Par Yves MOREL.
Affolés par la décrépitude de leur pays, les Français “de droite” exaltent les hommes du Nouveau Monde qui leur paraissent avoir poigne et courage – oubliant au passage que leurs principes d’action diffèrent totalement de ceux de notre tradition nationale. Le libéralisme calviniste et la loi de la jungle ne servent pas le bien commun.
En 2018, feu Gérard Bedel publia un livre fameux intitulé Le gaullisme, maladie sénile de la droite, où il brocardait l’engouement d’une droite nationale vieillie, vaincue et désormais impuissante, pour le gaullisme en lequel elle voyait l’unique adjuvant possible à son effort de redressement et le seul moyen de reconquérir un public perdu depuis longtemps. À sa façon, elle comptait utiliser la « certaine idée de la France » du général, désormais idolâtré, comme l’instrument de réalisation d’un consensus national dont elle tirerait profit. Gérard Bedel démontrait l’inanité de ce recours au gaullisme perçu comme la seule planche de salut pour la droite, et montrait le côté artificiel, grossièrement synthétique et spécieux de la vision gaullienne de notre pays, en réalité étrangère à la véritable histoire et à l’essence même de la France – de la même façon que l’eschatologie teilhardienne ne livre aucunement le sens de l’évolution du monde.
Trump et Bolsonaro : des alliés ?
La droite nationale, en France, est prompte à tomber dans de tels travers. Et, depuis plusieurs années, elle en donne un nouvel exemple avec son inclination en faveur de deux anciens présidents étrangers : l’Américain Trump et le Brésilien Bolsonaro. Spontanément, elle leur offre son appui, sans balancer. Il s’agit d’un réflexe suscité par le rejet du système mondialiste actuel, inspiré par une idéologie de type New Age, droits-de-l’hommiste, universaliste, uniformisateur, hostile aux identités culturelles nationales et régionales ainsi qu’au modèle familial traditionnel, et imposant le totalitarisme soft de la pensée unique et du politiquement correct d’un brave new world en gestation. Des hommes comme Trump et Bolsonaro se présentant comme les ennemis déclarés de ce système, la droite nationale les soutient par réflexe, et voit en eux des alliés aussi providentiels qu’indispensables. Ce faisant, elle ne se donne pas la peine de la réflexion, laquelle lui révélerait les différences essentielles, voire les oppositions qui la séparent d’eux.
Il n’existe pas d’équivalent américain de notre droite nationale
Pour commencer, il n’existe pas, en Amérique, d’équivalent, même approximatif, de notre droite nationale. L’histoire des pays du Nouveau Monde ne ressemble en rien à celle des nations européennes, pas plus celle des États-Unis ou du Canada que celle du Brésil et autres états latino-américains. Créés à la fin du XVIIIe siècle, les États-Unis se réclament des valeurs libérales de la civilisation industrielle et marchande qu’ils avaient commencé à édifier avant leur indépendance et qu’ils n’ont cessé de développer ensuite, l’exportant dans le monde entier. Leurs valeurs spirituelles et éthiques, d’essence protestante (et, plus exactement, calviniste), sont indissociables d’un idéal de liberté, que leur morale religieuse, puritaine, borne par un très strict code social et comportemental, mais qui s’accorde on ne peut mieux avec le capitalisme le plus effréné, le plus matérialiste et le plus brutal, sans égard aux détresses individuelles et collectives qu’il engendre fréquemment. Et, de ce fait, le nationalisme américain, tel qu’un Reagan ou un Trump l’incarnent, se manifeste par la loi de la jungle, la loi du plus fort, du plus malin, du plus violent, du plus cynique, et aussi du plus grossier et du plus inculte (mais profondément croyant et assidu au temple), tant au sein de la société américaine que dans l’attitude des États-Unis sur la scène mondiale. Les Américains ne distinguent jamais les valeurs spirituelles et morales des manifestations de la puissance individuelle et collective ; et, calvinistes dans l’âme et dans les tripes, ils voient dans le succès de ces dernières une justification morale. Le vainqueur a raison, est moralement justifié, et le vaincu a tort. Et le droit sanctionne la situation ainsi créée. Le faible n’a d’autre recours que de tout faire pour devenir fort à son tour. À l’esprit des Américains, est juste ce qui réussit, et il ne leur vient pas à l’idée qu’une juste cause soit écrasée ou éclipsée par le triomphe d’une cause immorale. Enfants des « Lumières » du XVIIIe siècle et des loges maçonniques, constitués d’une plèbe à la fois ignorante et confite dans le protestantisme le plus étriqué et le plus obscurantiste, et d’une