D’aucuns trouveront que cet article concède trop à ce que son auteur appelle pudiquement la morale contemporaine, les poncifs du temps présent, le langage des faiseurs d’opinion, mais qu’il soit paru dans La Provence du dimanche 12 juillet relève déjà de l’exception ou même de l’exploit. Et en définitive, Jérôme Garcin se pose en défenseur des livres, des temps révolus (ils le sont tous) et de nos bibliothèques menacées d’autodafé par quelques enragés. Cela nous paraît aller dans le bon sens.
A croire que la guerre de Sécession fait toujours rage.
Elle n’est pas seulement la toile de fond du roman-fresque de Margaret Mitchell, paru en 1936, elle vient de resurgir après le meurtre, aux Etats-Unis, de George Floyd – une tragédie qui a provoqué dans ce pays, et dans le monde entier, une flambée de manifestations antiracistes.
Et c’est à ce moment précis qu’on publie, en France, deux nouvelles éditions de Autant en emporte le vent. L’une, en Folio, reproduit la traduction originelle en français, celle de Pierre-François Caillé, qui date de 1939.
L’autre, chez Gallmeister, propose une traduction toute fraîche, signée Josette Chicheportiche.
Pour prendre la mesure du débat, il suffit de préciser que, dans la traduction d’autrefois, un « nègre » est appelé « nègre » et, dans celle d’aujourd’hui, il devient un « noir ». Ce glissement sémantique (parmi d’autres) me semble être une erreur.
Car, à trop vouloir gommer et amender, au 21e siècle, tout ce que charriait de pire la langue au milieu du 19e siècle, on finit par dénaturer le propos du roman, ancré dans une Amérique raciste, où les Blancs avaient le pouvoir, la fortune, les terres, et où les Noirs étaient leurs esclaves.
Or, pour tuer le mal, il faut le montrer.
D’aucuns voudraient retirer Autant en emporte le vent des bibliothèques et le film qu’en tira Victor Fleming en 1939, avec Vivien Leigh et Clark Gable, des sites de streaming. C’est idiot. Car ce serait se priver de la longue, tempétueuse histoire d’amour qui unit, pour toujours, au milieu des champs de coton de Géorgie et d’Atlanta en flammes, l’effrontée Scarlett O’Hara et l’indocile Rhett Butler, la jeune féministe avant l’heure et le vieux grigou machiste. Et puis, ce serait manquer l’occasion d’assister, comme en direct, à cette guerre fratricide qui opposa, entre 1861 et 1865, les Sudistes aux Yankee et l’Amérique révolue à l’Amérique de demain.
Dans sa préface à l’édition Folio, JMG Le Clézio écrit qu’Autant en emporte le vent est un livre unique, exceptionnel, le roman absolu. Il exagère. Car le livre aux 35 millions d’exemplaires vendus trimballe, outre des clichés racistes, des sentiments démodés, des idées creuses et beaucoup d’images chromo. Et, pour la prose, Margaret Mitchell n’arrive pas à la cheville de Faulkner. (Ici en 1938).
Mais il a raison de penser qu’il ne faut pas sacrifier cette œuvre d’autrefois, qui exprime la nostalgie de l’enfance, de la crinoline, de la terre de Tara et du temps perdu, sur l’autel de la morale contemporaine.
A ce compte, en effet, nos bibliothèques seraient vides. ■
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la sémantique trompe les caractères ethniques : tous les Noirs ne sont pas des Nègres lesquels ont des caractères physiques distincts des Noirs d’Asie, les vrais Indiens- par exemple : cheveux crépus, nez camus et lèvres différentes ce dont il ne résulte aucun racisme ni déclassement des Nègres et il se trouve qu’ayant vécu à la Guadeloupe où il y a une forte population de Noirs asiatiques (les coolies) ces derniers m’ont fait remarquer ces différences auxquelles ils tiennent en soulignant qu’eux plus les européens sont majoritaires en terre de Guadeloupe…Aimé Césaire revendiquait et chantait sa négritude au même titre que Sedar Senghor ou Houpouet Boigny…