Il faut être reconnaissants à Jean-François MATTEI, avons-nous dit, d’avoir écrit « Le regard vide – Essai sur l’épuisement de la culture européenne ». Et, en effet, il faut lire et relire ce livre, le méditer, en faire un objet de réflexion et de discussions entre nous. Il dit, un grand nombre de choses tout à fait essentielles sur la crise qui affecte notre civilisation – et, bien-sûr, pas seulement la France – dans ce qu’elle a de plus profond.
Ce livre nous paraît tout à fait essentiel, car il serait illusoire et vain de tenter une quelconque restauration du Politique, en France, si la Civilisation qui est la nôtre était condamnée à s’éteindre et si ce que Jean-François MATTEI a justement nommé la barbarie du monde moderne devait l’emporter pour longtemps.
C’est pourquoi nous publierons, ici, régulièrement, à compter d’aujourd’hui, et pendant un certain temps, différents extraits significatifs de cet ouvrage, dont, on l’aura compris, fût-ce pour le discuter, nous recommandons vivement la lecture.
Le procès d’identification
Comme la question du droit à la différence est devenue aujourd’hui impérative dans le domaine de la vie politique et dans le champ des sciences humaines, elle tend à occulter celle du droit à l’identité. Nous le voyons dans l’appauvrissement actuel des valeurs européennes dont le faux universalisme se réduit, comme le dénonce Pierre Manent, à une « ouverture à l’autre » qui fait que « nous ne mentionnons alors l’Europe que pour l’annuler ». Dès lors, « nous n’avons pas d’existence propre, nous ne voulons pas, nous ne voulons d’aucune façon, qui serait nécessairement particulière, d’un être propre ». (Pierre Manent, La raison des nations, Réflexions sur la démocratie en Europe, Gallimard, page 93.)
Le regard vide – Essai sur l’épuisement de la culture européenne, de Jean-François Mattéi. Flammarion, 302 pages, 19 euros.
Selon Charles Taylor, « Ce que nous sommes ne peut jamais épuiser le problème de notre condition, parce que nous sommes toujours changeants et en devenir « .
« L’identité n’est pas ce qui ne change jamais, mais au contraire ce qui nous permet de toujours changer sans jamais cesser d’être nousmêmes ».
Dans une optique plus communautarienne, le rapport social est constitutf de soi : « Autrui est aussi un élément de mon identité intérieure . Le groupe, tout comme l’individu, a besoin de se confronter à des « autruis significatifs ».