[Illustration en page d’accueil : « La troupe d’élite française sur le départ en Ukraine »]. Cette note de Roland Dumas, alors ministre des Affaires étrangères de François Mitterrand, date de 1993. Est-il utile d’ajouter que les jugements que Dumas et Mitterrand portent alors sur BHL nous paraissent valoir tout autant pour aujourd’hui ? « Nous sommes en pleine crise d’hystérie à propos de » non plus la Bosnie mais de l’Ukraine. Et revoici BHL à la manœuvre ! Flibustier de la politique … Permanence de sa capacité de nuisance …C’est à lire !
9 janvier 1993
Nous sommes en pleine crise d’hystérie à propos de la Bosnie. Monsieur Bernard-Henri Lévy se prend pour le ministre des Affaires étrangères. Il multiplie les déclarations et fustige notre prétendu immobilisme à propos de la guerre en Bosnie. Je n’ai aucune sympathie pour ce flibustier de la politique et son omniprésence médiatique m’agace au plus haut point. (…).
À l’Élysée, je fais part à François Mitterrand de l’effet que les déclarations de Lévy suscitent au Quai d’Orsay. Comme à son habitude, il minimise et devant mon air furieux, que je ne cherche pas à dissimuler, il me « cajole » comme il sait si bien le faire :
« N’y prêtez pas attention, Roland, cela n’a aucune importance mais je suis obligé d’en tenir compte car il a une grande capacité de nuisance. Continuez votre action. Ne vous en préoccupez pas. »
Il est vrai que la marge de manoeuvre est faible. On ne peut démettre quelqu’un d’une position qu’il s’est lui-même arrogée. L’« affaire» aurait pu en rester là mais elle rebondit quand il invite chez Lipp le président bosniaque, Izetbegovic, en compagnie de Mmes Simone Veil, Élisabeth Guigou, Anne Sinclair, Claire Chazal et de MM. Dominique Strauss-Kahn, Harlem Désir et Dominique Bromberger. Au menu : pot-au-feu pour tout le monde, mais surtout photographes et télévision. ■
Roland DUMAS
Politiquement incorrect, secrets d’Etat et autres confidences, carnets 19884-2014, Cherche Midi 2015