Présentation de la chaîne.
Au nord des Etats-Unis, dans le Maine sur l’île des Monts déserts, se niche l’antre d’une des plus grandes et des plus secrètes femmes de lettres françaises : Marguerite Yourcenar. C’est dans une petite maison de bois, qu’elle appelle Petite Plaisance qu’elle va vivre pendant plus de quarante ans avec sa compagne Grace Frick, d’origine américaine. Derrière la grande écrivaine, intellectuelle et distante, première femme élue à l’Académie française, publiée de son vivant aux éditions de la Pléiade se cache une femme libre et passionnée qui a toujours vécu hors des conventions et en plein accord avec ses convictions. Marguerite Yourcenar laisse à la postérité une Œuvre majeure de la littérature du XXème siècle qu’elle aura écrite dans sa petite Plaisance. Elle dira « La partie de ma vie la plus profondément vécue est là » .■
Merci à Nicole pour sa transmission.
Voir aussi dans JSF
PÉRONCEL-HUGOZ : COUP DE CHAPEAU À YOURCENAR ACADÉMICIENNE ICONOCLASTE
Guère amateur de Marguerite Yourcenar, dont j’ai pourtant lu beaucoup pour essayer de me prouver que c’était un grand écrivain, je ne puis résister une belle critique rosse de son style marmoréen. C’est une appréciation de l’excellent Marc Lambron, lui aussi académicien (et de surcroît Conseiller d’État) : Marguerite Yourcenar est le plus grand écrivain scandinave de langue française « .
Pas mal vu, non ?
C’est sûrement rosse et peut-être vrai par quelque côté. On comprend ce qu’il veut dire. Mais c’est aussi marqué par le souci du bon mot et de la vacherie. C’est un peu comme lorsqu’un critique dont je ne me rappelle pas le nom s’était amusé à qualifier Mauriac de grand écrivain régionaliste. On peut d’ailleurs penser que c’est vrai et rien d’autre. Jeune, je lisais son bloc-notes avec avidité -quand l’AF le maudissait . L’AF ou ce qui en tenait lieu.
Il y a un problème Yourcenar considérable ; or, «L’Œuvre au noir» en pose les termes clairement… En effet, la lecture de ce roman apporte la démonstration que, pour servir l’espèce d’idéologie athéo-pseudo-intellectuelle qui est la sienne, Marguerite Yourcenar recourt au plagiat, mais, sans rendre cela transparent, bien loin de là !…
Il se trouve que, lorsque je me suis mis au roman (Gallimard, 1968), autour de mes 20-25 ans (voilà donc plus de quarante ans !), je venais de lire les «Carnets de Léonard de Vinci», dans les deux versions que j’en possédais (1. «Textes choisis» par Joséphin Péladan, Mercure de France et les Traités, 2 vol., Delagrave, 1939 & 1940 – 2. La traduction complète de la très excellente Louise Servicen, Gallimard 1942). Il a ainsi pu m’apparaître immédiatement que, dans Yourcenar, les «réflexions annexes» étaient tout droit tirées de Léonard, mais avec la précision suivante : elles en étaient DÉTOURNÉES !!! C’est intellectuellement significatif… Et l’on comprend au passage qu’elle eût tenu Evola pour un «érudit de génie», car, en fait d’«érudition», celle de Yourcenar n’était nullement mise au service de son esprit mais, seulement, de sa «formation». Elle employait ses études (latinisante et hellénisante relativement distinguée) exactement comme un actuel élève de l’ENA exploite son passage dans une «grande école» pour sa carrière.
Ainsi, précisément, Marguerite Yourcenar a-t-elle extrait des Carnets de Léonard les passages où la sublime intelligence de celui-ci s’exprime en termes d’une telle subtilité que, jusqu’aux divers traducteurs, il arrive que les plus belles intelligences hésitent à oser recevoir la lumière de ces profondeurs vertigineuses. Mais Marguerite Yourcenar a résolu ces hésitations, qui eussent dû lui donner maille à se contredire elle-même, en les «désorientant» tout à fait pour servir le scepticisme de son «stoïcisme» philosophique contrefait. Si bien que l’on trouve dans cet ouvrage étonnamment prétentieux tout ce que le XXe siècle parodique a pu coller d’«esprit des Lumières» dans les vanités des vanités de poursuite du vent cérébral et des arrêtés mentaux. Je ne parle pas du démarquage scolaire des textes alchimiques auxquels elle fait subir le même sort !
Or, à la même époque, je m’étais colleté «Le Roi des Aulnes», du vilain salace moralisateur Michel Tournier. Celui-ci (moins bien éduqué intérieurement que Yourcenar) opérait semblablement, mais en plagiant plus vulgairement, piquant un peu à l’Histoire, beaucoup au «roman d’éducation» à l’allemande (spécialement à l’«Ulrique» de Jacob Wasserman, mais pas seulement) et à la première Encyclopédie venue (encore les «Lumières» !) pour le reste. Total, en matière littéraire, analogue climat malsain chez la Belge très bien élevée et le lubrique professeur de français.
J’en suis venu à Michel Tournier, au passage, car il se trouve qu’André Delvaux a tiré un film de «L’Œuvre au noir», tandis que Volker Schlöndorff a fait de même pour «Le Roi des Aulnes»… Or, le film de Schlöndorff est plutôt réussi, en raison du fait qu’il n’y a plus de prétention «littéraire» ; il pourrait donc s’être produit que le film de Delvaux fût cinématographiquement plus intéressant que la vanité livresque dont il fut tiré… Mais je n’ai pas vu ledit film.
Quant au brocard selon lequel Marguerite Yourcenar eût été «le plus grand écrivain scandinave de langue française», c’est faire grande injure à l’admirable littérature nordique que de la réduire à si vile besogne. En outre, cela ressemble un peu trop au vilain mot de Maurras pour Claudel, qu’il raillait comme «traduit du moyen-haut allemand»… Mais il s’agissait tout de même de Maurras, auquel, comme on sait, il a été merveilleusement pardonné, par la belle intercession des Carmélites de Lisieux.