bourgeoisie issue de cette plèbe pionnière, moralement guidés par des pasteurs rigoristes et bornés, dépourvus d’aristocratie nobiliaire, n’ayant jamais vécu sous une monarchie, démocrates de nature, les Américains ne font jamais de distinction claire entre la force et la morale, entre la force et le droit, entre la force et l’honneur, entre la puissance et la grandeur, entre le fait accompli et le droit. Chez eux, l’esprit n’est jamais tout à fait distinct de la matière, et la grandeur, la noblesse et l’honneur des États-Unis s’exprime par leur puissance économique et militaire, qui leur permet d’imposer leurs vues morales et politiques au monde, par la fortune d’hommes comme George Soros, Donald Trump, Bill Gates ou Elon Musk, Jeff Bezos ou Andy Jassy. Le plus naturellement du monde, ils considèrent la pauvreté, voire la misère de soixante millions des leurs (et la gêne matérielle de beaucoup d’autres encore), comme la juste rançon de la puissance et de la gloire de leur pays ; et leurs hommes de droite n’ont pas la moindre sensibilité à l’égard du plus grand nombre et des plus modestes des citoyens. Aux Etats-Unis, il ne saurait exister une droite nationale et sociale distincte de la droite libérale pure et dure. Il n’a existé et ne pouvait exister aucun équivalent américain de Villeneuve-Bargemont, Le Play, La Tour du Pin ou Georges Valois.
Et il n’en existe pas davantage au Brésil
Il en va de même au Brésil. La droite brésilienne a toujours été inconditionnellement libérale et, comme telle, résolument hostile à toute politique sociale, même timide. Incarnée, jusqu’au milieu des années 1960, par l’Union démocratique nationale (UDN), elle a durement combattu la politique sociale de Getulio Vargas de 1934 à 1945, puis de 1950 à 1954 (poussant même ce président au suicide), qui ne faisait pourtant que créer une indispensable et élémentaire législation visant à alléger la pauvreté des masses, et qui se combinait avec une politique économique volontariste de développement de l’industrie et du commerce visant à assurer la prospérité du pays et donc à le hisser au niveau des puissances émergeantes et à accroître son importance et son prestige dans le monde. Le nationalisme brésilien se trouvait alors chez Vargas, d’ailleurs anticommuniste et peu ou prou inspiré par le fascisme, et non chez ses adversaires de droite qui l’accusaient de communisme. Et cette situation perdura. En 1961, l’UDN combattit le président Quadros, pourtant conservateur, populiste et nationaliste, dont elle avait permis le succès lors de la présidentielle de 1960, dès que celui-ci, par patriotisme, manifesta une velléité d’indépendance vis-à-vis des États-Unis. Puis les dictateurs militaires de la longue période 1964-1984 optèrent résolument pour le capitalisme pur et dur, ainsi que l’Alliance pour la Rénovation nationale (ARENA), le parti à leur dévotion, qui avait succédé à l’UDN en 1965. Avant comme pendant et depuis la dictature militaire, la droite brésilienne s’est réclamée, jusqu’à nos jours, d’un nationalisme indéfectiblement étayé sur le libéralisme mondialiste inconditionnel, le refus de toute réforme sociale, considérée comme d’essence communiste et nuisible à l’essor du pays, et l’identification de la grandeur du Brésil à sa seule puissance économique, à l’exclusion de toutes valeurs spirituelles, morales et autres. En cela, elle ressemble à s’y tromper à la droite américaine du parti républicain, et ne propose pas d’autre projet politique que le maintien d’une société régie par la loi de la jungle et justifiant la misère du plus grand nombre de citoyens au bénéfice d’une minorité de riches, de puissants et d’habiles qui se jugent indispensables à la gloire de la nation et à la lutte contre la subversion et la décadence.
Une incompatibilité tenant à des raisons historiques et culturelles
Des hommes comme Ronald Reagan, Donald Trump, le second Bush, les anciens dictateurs militaires brésiliens ou Jaïr Bolsonaro, qui se veut leur disciple, ne sont que des dirigeants matérialistes et brutaux incapables de concevoir un régime politique et une société étayés sur autre chose que l’armée, la police, la loi du marché et, au dehors, une politique agressive. Le Nouveau Monde ayant ignoré les périodes historiques riches de spiritualité et d’une haute moralité, fondées sur la dignité et l’honneur, et caractérisées par des sociétés d’ordre certes imparfaites et dures mais habitées par un très profond esprit communautaire, ils sont, eux, incapables de les concevoir et de s’en inspirer, puisqu’elles ne font pas partie de l’histoire, et donc de la mémoire et de l’habitus de leurs pays respectifs.
