du savoir que sont Normale sup et l’EHESS, des adultes raisonnables doivent écrire en langue inclusive sous peine d’être dénoncés par de petits gardes roses. Et on ne compte plus les séminaires sur les questions de genre ou sur tous les autres thèmes «tendance» sur lesquels se ruent des enseignants et des chercheurs pour être bien vus. On peut se contenter de rire, mais quand on pense à l’histoire de Normale sup et au rôle qu’elle a joué dans la formation des élites, on a le cœur serré.
Vous avez noté le rapprochement entre gauchistes et indigénistes. Cette nébuleuse «rouge-verte» vous inquiète-t-elle?
Oui, car elle témoigne de la dieudonnisation d’une partie de la jeunesse. L’indigénisme et ses théories délirantes sur le colonialisme toujours vivant préparent le terrain au crypto-islamisme qui voit en tout musulman un damné de la terre qu’il faut délivrer de ses chaînes, celles-ci s’appelant en l’occurrence laïcité et rac/isme d’Etat….
Même le chien Guevara ne vous a pas fait sourire?
Bien sûr que si, ce happening canin était très amusant. Et il prouve que les animateurs du mouvement étudiant sont des enfants de leur temps. En effet, c’est le genre de vidéo qui fait un malheur sur Youtube. Leur talent pour ce genre de choses saute plus aux yeux que leur pertinence politique.
Et les révolutionnaires de Sciences-Po?
Là encore, il faut distinguer le folklore contestationnaire de l’évolution structurelle. Comme me l’a dit un ami étudiant, «à 10.000 euros l’année de cours, les blocages ne durent jamais très longtemps à Sciences Po». En revanche, le succès qu’y remporte le catéchisme progressiste est pour le moins inquiétant. J’ai récemment débattu avec Marlène Schiappa de la «Révolution balancetonporc» à l’invitation de Sciences Po TV. Eh bien dans l’amphithéâtre Boutmy, plein à craquer (pas pour moi, je vous rassure), la personne la plus ouverte à la divergence était la ministre. Quand j’ai dit que, d’après mon expérience, il arrivait qu’une femme dise «non» en pensant «oui», l’assistance s’est étranglée. Cette pruderie est une autre différence, et de taille, entre la génération 68 et la génération 2018. Les émeutes de Nanterre ont commencé par des revendications sur la mixité, aujourd’hui, la pointe avancée du progressisme réclame des réunions non-mixtes et/ou réservées aux «personnes racisées», terme de la novlangue pour désigner les Noirs et les Arabes.
Les émeutes de Nanterre ont commencé par des revendications sur la mixité, aujourd’hui, la pointe avancée du progressisme réclame des réunions non-mixtes et/ou réservées aux «personnes racisées».
N’empêche, ce genre de manifs n’est-il pas un rite de passage obligatoire depuis 1968? Outre la pruderie que vous avez évoquée, qu’est-ce qui a changé?
Je ne suis pas une admiratrice incondit-7-ionnelle de mai 68, mais ce fut une secousse massive, dans toute la société. Aujourd’hui, on a affaire à un mouvement très minoritaire. Par ailleurs, il y avait, il y a cinquante ans, quelques raisons de se révolter contre des pouvoirs exclusivement verticaux, de la famille à l’usine. Seulement, on a jeté le bébé de l’autorité avec l’eau du bain autoritariste. Aujourd’hui, les étudiants en lutte se battent contre un patriarcat qui n’existe pas, contre un Etat policier qui n’existe pas et très souvent, contre des patrons qui ont bien moins de pouvoir que leurs actionnaires. Ils sont contre la mondialisation mais pour l’ouverture des frontières, ce qui signifie que, comme toute l’extrême gauche, ils abhorrent des effets dont ils chérissent les causes. Il y a cinquante ans Pasolini notait que les enfants d’ouvriers se trouvaient dans les rangs de la police, pas celui des manifestants. Aujourd’hui, la police est aussi discrète que possible et les enfants d’ouvriers font partie des étudiants qui veulent travailler.
