Dans le cadre des Mercredi de la Nar, Patrick Weber viendra parler ce soir de son dernier ouvrage Vive les Rois ! (1).
Dans la réflexion politique sur l’Europe, on oublie généralement les rois et les reines. Sans doute parce qu’ils font partie du paysage… Peut-être aussi parce qu’on croit, en France tout particulièrement, que la place médiatique des familles royales se trouve dans la chronique mondaine alors que leur rôle politique est manifeste.
Un regard plus attentif montre que les monarchies, qui sont rarement à la mode, ne se démodent pas.
Un roi, ou une Reine, n’a pas besoin de disposer de pouvoirs étendus, ni même d’aucun pouvoir immédiat, pour instaurer au sommet de l’Etat cet espace a-démocratique que nous appelons de nos vœux. Un espace a-démocratique soustrait aux enchères électorales et qui, comme on le voit dans toutes les royautés européennes, assure la sérénité, la stabilité, la continuité; et incarne la permanence de la nation, sur le temps long…
Écrivain, scénariste de BD, chroniqueur royal pour la télévision et la radio belge (RTBF) et pour le magazine Femmes d’aujourd’hui, Patrick WEBER a consacré de nombreux ouvrages aux monarchies. Le dernier qu’il a publié et qu’il viendra présenter ce soir s’intitule simplement « Vive les Rois ! ».
Ce n’est pas le cri d’un nostalgique ou d’un réactionnaire mais une présentation des atouts des royautés en Europe et dans le monde.
Sa conférence sera l’occasion de débattre de la place de la monarchie dans l’imaginaire national et du rôle politique que la royauté à nouveau instaurée pourrait jouer dans notre pays.
(1) : 17, rue des Petits-Champs, Paris 1er, 4e étage. La conférence commence a 20 heures très précises (accueil a partir de 19 h 45 – Fermeture des portes a 20h15).
Du point de vue de l’histoire des idées, le principe monarchique a des mérites évidents.
Nationalisme et monarchisme sont à peu près synonymes, mais c’est apparemment le premier qui conduit au second. Toutefois, la démonstration de la supériorité intrinsèque du principe monarchique sur le principe républicain ou démocratique s’associe trop souvent à une idéalisation insoutenable, de l’Ancien Régime.
En effet, il faut voir que les corps intermédiaires ont commencé à se disloquer sous l’action de la monarchie administrative, et que cette dislocation commence
avec la lutte contre le système féodal.
Affirmer que la monarchie française était fondamentalement décentralisatrice, alors que c’est le contraire qui est vrai est un non sens.
Cette vision idéalisée de l’Ancien Régime n’a pas seulement été contredite par l’historiographie contemporaine. Elle est déjà contredite par les observations particulièrement profondes faites au XIXe siècle par Renan et surtout par Tocqueville.
En fait, l’idéalisation de l’Ancien Régime, conduit à exempter la monarchie française de toute responsabilité dans les événements qui ont abouti à sa perte. Alors il ne faut pas s’interdire de rechercher dans l’histoire de la monarchie les causes de son déclin et de sa chute.
Pour Maurras, au contraire, les causes de la Révolution ne peuvent pas être endogènes. La Révolution ne peut s’expliquer que par l’irruption d’un élément « étranger » au génie français. Cet élément, c’est pour lui le « romantisme ».
Son livre de 1925, Romantisme et Révolution, montre que pour lui les deux mots s’équivalent Il décrète donc d’emblée que le romantisme est tout à la fois individualiste, donc anarchiste, donc révolutionnaire.
A ce romantisme, Maurras oppose le classicisme « méditerranéen » qui a bercé son enfance. Il pense que ce classicisme est étroitement associé au culte de la raison.
Il croit que le catholicisme vaut mieux que le protestantisme parce qu’il accorde plus d’importance à la raison.
Sa doctrine va dès lors se développer, non plus seulement à partir de l’opposition entre le principe monarchique et le principe républicain, mais à partir de deux autres oppositions, censées donner son véritable sens à la première : opposition conceptuelle entre classicisme et romantisme.
