Nous ne sommes pas des charognards; et pour nous la Justice n’est pas la vengeance. Nous ne sommes donc pas choqués, à priori, par le régime de semi liberté qui vient d’être accordé à Nathalie Ménigon après vingt ans d’incarcération: la mesure -humanitaire- n’est ni scandaleuse ni révoltante en soi, et elle peut parfaitement se comprendre en théorie.
Notre première réserve vient du fait que Nathalie Ménigon (pas plus que ses quatre assassins de complices) n’a jamais exprimé le moindre remords ni le moindre regret; elle s’y est même catégoriquement refusé, et elle n’a donc jamais demandé pardon pour les deux assassinats de Georges Besse et de René Audran. On veut bien pardonner: encore faut-il que l’assassin demande le pardon, qu’il reconnaisse sa faute et la regrette. Comment pardonner à celui ou celle qui ne demande pas à l’être, et qui nie donc la faute, de ce fait même…?.
La deuxième réserve que nous pouvons émettre est qu’il s’agit de membres (1) d’un groupuscule révolutionnaire armé d’extrême gauche, « Action Directe ». Nous aimerions être tout à fait sûrs que les autorités auraient agi de même pour des personnes d’une sensibilité politique différente, voire opposée; et que celles et ceux qui ont oeuvré pour cette mesure humanitaire auraient agi de même pour deux hommes et une femme « d’en face »; malheureusement, nous n’en sommes pas sûrs.
Souvenons-nous du cas de Cesare Batisti, il n’y a pas si longtemps: les intellectuels de gauche et d’extrême gauche qui ont hurlé à la mort pour le défendre, et jusqu’à Mitterand lui même qui lui a assuré un asile en France, auraient-ils agi de même, par exemple, si au lieu d’un révolutionnaire italien d’extrême gauche, il s’était agi d’un ancien combattant franquiste qui aurait assassiné des républicains espagnols…? Soyons sérieux: rien n’est moins sûr ! Or, si l’on peut admettre les mesures « humanitaires », peut-on admettre le « deux poids, deux mesures » ?….
(1) la deuxième femme, Joëlle Aubron est décédée; seuls restent en prison Nathalie Ménigon, Jean Marc Rouillan, Georges Cipriani et celui qui est considéré comme l’artificier du groupe, Max Frérot.
Je rappelle qu’Eric Lajoye est en prison depuis 18 ans alors qu’il s’était borné à faire exploser un pétard qui ne fit ni mort ni blessé ni même de dégâts matériels dans un café fréquenté par des immigrés.