De dangereux faux alliés
En vérité, ces hommes, les Trump, Bolsonaro et autres, n’ont rien de commun avec la droite nationale française, et leur projet politique lui est totalement étranger tant dans ses assises philosophiques et morales que dans son héritage historique. En bien des points, leur projet politique est même opposé au sien. En conséquence, il paraît aberrant de voir des gens qui se réclament d’elle et y militent (toutes tendances confondues) prendre parti en leur faveur au motif de la nécessité de la lutte contre ces courants mortifères que sont le terrorisme intellectuel et éthique de gauche, le wokisme, la pensée unique, le politiquement correct, l’universalisme, l’idéologie des droits de l’homme, la subversion morale et sociale de type LGBTQIA+, le fanatisme ultra-féministe et autres calamités. Il ne s’agit pas de nier la gravité de ces dernières et de leur préférer certains de leurs adversaires. Mais, dans la lutte de la droite nationale contre elles, des Trump et des Bolsonaro sont de pernicieux alliés. Légitimant crûment une société violente, au sein de laquelle le fort écrase le faible, justifié en cela, de surcroît par une morale libérale et calviniste sommaire imprégnant les comportements et le droit, ils jouent inévitablement le rôle de repoussoir en un pays attaché aux principes élémentaires de la charité chrétienne et de la justice sociale. Par ailleurs, point n’est besoin d’être aliéné par l’idéologie écologiste et climatiste pour considérer comme dangereuse pour la planète la politique industrielle et énergétique de Trump, roi du charbon et du gaz de schiste, et le massacre par Bolsonaro et les gouverneurs « bolsonaristes » du nord du Brésil, de la forêt amazonienne, destruction qui bouleverserait tout l’équilibre climatique de la Terre. Enfin, la lutte contre le mondialisme, rouleau compresseur écrasant les nations et les civilisations en vue de leur substituer un meilleur des mondes aseptisé et woke ou New Age ne justifie pas la méconnaissance délibérée de la dangerosité de la politique étrangère provocatrice et belligène de Trump.
La droite nationale doit rester fidèle à son identité
On ne choisit pas entre la peste et le choléra, entre le cancer et le sida, et la droite nationale n’a pas à le faire. De par sa nature, sa sensibilité, ses idées, ses idéaux spirituels et moraux, son projet politique et social, elle n’est pas plus proche des droites américaines (celles des États-Unis et du Brésil, mais aussi celles du Mexique, du Chili et d’autre états latino-américains) que des dirigeants universalistes et woke qui gouvernent les pays occidentaux.
Malheureusement, elle et ses homologues ouest-européennes ne semblent pas le comprendre. Pire, sous prétexte d’adaptation au monde actuel, elle se laisse gagner par ses orientations matérialistes, comme le montrent les exemples, en France, du Reconquête ! d’Éric Zemmour ou, en Italie, de la Ligue de Matteo Salvini et des Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni, tous économiquement ultralibéraux et antisociaux, ou encore, du Rassemblement national, qui donne dans l’excès inverse du populisme de gauche. Un ressaisissement est donc souhaitable. Il commence par la fidélité à notre identité. ■
Face à un ennemi, on s’allie avec qui on peut ; mais il faut savoir ne pas être naïfs sur certains alliés qui peuvent vous « protéger » comme les maffieux font du racket…
Ce que je crains dans le « conservatisme », c’est qu’elle nous donne des réflexes de loyauté envers nos « alliés » de la « droite calviniste ».
Pour changer de Régime, il faut bien, parfois, parier sur ce qui apparaît comme « subversif » vis-à-vis du désordre établi. Sinon, nous ne serions que les « gendarmes supplétifs » de la dictature libérale…
Je ne sais pas qui est ce M. Bedel qui aurait démontré « le côté artificiel, grossièrement synthétique et spécieux de la vision gaullienne de notre pays » ; il n’y a aucun rapport entre la vision profondément française – et malheureusement inaboutie – du Général et les pantins Trump et Bolsonaro.
Article bien long et confus pour énoncer des évidences…
Effectivement, je vois mal en quoi De Gaulle pourrait être comparé à Trump ou Bolsonaro, qui sont tout au plus de moindres maux.
Ceci dit, je trouve l’article peu confus et salutaire pour énoncer quelques vérités qui pour évidentes qu’elles soient pour certains, ne le sont pas pour tous, les nationalistes français ayant tendance à se laisser tromper par des gens qui, différant de leurs ennemis, sont pris pour des alliés (Boulanger, Mussolini, Hitler…).