Cher Sebasto,
Sincèrement, il me semble que vous tombez dans le défaut que vous pointez du doigt. Bien sûr, vous avez raison quand vous dites que l’Ancien Régime ne doit pas être idéalisé, comme d’ailleurs, ajouterai-je, aucun fait historique, le Moyen-Age, la Grèce classique, le royaume de David, la Gaule pré-romaine, et j’en passe. Vous notez avec raison que la monarchie a centralisé, citant Tocqueville et son livre fameux. Cependant croyez-vous que la démocratie, l’aristocratie, la ploutocratie ou le despotisme donnent de meilleures garanties contre la centralisation? Le centralisme est un attribut de l’état, quel qu’il soit. Plus un état est durable, plus efficacement il centralisera. Même quand il décentralise, il ne peut s’empêcher de tricher. Tout cela existait déjà dans les cités grecques, dans l’Empire romain ou chinois. L’état se nourrit de l’ordre social qu’il dissout à la mesure de sa croissance (Bertrand de Jouvenel). Pour maintenir les libertés « d’en bas », il faut lutter en permanence contre l’état, en faveurs des communautés au premier rang desquelles la famille. Contrairement à ce que vous semblez dire, Maurras ne disait rien d’autre (voir l’article état dans le dict.pol. et crit.) Or la monarchie héréditaire, contrairement à la démocratie idéologique ou au despotisme, s’appuie sur les familles et non sur les individus. Elle permet donc de faire coexister dans le même temps et les mêmes personnes la fidélité et la résistance.
En ce qui concerne Maurras et le romantisme, permettez-moi de vous dire que, là encore, vous voulez trop prouver: si Maurras avait été le rationaliste (attaché au culte de la raison) que vous décrivez, comment aurait-il pu dire que « La Révolution ne peut s’expliquer que par l’irruption d’un élément « étranger » au génie français », pas seulement le romantisme, mais le libéralisme de Locke, par exemple. Une telle démarche herdérienne est totalement contraire au rationalisme qui applique au premier chef le principe d’universalité. Soyons critiques avec Maurras, mais non injustes.
Cher Antiquus,
Comme chacun le sait, la doctrine de Maurras constitue un édifice « parfait » dont il est difficile de discuter du moindre élément.
Mon propos est simplement de relever une apparente contradiction entre la théorisation de la monarchie et l’apologie de la monarchie française. Autrement dit, y-a-t-il adéquation entre le principe et sa démonstration.
Une autre contradiction est, me semble-t-il, de décrire comme relevant d’un romantisme un gouvernement révolutionnaire qui institua en France le culte de la déesse Raison, et à opposer l’idéal de l’antiquité classique à des conventionnels qui ne cessent de donner Sparte et Rome en exemple.
Son antigermanisme est également un peu paradoxal, si l’on se souvient des origines de la dynastie franque et des princesses allemandes qu’épousèrent fréquemment les rois de France.
Ce que vous même avait observé mon cher Antiquus, c’est que ce parti-pris devait le conduire à soutenir la politique qui allait aboutir à l’abominable boucherie de 1914-1918 et à approuver le traité de Versailles qu’il trouvait encore laxiste.
Je suis de ceux qui préfèrent le jeune Maurras de la fin 19èmè, début du 20ème à celui de la maturité.
Celle ou le jeune Maurras fédéraliste et antichrétien rêvait « d’helliniser » le monde et se disait persuadé « qu’un socialisme libéré de l’élément démocratique peut aller au nationalisme comme un gant sur une belle main ».
Pour revenir à aujourd’hui, la monarchie de droit divin selon Maurras étant devenue impensable, la monarchie constitutionnelle reste la seule possible. C’est sur cette transformation fondamentale qu’il faudrait s’interroger, plutôt que de répéter à l’envi, des principes déconnectés de toute réalité.
Bien entendu, la conclusion du commentaire précédent s’applique également à votre serviteur.