Dans son numéro du 6 décembre 1923 L’Action Française rendit un vibrant hommage à Maurice Barrès, qui était décédé le 4.
La manière dont Charles Maurras commence son éloge laisse à penser qu’il fit sienne cette remarque de Soirées de Saint-Pétersbourg de Joseph de Maistre : « Les dialectes, les patois, les noms propres d’hommes et de lieux me semblent des mines presque intactes et dont il est possible de tirer de grandes richesses. »
Fin connaisseur des langues romanes, le Maître de Martigues introduisit cet éloge funèbre en traduisant barrès par « murailles » et tira de cela que « l’Homme du rempart » était la périphrase qui allait au grand écrivain de Lorraine comme un gant bien fait à une belle main.
Rempart contre l’anarchie littéraire des années 1880, qui voguait, telle un bateau ivre, entre les derniers disciples de Hugo et les derniers imitateurs de Zola. Grâce à lui, poursuit Maurras, ce prétendu anarchiste, prétendu disciple de Fichte, la tradition des moralistes était reprise.
Rempart contre l’Ennemi, lui qui dégermanisa la nouvelle génération, qui pouvait être tentée par l’asservissement au triomphateur de 1870.
Rempart contre l’orgueil, lui qui avait affaire à toute une faune, qui, se pressant autour de lui, courtisait et flattait son jeune génie.
Si Léon Daudet ne devait retenir qu’un seul livre sorti de cet esprit génial, ce serait La Colline inspirée, écrit-il ce même 6 décembre dans son éditorial intitulé « La mort de Barrès ». Livre qu’il qualifie de chef-d’œuvre. Et Daudet de révéler qu’à chaque fois qu’il le lit il entend en sourdine la Symphonie en la de Beethoven, et ces vers :
Mon cœur comme un tambour voilé
Va battant des marches funèbres
Ce chef-d’œuvre n’est pas seulement un récit, une histoire, mettant en scène les frères Baillard à Sion-Vaudémont, c’est de surcroît un roman-à-thèse, qu’en 1913 George Malet analysait ainsi pour la Gazette de France :
« Le sentiment religieux doit s’épanouir sous une discipline et sous une hiérarchie, dans des cadres fermement établis ; sinon, il s’égare, et d’autant plus loin qu’il est plus fort. Une âme mystique est vouée aux pires errements lorsqu’elle prétend se libérer de l’autorité dogmatique.
‟L’Église assainit le sol du village”, a dit un jour Barrès à la Chambre, devant la gauche étonnée, qui n’a pas l’habitude de penser si profond. » ■
Nous reviendrons sur Barrès et La Colline inspirée avec des chroniques de Pierre Lasserre dans L’Action française et Paul Bourget.
À signaler : Belle-de-Mai Éditions republie ce roman pour qu’il puisse accompagner l’été de chacun qui souhaiterait découvrir ou redécouvrir cette œuvre magistrale.
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