« ne justifie pas la méconnaissance délibérée de la dangerosité de la politique étrangère provocatrice et belligène de Trump. » dit Yves Morel. On peut reprocher bien des choses à Trump mais certainement pas une politique étrangère provocatrice et belliciste . Si ma mémoire st bonne Trump a mis en difficulté les partisans d’ l’intervention folle en Irak, dont Bush. Par ailleurs il n’aurait pas provoqué ce bras de fer dément des démocrates qui conduit le monde au bord du précipice avec la Russie; Ensuite Trump a protégé la culture de vie, un moment. . Maintenant l’essence du calvinsime, celui de « la lettre écarlate » est bien au coeur du wokisme qui ravage la planète. Sans illusions on peut s’allier avec d’autres protestants sincères , ayant encore la foi en Dieu, et le souci de la protection de la vie. Certes le souci d’une vraie écologie est important, mais quand on voit ce que les mouvements écologiques en ont fait, une idéolgie de la détestation de l’homme, on peut bien sinon s’allier , du moins reconnaître ce qu’il ya de moins fou. ( ce n’est pas être antisocial que dénoncer le poids des syndicats en France dans les transports qui prennent le pays en otage ni donner caution à au président que nous subissons .) . Il ne s’agit pas de préferer la droite américaine ou brésilienne, il s’agit de reconnaitre nos ennemis prioritaires qui veulent notre peau, aussi bien physique que morale, au sens précis du terme, de gagner du temps, le conservatisme dans ce cas – je connais la phrase sublime de Boutang sur notre société qui n’a plus rien à transmettre -pouvant être la reconnaissance de ce qui nous a été transmis, notre part incessible de l’être par la tradition.sans idolâtrie de qui que ce soit. Voie étroite sans concessions toujours à renouveler. .
Je serai aussi sévère que Pierre Builly. Propos absurdes au sujet du Gaullisme, comme les imprécations contre « les Américains [qui] ne font jamais la distinction claire entre la force et la morale…. ». Au fond, un problème imaginaire (Trump et Bolsonaro érigés en modèles) décortiqué à la feuille de boucher par un auteur aveugle aux nuances, spécificités et contraintes de notre vie publique. Au premier rang desquels, je mettrais l’étouffoir médiatique, politique/électoral, mais aussi idéologique et éducatif pesant sur les Français, jusqu’à en faire, sauf rares exceptions, des quasi morts-vivants, confus, apeurés et abouliques, ou des démissionnaires, ou, encore, d’inconséquents et ignorants bavards.
À mon point de vue, Yves Morel n’a pas tort… Ce qu’il dit du général de Gaulle, argumentairement parlant, vaut tout autant que que ce que dirait quelqu’un en tâchant de justifier le gaullisme. Or et pour commencer, la personne du général de Gaulle m’est odieuse (et pas seulement à moi) parce que cet homme s’est laissé aller à épouser l’Épuration avec une quasi délectation politicanaille et des yeux «chiméniques» (si j’ose l’épithète) pour les communistes et, surtout, à mon avis strictement personnel, il m’est odieux pour avoir bel et bien été le responsable de l’exécution de Robert Brasillach – pour cela, intellectuellement, culturellement, poétiquement, il devrait en rendre raison «par la gorge» : qu’il brûle en Enfer !
Pour les analyses d’Yves Morel sur les USA, je pense qu’il est dans le vrai, un point c’est tout. Quant à l’œil de la droite française jeté sur les personnages représentatifs évoqués, il faut considérer DEUX yeux et, peut-être, Yves Morel oublie-t-il d’envisager le second de ceux-ci, qui pourrait être le mien, quelquefois, ou, du moins, celui d’aucuns dont je me sens très proche.
Si j’abonde dans son sens quant aux yeux «chiméniques» de certains droitiers français en face de ces gens-là, lesquels droitiers me semblent en effet tout à fait gauchis par la Modernité à laquelle il y aurait lieu de s’adapter, néanmoins, il en est qui, face aux vomissures libérales nous polluant, voient d’un œil mutin les Trumpo-bolsonariques, dans la mesure où ceux-ci donnent de l’urticaire au fatras ambiant.
Michel Michel, fidèle à ses vues «stratégiques» envisagent les accommodements permettant, peut-être, de mettre dehors les uns, en attendant de se débarrasser des autres utilitaires. Si je partage totalement la perspective, je reste très dubitatif sur l’opérativité réelle de la chose…
Pour terminer, de son côté, disons qu’Yves Morel n’est pas loin de partager le point de vue «stratégique» en question, puisqu’il se passionne pour Georges Valois, dont, pour ma part, je pense qu’il s’est bel et bien révélé un «dangereux allié» (pour reprendre sa locution) et que l’Action française aurait certainement eut meilleur temps de s’en défier sensiblement autant qu’Yves Morel entend que l’on se défiât d’Éric Zemmour, lequel, tout comme le proudhonien d’hier, vient de la gauche – on n’en sort pas !