Ce qui me frappe c’est leur «passion pour la laideur» pour reprendre l’expression d’Alain Finkielkraut dans vos pages …
En tout cas, contrairement à beaucoup de leurs aînés, ils n’ont aucune passion pour la beauté de la langue et des œuvres du passé.
Que vous inspire le phénomène Black block?
Je ne suis pas sûre de le connaître assez bien pour le commenter. À en juger par le profil de ceux qui ont été arrêtés, ce nouveau mot-valise cache une drôle d’alliance entre des punks à chiens adeptes de la contestation itinérante et des jeunes gens bien nés. Notre société est-elle si insupportable qu’il faille la détruire plutôt que de chercher à l’améliorer? Il faut croire que non, puisque seuls quelques centaines de jusqu’au-boutistes sont prêts à verser dans la violence. Et encore, parce qu’ils ne courent pas le moindre risque vu que, comme l’écrit Cyril Bennasar , l’ombre de Malik Oussekine «arrête les balles avant qu’elles ne soient tirées». Après tout, même cagoulés, quelques centaines de lanceurs de pavés ne menacent pas l’Etat de droit.
Au vu du rapport problématique de la majorité des sociologues avec le réel, ne serait-il pas plus simple de supprimer directement les «sciences humaines»? Et c’est un diplômé de Paris 8 en Histoire qui vous le dit…
Que proposez-vous, on ferme? On abandonne l’histoire, la sociologie et la littérature aux idéologues et à l’écriture inclusive? Et pourquoi pas, dans la foulée, concéder les banlieues aux islamistes en laissant tomber toutes les femmes qui se battent pour leurs droits? Si, comme vous l’euphémisez, une majorité de sociologues entretient un rapport problématique avec le réel, il y a une minorité qui résiste. Le Débat, la revue dirigée par Marcel Gauchet et Pierre Nora, a publié en novembre 2017 (n°197) un excellent dossier sur «la sociologie au risque du dévoiement», avec des contributions de Dominique Schnapper, Nathalie Heinich, Gérald Bronner et un texte d’Olivier Galland sur «la sociologie du déni». Certes, ceux qui disent la vérité en prennent souvent plein la figure – le dernier exemple en date étant l’accueil réservé par la corporation à l’enquête d’Anne Muxel et Galland confirmant l’existence d’une tentation radicale dans une minorité significative de la jeunesse musulmane. Insultes, soupçons, airs outragés et invectives se sont déversés sur les deux auteurs coupables de montrer ce que nombre de leurs pairs ne veulent pas voir. Et il faudrait les laisser tomber et accorder la victoire à leurs adversaires, qui se trouvent être les adversaires du réels? Cher Alexandre, ce n’est pas du défaitisme, c’est de la haute trahison!
La sélection a déjà lieu à travers le système des grandes écoles et des écoles de commerce souvent extrêmement coûteuses. Que reste-t-il aux enfants des milieux modestes qui veulent réussir quand l’université devient une Zad?
Mais la sélection n’est pas hostile aux enfants des milieux modestes, au contraire! Bien sûr, il faudrait changer beaucoup de choses en commençant par cesser d’accorder le bac à 80% des élèves, car ce bac au rabais ne vaut plus rien et il a entraîné l’université dans sa chute. Mais en attendant, il faut dire à tous les enfants de France qui ont le goût des études qu’ils peuvent réussir par leur travail. Certes, il faut plus s’accrocher quand on vient d’une cité du 9-3 que quand on a grandi à Neuilly. Quarante ans de réformes égalitaires du secondaire ont creusé les inégalités. Et il y a aujourd’hui à Sciences po, Normale sup ou Polytechnique beaucoup moins d’enfants d’ouvriers que dans les années 1980. Cependant, on peut encore arriver, par la volonté, à intégrer des filières d’excellence. Reste à savoir combien de temps elles le resteront.