Par Gabrielle Cluzel.
Cet article de Gabrielle Cluzel, vigoureux, intelligent, réaliste et, selon son style, sans détours, est paru le 15 mai sur Boulevard Voltaire. Ce site, d’ailleurs a fait fort sur ce sujet qui concerne tout le monde mais, tout de même, nous, à titre un peu particulier, en publiant un article de François Bousquet, perspicace, savoureux, plein de lucidité et d’esprit que nous reprenons aussi, ici, aujourd’hui.
Ce sont évidemment des circonstances et des perspectives qui nous touchent car elles concernent cette sorte de mission particulière et historique que s’est donnée l’Action Française dès sa fondation et qu’elle s’efforce ainsi de remplir, au fond, selon sa destination ou sa destinée. Ainsi, dans un éditorial que L’Action Française vient de publier, François Marcilhac écrit ceci : « Un vent mauvais, un vent malsain souffle actuellement sur la France : celui de l’arbitraire. Le pays légal, se sachant démonétisé auprès des Français, cherche par tous les moyens, même les plus illégaux, même les plus anticonstitutionnels, à museler les patriotes et, plus particulièrement, ces amoureux de la France et des libertés qu’ont de tout temps été les royalistes. L’Action française en a vu d’autres. Elle résistera, comme elle l’a fait victorieusement ce week-end, à toutes les tentatives de musellement. Car on n’a jamais muselé et on ne musellera jamais l’Action français. Non seulement parce que s’exprimer, c’est son droit, mais avant tout parce c’est son devoir envers les Français. »
Quelle différence entre la tarte Tatin et la mayonnaise Darmanin ? La première est une grande réussite née d’une recette ratée, la deuxième est un immense raté en dépit d’une recette ayant pourtant fait les preuves de sa réussite : pointer du doigt l’extrême droite en poussant des cris d’orfraie, avec l’idée de rameuter toute la classe politique et les médias. Sauf que, cette fois, c’est un bide.
Pourtant, le ministre de l’Intérieur n’a pas lésiné sur l’huile de coude pour battre les œufs, se fendant notamment, dimanche soir, à l’issue de l’hommage de l’Action française à Jeanne d’Arc, d’un tweet droit venu de la quatrième dimension : « Les attaques contre la République sont inacceptables : l’extrême droite a encore montré son visage nauséabond. Voilà pourquoi nous avons demandé l’interdiction de cette manifestation, avant la décision du tribunal administratif de Paris qui nous a enjoint de l’autoriser. »
Que s’est-il passé, au juste ? Rien. Combien de vitrines brisées, de commerçants vandalisés, de voitures incendiées, de cocktails Molotov balancés, de policiers caillassés ? Pas un seul. Même les médias les plus à gauche n’ont rien trouvé d’autre à leur reprocher que deux slogans : « À bas la république » ou encore « Tout le monde déteste la république ». La découverte du fil à couper le beurre et de l’eau chaude en même temps : les monarchistes n’aiment pas la république. Ce qui est encore permis en France, comme il est autorisé d’être républicain en Angleterre. Serait-on stupéfait, abasourdi, atterré d’entendre « À bas la chasse ! » dans une manif vegan ?
Sans doute le camouflet (un de plus) infligé par le tribunal administratif, les appels à cotisation moqueurs des jeunes militants – « Darmanin, reviens, l’AF en a besoin ! » faisant référence à une proximité, jadis, du ministre de l’Intérieur avec les mouvements royalistes – ont-ils fait naître une sourde rancœur. Mais, surtout, il s’agit d’éteindre un incendie, celui qu’a allumé l’extrême gauche, au sens propre comme au sens figuré, dont la « prestation » depuis des semaines sert de faire-valoir à l’extrême droite au sens large : celle-ci apparaît, par contraste, proprette et bien élevée. Élisabeth Borne elle-même, dans le JDD, vient de candidement déclarer que si elle restait « vigilante face à la menace du RN » et à « ses idées dangereuses, [elle notait] que Marine Le Pen et son groupe [respectaient] les formes. » Contrairement à La France insoumise.
Il fallait donc de toute urgence sortir de la cave et dépoussiérer le spectre de l’extrême droite, ce croque-mitaine vintage dont le capital effroi tend à s’éroder dangereusement. Le traditionnel hommage du « Comité du 9 mai », qui existe dans l’indifférence générale depuis trente ans – on notera que pas un seul média ne s’est intéressé à la personne de Sébastien Deyzieu, cet étudiant tragiquement disparu, comme si les journalistes de gauche déniaient aux militants du GUD jusqu’à leur humanité -, avec ses idiots utiles cagoulés – mythos, craignant d’être reconnus, ou séduits par les codes vestimentaires des Black Blocs ? – est pain bénit. Avec une myopie de circonstance, on a fait semblant de prendre la croix celtique pour une croix gammée. Puisqu’il est question de reductio ad hitlerum, l’axiome bien connu de Goebbels « un mensonge répété mille fois devient une vérité » prend tout son sens.
La démission du maire de Saint-Brevin, survenant deux mois après des incendies aux auteurs non identifiés, tombe aussi à pic : les incendiaire sont (suppose-t-on) des opposants au centre de migrants, l’opprobre est jeté sur la cause tout entière. Là, personne ne redoute l’amalgame ni n’appelle à la « prudence-en-attendant-les résultats-de-l’enquête. »
Puis vient la fameuse manif de l’Action française, un hommage vieux de 100 ans, celui-ci. Pour hisser sur le même plan cette manif et les violences d’extrême gauche, on ne recule devant aucune acrobatie sémantique, même les plus périlleuses. Ainsi, Shannon Seban, élue Renaissance, sur le plateau de CNews affirme sans complexe « que la violence idéologique est tout aussi dangereuse que la violence physique ». Mais bien sûr ! Le slogan « À bas la république » vaut un coup de poing ou une voiture brûlée. Il faudrait demander leur avis aux policiers et aux compagnies d’assurance.
Cet épouvantail est le seul outil qui reste à ce gouvernement. Tant que ne sera pas prise à bras-le-corps la question de l’immigration, Marine Le Pen montera inexorablement. Mayotte, l’imam Iquouissem, le Stade de France (pour ne citer que ceux-là) sont le triptyque de l’impuissance. On ne sait si Gérald Darmanin a vraiment appartenu, jadis, à l’Action française, mais une chose, aujourd’hui, est certaine : il est le symbole de l’inaction française. ■
merci de publier ce magnifique,savoureux et si intelligent article de gabrielle cluzel ou peut-on lui ecrire svp ?