Seulement, «l’action militante» est contrainte de devoir emprunter diverses voies de traverse ; Yves Morel et moi devons admettre que si l’une d’entre elles pouvaient conjoindre celle de l’Efficace, nous aurions à l’emprunter en suivant.
Oui Yves Morel a raison sur bien des points mais suffit-il d’avoir raison en histoire ? A-t-il lu Pirandello « Chacun sa vérité » , pièce qui nous montre que nous ne pouvons pas connaitre la vérité intime des personnages, et cela reste valable aujourd’hui pour Trump et Bolsonaro et la pauvre et admirable Georgina Meloni si diffamée. A-t-il lu le grand historien Emmanuel de Waresquiel, qui par ses recherches éclaire la part intime de liberté de ses personnages. Ce n’est pas Chateaubriand ave son génie ni Joseph de Maistre avec son talent ni Bonald mais bien un évêque défroqué, (Talleyrand), un régicide ( Fouché) qui par leur travail patient, leur réflexion , leur esprit de décision , leur courage, leur liberté et leur idée de la vocation ultime de leur pays ont jugé que France avait assez donné de gage à l’hubris et ont rétabli la légitimité. Grâce à eux la France peut enfin respirer en 1814 et par ailleurs la paix put être rétablie pour près de cent ans en Europe avant que la légende napoléonienne nous humilie en 1870 et nourrisse un patriotisme catastrophique nous menant « à la monté aux extrêmes ».
Il n’ a pas été répondu à ma question : que vaut-il mieux Trump avec ses énormes défauts, mais qui lui n’aurait pas appuyé cette folle escalade des démocrates avec Biden , le camp de ma guerre qui nous conduit aux portes d’un conflit mondial ? En politique il y a des urgences et une la recherche de la paix, en fait partie. .A part Hubert Védrine qui s’en soucie dans la classe politique ? Néant absolu laissant le champ libre à la folie américaine relayée .
Ensuite, autre erreur- me semble-t-il- est-ce vraiment le moment de continuer à nous déchirer sur de Gaulle ? Il a incarné l’esprit de Résistance et aussi celui de guerre civile. Certes il a gravé dans le marbre une constitution républicaine qui nous étouffe et n’ a pas su régler le problème de l’Algérie. Mais pouvons enfin faire la paix entre nous devant les périls et laissons le à la complexité de l’histoire, sans esprit de revanche.
Il est vrai que dans son essence le capitalisme basé sur le calvinisme conduit à une impasse parce qu’il désincarne les rapports humains, mais faut- il tout essentialiser ? Il y a eu des entrepreneurs qui ne voulaient pas tous détruire les « couches protectrice » de leur pays, (la Common Decency ) il a y a eu un capitalisme rhénan . La césure n’est elle pas entre le consumérisme fou, devenant un pur nihilisme et la préservation des traditions, chère à Michel Michel ? .
Tout est mêlé et l’admirable Georgina Melloni ne mérite pas cette condamnation, tout au plus on pourrait nuancer sa pensée .
Yves Morel a bien sûr raison de saluer en le Play un admirable chantre de la famille, qui pérennise la société , mais pour le moment nous avons à faire des échéances concrètes vitales justement pour défendre la famille et en France, c’est mal parti, on verra.
Qui va restaurer la légitimité ? Celui qui fera preuve d’esprit de décision, aidons le à mûrir, d’ici là on a le droit se de s’allier sans illusion avec des protestants soucieux de famille et sa continuité. On reproche beaucoup à Bolsonaro d’être soutenu par les évangélistes, mais balayons devant notre porte, qui a rendu le catholicisme otage de la théologie de la libération et l’a idéologisé ?
Non, nous ne cherchons pas des modèles extérieurs à notre tradition, simplement nous prenons acte de ceux de nos ennemis les plus irréductibles, qui veulent nous anéantir, et nous avons le droit de leur opposer ceux avec qui nous partageons quelques valeurs qui nous été transmises. En politique le jeu reste ouvert. .
