Les Lundis.
Par Louis-Joseph Delanglade*.
Quand il arrive à Londres, pour le 27ème sommet de l’Otan des 3 et 4 décembre, M. Macron sait qu’il pèse tout le poids d’une armée française au combat et prête à payer le « prix du sang », ce qui est loin d’être le cas des vingt-huit autres membres.
Avant l’ouverture, les positions des uns et des autres ainsi que leurs griefs réciproques se sont étalés dans la presse. Dédain américain pour une Organisation obsolète, crainte française quant à sa capacité et sa volonté réelles de défense, peur allemande de ne plus pouvoir se blottir sous son parapluie, velléités turques de faire cavalier seul, etc. Après deux jours d’entretiens, une déclaration finale affiche pourtant union et consensualité : cette déclaration sans aucun doute préparée bien avant (c’est l’habitude) ne peut manquer de laisser perplexe.
M. Macron avait choqué certains alliés européens en évoquant la nécessité d’une « Europe puissance» et même un rapprochement avec la Russie, mais il avait surtout scandalisé en s’interrogeant sur l’avenir et la fiabilité même de l’Otan. On en a grincé des dents outre-Rhin et jusqu’en Turquie. Pourtant il n’était pas allé jusqu’à corréler l’autonomie stratégique de l’Europe et la fin de l’Otan. Pour la Russie, il suggérait (sans être le seul, d’ailleurs, sur cette position de bon sens) de privilégier un dialogue constructif pour « l’associer à la mise en place d’une nouvelle architecture de sécurité en Europe ». Il n’était donc pas venu à Londres pour parler uniquement budget mais voulait aussi soulever la question des finalités de l’Alliance.
Certains des points de la Déclaration de Londres sont propres à le rassurer, voire à le conforter – à croire que c’est leur objectif. Ainsi se trouve réaffirmé l’ « engagement solennel, inscrit dans l’article 5 du traité de Washington, selon lequel une attaque contre un Allié est considérée comme une attaque contre […] tous ». Ce point n° 1 est un classique obligé de ce genre de réunion et il ne pouvait en être autrement sauf à se quitter sur un impossible constat d’échec. Mieux : les Alliés en approuvant les propositions allemandes et françaises « d’améliorer la coordination stratégique et politique de l’Otan » semblent saluer un tandem franco-allemand désormais plutôt improbable : encore des mots qui ne coûtent rien mais dont la dérision est flagrante. On permet ainsi à Mme Merkel de respirer et on invite M. Macron à mettre en sourdine son scepticisme.
Sur la Russie, en revanche, l’hostilité de l’Organisation reste entière. Moscou est en effet désigné explicitement comme l’ennemi privilégié : le terrorisme lui-même ne vient qu’ensuite et de façon très floue, c’est-à-dire « sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations », car dans ce domaine il ne faut froisser personne. Certes, mais on appréciera la restriction, l’Otan se dit favorable « au dialogue, et à la perspective d’établir une relation constructive avec la Russie lorsque les actions de cette dernière le permettront ». La Russie serait responsable et d’« actions agressives » (mais contre quel membre de l’Otan ?) et de « l’extinction du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire » (mais ce n’est que la conséquence de l’hostilité continue dont l’Otan a fait preuve dès l’implosion de l’U.R.S.S.).
Ce sommet laisse donc l’impression désagréable que M. Macron n’a pas obtenu grand chose, que l’Otan demeure pour les Européens une alliance militaire tournée contre la Russie et toujours aux ordres des Américains. ■
L’aparté des chefs d’État ou de gouvernement – filmé à leur insu – en train de se payer la tête de Donald Trump. Aparté qui a fait les choux-gras des écrans du monde entier. Même Angela Merkel s’y est mêlée un moment…
* Agrégé de Lettres Modernes.
Retrouvez les Lundis précédents de Louis-Joseph Delanglade.
© JSF – Peut être repris à condition de citer la source
OTAN ou NATO en américain, c’est bien le traité de défense de l’Atlantique Nord. Donc l’OTAN n’avait rien à faire en Serbie, Afghanistan, Sahel ou ailleurs.
L’OTAN a aussi trahi ses numéros 2 et 3 : Royaume Uni, France. EN 1956 ,l’URSS menaça ces 2 pays s’ils ne quittaient pas l’Egypte de NASSER. Or que fit EISENHOWER, ancien commandant de l’OTAN et Président des Etats Unis: il ordonna à ses 2 fidèles lieutenants, qui plus est, titulaires de l’arme
nucléaire et droit de véto à l’ONU, de partir
Puis ce fut au tour de la TURQUIE lachée par KENNEDY, en échange du retrait des missiles soviétiques de CUBA, les USA retirèrent les leurs de Turquie.Il est de l’intérêt de l’Europe de discuter avec la RUSSIE de POUTINE, lui aussi grosse pointure nucléaire..
Bravo pour cet article, que l’on serait bien en peine de trouver ailleurs.
Je lis les Lundis de Louis-Joseph Delanglade depuis leur commencement. Comme je lisais dans le temps ses articles du vieil Ordre Provençale et, à sa suite, de Je Suis Français, lorsqu’il était un mensuel papier des années 1970-1980.
Je me dis que si l’on rassemblait les 2 ou 300 Lundis de LJD parus dans lafautearousseau lorsque ce blog valait la peine d’être lu, et aujourd’hui dans JSF l’on aurait une sacrée somme de réflexion politique sur le monde actuel.
Une somme que l’on serait bien en peine, en effet, de trouver ailleurs.
Bien de ces deux derniers avis!