Par Hadrien Desuin*
Cette analyse lucide et sans concession de la politique américaine en Irak est parue sur FigaroVox le 6 janvier.
Remarque générale : il y a aujourd’hui parmi les intellectuels et observateurs français en matière de politique internationale bien davantage de réalisme, moins de concession à l’idéologie, moins de prise des nuées sur les esprits, que par le passé – récent ou plus lointain. On ne s’en plaindra pas. Hubert Védrine reste un maître en la matière. Il fallait l’écouter ces derniers jours à propos de la crise iranienne sur les diverses antennes pour s’en convaincre… Nous aurons, nous autres Français, bien besoin de réalisme, lucidité et courage pour faire face aux dangers du désordre mondial renaissant à la violence et à la guerre. Autre remarque : la réflexion d’Hadrien Desuin pourrait se résumer en cette dualité : les exigences de la campagne électorale américaine jouant une fois de plus avec le feu au Proche-Orient au risque d’une guerre. C’est une constante dans l’Histoire que les campagnes électorales de tous poils ne contribuent pas à l’ordre, à la paix et tout bonnement à la tranquillité du monde. Des pauvres hommes, en particulier, qui s’y croient souverains. JSF
« Donald Trump vient de jeter un bâton de dynamite dans une poudrière ».
Le commentaire de Joe Biden n’est sans doute pas objectif mais il a le mérite d’être clair : la campagne présidentielle a commencé, et pour cela le shérif Trump a frappé en premier. Avec une certaine efficacité, les États-Unis ont successivement éliminé leurs deux meilleurs ennemis Abou Bakr Al-Baghdadi et donc Kassem Soleimani, le chef de la puissante force Al Qods. Deux points de gagnés pour le candidat républicain à la réélection.
Pourtant Joe Biden a raison de s’alarmer. Donald Trump a revendiqué sur Twitter l’élimination d’un dirigeant qui se déplaçait officiellement entre la Syrie, le Liban et l’Irak, deux pays où l’oncle Sam a perdu le contrôle mais pas encore sa force de frappe. De ce fait, il a humilié la souveraineté irakienne et perdu tout crédit à Bagdad. Depuis 2003, Américains et Iraniens se partageaient une tutelle baroque sur le pays. Ce temps-là est révolu.
Plus qu’à l’exécution de Baghdadi, c’est à celle de Rafik Hariri qu’il faudrait comparer la mort du numéro 2 iranien. «Il ne faut pas parler d’exécution mais d’assassinat» observait d’ailleurs Jean-Pierre Chevènement sur Sud Radio dimanche. L’exécution est une sentence judiciaire or Soleimani a été tué sans préavis, par vengeance. On se souvient que l’assassinat de Rafiq Hariri à Beyrouth avait suscité des manifestations monstres au Liban et précipité le départ des troupes syriennes du pays en 2005.
D’ores et déjà le parlement et le premier ministre irakiens ont demandé le départ des troupes américaines, lesquelles devront partir même en l’échange de sanctions économiques. C’est un recul évident pour l’influence américaine au Moyen-Orient.
Donald Trump peut tempêter autant qu’il le souhaite et menacer de réduire en cendres la civilisation persane, il s’agit désormais pour le Pentagone d’organiser dans le bon ordre le retrait définitif des troupes américaines de Mésopotamie.
C’était le projet initial de Trump. Mais comment désormais ne pas apparaître en échec auprès de son opinion publique ? Partout, les troupes américaines doivent se retrancher. Au Kenya, trois morts sont déjà à déplorer dans une base américaine. Même dans la zone verte de Bagdad, Ils ne sont plus en sécurité. Le spectre de l’échec de Jimmy Carter en Iran rôde et, s’il y a peu de chance que Trump s’y résolve, sa réaction est à craindre.
Comparaison n’est pas raison, mais le sac de l’ambassade américaine à Bagdad avait des allures de Saïgon en 1975 ou de Téhéran en 1980. On peut bombarder en représailles autant qu’on veut, le bilan de l’occupation américaine en Irak est un désastre qui laisse derrière elle une guerre civile entre chiites et sunnites. Comme le remarquait très justement Fareed Zakaria, l’assassinat de Souleymani a sonné le glas du hirak, le mouvement anti-iranien de la place Tahrir à Bagdad. C’est très exactement l’effet inverse recherché par la diplomatie américaine depuis plusieurs décennies. Après le départ américain, la mainmise chiite sur le pays sera complète dans sa partie sud, ce qui ne veut toutefois pas dire qu’elle soit inféodée à l’Iran. Doit-on rappeler que les chiites irakiens sont arabes tandis que leur grand voisin est perse ?
À Téhéran, Donald Trump a offert un martyr de plus à la légende des mollahs. Il ressoude des liens distendus entre Téhéran et Bagdad. Le pari Soleimani était risqué, il est d’ores et déjà perdu sur le plan diplomatique. Sur le plan politique, et c’est ce qui compte pour Trump, il peut encore être gagné. ■
* Spécialiste des questions internationales et de défense, Hadrien Desuin est essayiste. Il vient de publier La France atlantiste ou le naufrage de la diplomatie (éd. du Cerf, 2017).
DONC, il faut laisser ces pays racaille Islamiste continuer sans réagir, or, s’ils ne sont pas arrêtés brutalement, les disciples de Mahomet continuent leur avancée, et là tant pis pour nous ou alors : quitte ou double.
Setadire, votre raisonnement est fondé sur le refus de toute analyse. Il se résume à
une opposition à « la racaille islamiste », opposition qui justifierait n’importe quoi. Je me permets de vous inviter à prendre en considération plusieurs thèmes:
– D’abord « islamisme » est un terme trop vague. L’opposition entre sunnites et chiites est plus violente que celle entre chrétiens et musulmans.
– Ensuite, qu’on le regrette ou qu’on l’accepte, l’Islam existe et il a un domaine d’influence. Force est de constater que les actions américaines n’ont pas donné les résultats qu’elles affichaient comme buts de guerre officiels.
– Enfin il est un peu puéril de penser que l’assassinat ciblé est toujours justifié à nos yeux dès lors qu’il est appliqué à des islamistes.
Donc je vous invite à observer les évènements de manière politique, en gardant à l’esprit que notre point de vue implique la prise en compte prioritaire de nos intérêts.
Il est singulier qu’ au milieu du déchaînement de haine contre la Syrie et son Président légitime , les » consultants » des émissions télévisuelles de bourrage de crâne ne se soient penchés sur le fait que les Alawites représentent une fraction » limite » de l ‘ Islam et très modérée . Dans le même ordre d’idées , aucun regret des néo-cons pour les conséquences de leurs interventions en Afghanistan , en Irak , en Libye .
Tout est bon et sans regret pour les pêcheurs en eaux troubles .