Pour la question des déchirements autour du Général, cher Henri, il faut bien admettre que c’est de Gaulle qui a lui-même déchiré (en 1945 et 1962) et, peut-être, continue-t-il de déchirer encore notre tissu français. Il ne faut pas incriminer nos positions quelquefois tranchées entre nous, mais le sujet de celles-ci… Néanmoins, je me rappelle un constat des années quatre-vingts sur lequel, avec un très cher ami, nous nous étions entendus : du moins, avec de Gaulle, nous nous opposions à un adversaire doué de stature et d’intelligence, si bien que, par nostalgie de cela, nous en arrivions à le regretter bel et bien. Cependant, invoquer la Résistance ne saurait autoriser l’oubli des horreurs de l’Épuration ; je me rappelle ce que m’a rapporté plusieurs fois ma défunte mère, qui avait un père très tôt engagé dans la Résistance, dont l’appartement servait de refuge ou repli à des aviateurs anglais en mission, etc., eh bien, lorsque, à la “Libération”, toute heureuse, elle s’est précipité auprès des jeeps et des chars, en s’en revenant, elle a été horrifiée par le spectacle des «résistants» châtiant autour d’eux dans les rues de Lyon. Rentrée chez elle en sanglots, elle dit à son père : «Ils sont pires que les Allemands, ils tondent des femmes dans la rue.» Toute «de gauche» qu’elle eût été, mon excellente mère ne s’est jamais remise de ces spectacles et, de temps en temps, cela lui revenait. Il ne s’agit pas de «déchirements» idéologiques seulement ; «les mots sont des marteaux», disait Maïakowsky, et il avait parfaite conscience de ce dont il parlait, au point que, tout bolchevisant qu’il fût et partie prenante dans la révolution, il convint de se mettre une balle dans le cœur…
Pour Melloni, je partage ton point de vue, Henri, et, sans doute, au fond, partagé-je l’intégralité de ton point de vue…
Tout bien considéré, le mieux ne consisterait-il pas à se passer tout simplement du souvenir de ce de Gaulle ?…
Merci cher David. sur de Gaulle, je persiste à dire : pouce!
Nous affrontons un terrible esprit de destruction, son dernier forfait : interdire la procession pour notre patronne Sainte Geneviève, son sbire avouant sa complicité de facto avec les extremistes d’ultra gauche. Les Carmélites de Compiègne avaient encore le droit de chanter dans un silence religieux le » Veni Creator » avant leur martyr.
Regroupons nos forces.
Je vous laisse, les amis, faire mine de ne pas comprendre que le Général a donné à sa présidence une dimension monarchique, qu’il a rappelé aux Français ce qu’était un Roi et que, comme Louis XI, comme Henri IV il a su louvoyer au milieu des marigots de la politique…
Ah oui, l’épuration, horrible, démoniaque… Pensez-vous, dites-vous, les yeux dans les yeux qu’il aurait pu l’empêcher, avec un Parti communiste triomphant, auréolé de la victoire de l’Union soviétique, armé et prêt à faire usage de ses armes ?
Et l’Algérie ? En 1958, toutes les erreurs qui y avaient été commises (en premier lieu celle d’y prendre pied !) auraient pu être gommées ? Le décret Crémieux, le mépris affectueux pour les indigènes, les divers massacres ? Je l’ai écrit cent fois mais je le redis : dans tous les Camps Maxime (j’ai commencé en 65) on nous répétait jusqu’à plus soif que « la République était incapable de garder l’Algérie ». En vrai Capétien, De Gaulle a tiré les leçons de ce constat. Au lieu de se retirer dignement, il a fallu de plus en plus vite, s’enfuir.
Quand Louis XI, qui en avait suscité la révolte contre le Téméraire, abandonnait à leur sort sanglant les Liégeois, n’agissait-il pas en politique profond ?
Tout ce que vous voulez, les amis ; mais le reproche éternel que je me ferai est de n’avoir pas été gaulliste après 1962. C’était fini, l’Algérie. Mais l’AF soutenait Tixier-Vignancour. Quelle manque de clairvoyance…
Il est vrai que Maurras a soutenu Pétain… Il aurait dû mourir en 36, plutôt que Bainville qui, lui, ne se serait pas trompé.
Il est trop facile de positionner de Gaulle dans des situations où il n’y aurait rien eu à faire d’autre que ce qu’il a sournoisement fait, et cela ne le positionne certainement pas en monarque, tout au plus en une espèce de Richelieu (auquel cas, d’ailleurs, qui pouvait bien être son «père Joseph» ? La question mériterait d’être traitée quelque jour)… Pour l’Algérie, c’est en anticolonialiste forcené que je me pose ; cependant, une fois que la socialisterie a «pris pied» chez autrui pour y répandre l’ivraie républicano-révolutionnaire, certes, il convient de savoir se retirer, mais, tant qu’à faire, avec honneur ! Pour un homme cultivé (comme l’était assurément de Gaulle), il est possible d’expliquer intelligemment, de se montrer intelligent avec tout le monde, jusques et y compris avec le FLN… Ne pas m’opposer que le FLN eût été par trop subversif, car, en ce cas, ce serait reconnaître avoir stratégiquement abandonné des peuples à la subversion, ce qui est bien piteuse stratégie.
