CHAPITRE I – SALUT À LA DERNIÈRE COMTESSE DE PROVENCE
Le musée des Beaux-Arts de Draguignan, fondé sous la Révolution avec des dépouilles de l’aristocratie locale puis installé dans une ancienne résidence de l’évêque de Fréjus, n’est pas devenu à notre époque un de ces musées suivant toutes les modes idéologiques venues des Angloricains, comme le Mucem à Marseille ; il se veut plutôt la vitrine classique d’une ville provinciale un peu délaissée par Paris mais consciente de son passé profond et varié. Ledit musée vient de rouvrir après un lustre de rénovation des caves aux combles, une rénovation sans soumission aux modes muséales passagères qui ont déjà dénaturé plusieurs monuments de nos provinces …
Intervention du Tigre vendéen
La preuve en est donnée d’emblée par le portrait en gloire, par François Drouais (1771), accueillant les visiteurs, de Joséphine de Savoie (1753-1810), fille du roi de Piemont-Sardaigne (Illustration à droite) et épouse de Louis XVIII, alors dernier comte de Provence et frère de Louis XVI et de Charles X.
Détail insolite, ce joli tableau du Louvre fut déposé au musée dracénois à l’initiative de Georges Clémenceau, alors élu varois. Le « Tigre » alors féroce Républicard, ennemi juré des royautés, était aussi un Français attentif à l’Histoire de France, toute notre histoire y compris cette princesse savoyarde oubliée qui faillit être reine mais ne le fut pas … A voir donc aussi, en ce musée le buste de Clémenceau par Rodin, œuvre majeure offerte jadis à la France par l’Argentine. (Photo à gauche).
Gloires locales
À droite, un détail du papier peint du cabinet chinois.
Parmi les autres vertus de ce musée, son « cabinet provençal » et sa « galerie dracénoise », mettant en valeur les grandes heures régionales, par exemple l’époque de ce grand seigneur méridional éclairé du XVIIIe siècle, Omer de Valbelle, dont on peut encore aller admirer à Tourves, à environ 80 km de Draguignan, l’obélisque et la splendide colonnade qu’il fit élever sur une hauteur pour que sa favorite, la Clairon, y joue des pièces de théâtre dans un cadre au niveau de ses talents d’actrice. Quant à la galerie dracénoise, elle convoque administrateurs et artistes qui firent le renom de Draguignan aux deux derniers siècles. Tout cela vaut le déplacement. ■ PÉRONCEL-HUGOZ
À suivre la semaine prochaine : Dracénie II, une « Pierre-aux-Fées » bimillénaire.
Longtemps correspondant du Monde dans l’aire arabe, Péroncel-Hugoz a publié plusieurs essais sur l’Islam ; il a travaillé pour l’édition et la presse francophones au Royaume chérifien. Les lecteurs de JSF ont pu lire de nombreux extraits inédits de son Journal du Maroc et ailleurs. De nombreuses autres contributions, toujours passionnantes, dans JSF.
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