Les Lundis.
Par Louis-Joseph Delanglade*.
Le Washington Post vient de révéler la menace américaine (+ 25% de taxes sur les voitures importées) à l’encontre des pays européens s’ils n’enclenchaient pas le mécanisme de résolution des différends avec l’Iran, c’est-à-dire une procédure d’infraction pour violation de l’accord nucléaire.
Ce nouveau chantage, dont l’effet a été immédiat, s’inscrit dans la lignée des sanctions extraterritoriales américaines s’appliquant à toute entreprise européenne qui commercerait avec l’Iran (Total, Renault et Air France ont ainsi quitté l’Iran dès 2018).
L’extraterritorialité telle que la conçoivent et la pratiquent les Etats-Unis est bien le privilège de la puissance, une constante de la politique américaine qui, déjà sous la mandature de M. Obama, avait accablé BNP Paribas d’une amende colossale pour utilisation du dollar dans des opérations avec l’Iran. Echaudés, les Européens (en l’occurrence, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni) ont pensé cette fois contourner l’obstacle en créant Instex, société « destinée à favoriser les échanges commerciaux avec l’Iran, sans utiliser le dollar américain » (janvier 2019). Résultat : 0 € de transaction en 2019, en raison du risque, même implicite, de sanction américaine contre toute entreprise utilisant le mécanisme.
De même, engagé avec la Chine dans une rivalité stratégique qui pour l’instant revêt surtout un aspect commercial et technologique, les Américains soufflent le chaud et le froid, à leur convenance. Quand ils signent le 15 janvier un accord commercial censé leur rapporter deux cents milliards de dollars, c’est sans s’inquiéter de l’Europe. Celle-ci, qui n’aurait pas tort de craindre une pénalisation des entreprises européennes sur le marché chinois, se réserve le droit de saisir l’Organisation mondiale du commerce. Quand on sait dans quel état de « déshérence » (Les Echos, 17 janvier) se trouve cette institution, on peut être sceptique. Il y a fort à parier que là encore s’imposera cette fameuse « raison du plus fort » évoquée par notre moraliste national.
M. Haski, géopolitologue patenté qui a succédé à M. Guetta dans la matinale très écoutée de France Inter, tire parfois des conclusions apparemment pleines de bon sens. Ainsi achevait-il son intervention du 14 janvier par le constat d’un « monde qui s’annonce, sans règle du jeu ni arbitre ».
Mais faut-il s’en étonner, voire s’en indigner ? Seul a toujours compté le rapport de force. Ceux qui voudraient nous faire croire que de prétendues « valeurs », garanties par on ne sait quelle autorité morale (l’Onu aujourd’hui, le pape avant-hier ?), pourraient être invoquées en matière de relations internationales sont des illusionnistes dangereux qui, dès que l’occasion leur en est donnée, contribuent à multiplier conflits et problèmes – comme l’histrionesque M. Lévy (Bernard-Henri). Cela ne signifie nullement qu’il faut pratiquer une politique du renoncement ou de la victimisation, bien au contraire : c’est seulement en tenant compte des réalités (suprématie américaine, montée en puissance de la Chine, inexistence de l’Union européenne, réaffirmation de la Russie) qu’on pourra, avec le temps, récolter les fruits d’une politique étrangère cohérente uniquement motivée par l’intérêt national. ■
* Agrégé de Lettres Modernes.
Retrouvez les Lundis précédents de Louis-Joseph Delanglade.
© JSF – Peut être repris à condition de citer la source
Donald TRUMP héritier de LA FONTAINE: la raison du plus fort est toujours la meilleure????????????????????
cela dit m’étant rendu 8 fois aux USA ( entre 1981 et 2009) je n’ai vu qu’une voiture française ( R5)et beaucoup de voitures allemandes, une pleine page de pub à la Nouvelle Orléans pour BMW, nous ne serons pas ceux qui perdront le plus.
En 2018, les voitures américaines étaient taxées de 10% en Europe, les voitures européennes de 2,5% en Amérique.
Maintenant, faisons comme eux: PAS de CADEAUX, mais réciprocité.