Cher Pierre Builly, que vous regrettiez de ne pas avoir été gaulliste en 62, je le conçois et le comprend très bien ; ce que je comprends moins c’est que, à la suite de ce que cette politique a conduit, ne serait-ce qu’en termes d’immigration, ici, et en termes de corruption, là-bas, je comprends moins que vous puissiez vous improviser gaulliste aujourd’hui en la matière… En 45, l’idée d’un Parti communiste «triomphant» ne peut bien n’avoir été qu’une idée introduite sournoisement par qui pouvait avoir intérêt à l’entretenir ensuite ; il suffit pour cela de se reporter à l’attitude de Staline vis à vis de la Grèce, dans laquelle le Parti communiste avait été bien plus «triomphant» que par ici et, cependant, du fait des accords de Yalta, Staline se désolidarisa des velléités de ses affidés, si bien qu’il se constitua un second Parti, «en exil», celui-là, tandis que, en Grèce, le PC ne fut jamais soutenu que du bout des lèvres soviétiques ; les communistes grecs sincères eux-mêmes en firent les plus odieux frais sur place (voir les souvenirs de Mikis Theodorakis) ; d’ailleurs, il y aurait de bien significatifs parallèles à établir entre les deux «guerres civiles», la française et la grecque, dans lesquelles on rencontre exactement les mêmes ambiguïtés de position, liées aux difficultés de concilier certains inconciliables… Assurément, séquestrer et/ou passer par les armes les opposants est une efficace à laquelle les «politiques» modernes ont rarement manqué de recourir, pour cette raison qu’ils ont été formés à l’esprit de 1793, producteur des petits caporaux bombardés «hommes d’État».
Maurras a soutenu Pétain, en effet ; Daudet et Bainville sont morts avant d’avoir eu à se prononcer, total, ils n’ont rien pu en dire… On ne saurait spéculer sur laquelle des erreurs possibles ils auraient su ne pas commettre… Pour ma part, ayant eu à jeter des yeux plus attentifs sur Pétain, voilà quelques années, à l’occasion de la fabrication d’un petit livre du regretté Gérard Bedel (justement) sur le Maréchal, j’ai éprouvé la surprise de découvrir un personnage dont la nature intellectuelle m’a transporté – je n’ai évidemment pas la place ici de donner ne serait-ce qu’un aperçu de ce qui a été livré à ma réflexion, des aperçus d’ordre spirituel, dans lesquels je me suis rendu compte que Pétain s’inscrivait parfaitement, dès avant 14-18 et jusqu’à la fin. Or, les données que cela représente ont justement été battues, du fait des Américains (lire «La Cabane dans la vigne» d’Ernst Jünger, dont la première partie chronique très calmement l’Occupation de l’Allemagne), battues du fait de de Gaulle, les uns et les autres, effectifs signataires de compromissions avec Staline ; tout comme aujourd’hui, de semblables pactes sataniques conduisent, entre autres, à cette interdiction de la procession pour sainte Geneviève : «la complicité avec l’ultra gauche», cher Henri, remonte plus haut que de Gaulle, certainement, mais elle trouve à se consommer pleinement avec lui. Cela dit, nous voilà bel et bien réduits à devoir partager le très amer constat: «Les vainqueurs ont toujours raison.» Qu’ils se présentent avec l’étiquette de Gaulle ou Maqueron… Une seule question, celle d’Ésaïe : «Jusques à quand, Seigneur?» À quoi le Seigneur répond : «Jusqu’à ce que les villes soient dévastées et privées d’habitants. Jusqu’à ce qu’il n’y ait personne dans les maisons et que le pays soit ravagé par la solitude.»…………
Pourquoi cette rage de batailler si fort à propos de lointaines erreurs – ou supposées telles – quand l’état présent de la France et de l’ensemble européen nous donne à craindre un futur des plus sombres ?
Le véritable esprit capétien, ne consisterait-il pas, au contraire, à pratiquer l’oubli de ce qui n’est plus utile, et à « jeter le voile » sur les inévitables erreurs humaines du passé dont, au demeurant, on pourrait discuter à l’infini ?
Celles du présent ne manqueront pas. Ne faut-il pas leur réserver le plus gros de notre attention ? C’est ce que je crois pas pour ma part.
Va-t-on reprocher à Louis XIV la révocation de l’Édit de Nantes, à Louis XV l’abandon des « quelques arpents de neige » ? Et plus tôt à François Ier les billevesées italiennes ? à Charles IX la Saint Barthélémy ?
Outre ce qu’écrit à juste titre G.P., pensons bie n que la politique c’est « ici et maintenant ». Qu’aurions-nous fait, qu’aurions dû nous faire ce soir là où la question s’est posée qui demandait une réponse immédiate ? J’ai passé quelques années de ma vie à proximité du coeur battant de l’État ; croyez-vous que c’est si facile de gouverner ?
D’un autre côté , comparée aux E.U , la France pourrait être vue comme un pays socialiste ; sans même parler de la Liberté dont les EU portent le flambeau et non la France .
Pour ce qui est de Charles de Gaulle, mort, on imagine de façon excessive et depuis
plus d’un demi-siècle qu’en telle circonstance, il aurait fait ceci ou cela .
(Il n’empêche qu’ il puisse y avoir des « politiques » néo-gaullistes)
Un souvenir d’une interviouve TV de Maurice Clavel, à la TV (début décennie 70) , affirmant à propos de la question algérienne que dés le début, CDG lui aurait confié sa volonté de s’en séparer ; le clou, si l’on peut dire, c’est qu’il (M.Clavel) lui aurait alors demandé [mais que feront les militaires ?] ayant entraîné la réponse : [je les connais].
Cette révélation donnait toutefois une impression d’interprétation plus qu’autre chose et c’est pour dire que très tôt, certains ont pu se figurer pouvoir lire dans les pensées du général de Gaulle si ce n’est parler pour lui . De là les équivoques, les illusions .
Pour GP et Pierre Builly : Dès lors que l’on s’intéresse à l’Histoire, on ne «jette pas le voile», mais on tire enseignement du passé pour saisir le présent, voire, quelquefois, pour envisager le futur.
Pour ce qui est de de Gaulle, en ce moment et dans tous les recoins, la grande mode entend s’y référer… Si je ne l’entendais pas nommer, ma foi, je n’en dirais rien… D’une certaine manière, Pierre Builly se reproche à lui-même de n’avoir pas été gaulliste en 1962, par là même, on peut comprendre que d’aucuns puissent revoir un peu les conséquences politiques de tels ou tels autres événements et en faire analytiquement le reproche (d’ailleurs, inutile) à quelques hommes d’État des temps antérieurs.
Je renvoie à l’empirisme organisateur pour savoir ce que signifie le «ici et maintenant» politique et à l’Évangile pour la manière de l’entendre au-delà des conditionnements spécifiquement humains (espace et temps) : «Il n’y aura plus de temps», trouve-t-on en Apocalypse (je ne sais plus où exactement) et, toujours en Apocalypse : il n’y aura plus besoin de soleil, car il sera éclairé de l’intérieur (je n’ai pas la formule textuelle présente à la mémoire, d’où l’absence des guillemets)…
Pour paraphraser une formule célèbre et, en fait, complètement méconnue : «Quand j’entends le mot politique, je sors mon revolver.» Comme chacun sait, la sentence de référence intéressait le mot «culture» ; tirée d’un drame expressionniste allemand, elle voulait illustrer l’idée que tout instruit que l’on soit, il convient initialement d’être libre… J’ajouterai que, pour pouvoir se «cultiver» (en l’occurrence et plus étroitement, ici, se politiser), il y a lieu d’être affranchi préalablement, ce qui implique une «liberté» culturelle, une «liberté» politique, liberté INTÉRIEURE, cela s’entend… Ce qui amène à observer, à juger, sans préjugé, et à savoir, comme Boileau, appeler «chat un chat, et [de Gaulle] un fripon»…
Du point de vue de l’Histoire, on ne jette pas le voile. Cela relève de l’ordre scientifique. Du point de vue du service du pays, on le jette dès que possible. On garde la mémoire. On évacue les rancunes. Point n’est besoin de l’Apocalypse pour savoir ça !
Cher G.P., pour ma part, à tous les points de vue j’ai – d’abord !! – besoin de l’Apocalypse, le reste vient «par surcroît»… Quand à «l’ordre scientifique», je m’en bats l’œil ; c’est une satanée foutaise.
Du coup, il n’y a pas de «rancune» à évacuer mais, quelquefois, nécessité de savoir pardonne. Or, en la matière qui nous occupe ici, cette nécessité-là fait bel et bien loi. Cependant, «pardonner» n’est évidemment pas «évacuer», c’en est peut-être même le rigoureux contraire – dernière éventualité à laquelle je vais me prendre à réfléchir, grâce à vous ; merci, donc.