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On pense ce que l’on veut du propos de Gilles-William Golnadel et de ses engagements en général. Il n’empêche, il remet ici en place Agnès Buzyn avec dignité et avec courage. De la place qui est la sienne, il dénonce son attitude avec lucidité, sans craindre de dire les choses. Il a raison. [Valeurs actuelles, 3 février] JSF
J’avoue ne pas en être revenu.
Marine Le Pen venait de s’incliner devant les victimes juives de la Shoah à l’occasion du 75e anniversaire de la fermeture du camp d’Auschwitz. Et voilà que la ministre de la Santé Agnès Buzyn se permettait de déclarer : « Marine Le Pen n’est pas la bienvenue pour parler du nazisme. »
Je n’accepte pas qu’on puisse faire du massacre des juifs d’Europe une affaire politique ou pire encore politicienne. Je vois bien que Mme Buzyn aurait préféré que la fille de Jean-Marie Le Pen, qui n’a jamais fait la moindre déclaration antisémite, se conduise comme son père, ou comme une gauche extrême ou un islamisme que jamais elle ne réprouve avec autant de verve.
Quelle aubaine pour son président qui, du temps encore où il guérissait les écrouelles, voulait enfermer les lépreux populistes dans leur ghetto honteux.
Si j’avais été Mme Buzyn, au lieu de jouer les hôtesses lançant des invitations pour savoir qui est bienvenu ou non pour parler du nazisme, je me serais fait plus petite, cette semaine où mon président de la République avait tracé une parallèle mémorielle scabreuse entre la déportation des juifs de France et la guerre d’Algérie.
J’entends le plus grand bien du père de la ministre, le docteur Elie Buzyn, parqué dans le ghetto de Lodz à l’âge de 11 ans, et seul survivant de sa famille. Depuis il s’est fait un devoir de transmettre le témoignage de ces souffrances.
Mais Agnès n’a pas plus à se glorifier des mérites d’Elie que Marine n’a à se couvrir de cendres des dérapages de Jean-Marie. Depuis, sur ce chapitre, elle a pris ses distances avec son géniteur en déclarant au Point que la Shoah était le pire de tous les drames humains.
Nul n’a le droit ou le devoir de tirer vanité ou honte de ses auteurs.
Et puisque nous en sommes là, je pourrais moi aussi exhiber la Croix de guerre, la médaille de la Résistance et la Légion d’honneur de mon grand-père maternel Marcel Schwartz ayant laissé un œil à Verdun et qui fut salué au cimetière de Rouen par ses camarades de Rhin et Danube avant que d’être enterré entre le drapeau français et celui d’Israël.
Et pendant que j’y suis, je pourrais exciper du martyre de ma tante Régine Rivka Goldnadel, arrêtée par les gendarmes de Vire et les SS puis déportée à Auschwitz pour y être gazée trois jours plus tard.
Je préfère saluer la mémoire lumineuse de Madeleine Lacroix, petite vendeuse du Calvados, qui prit le petit Jacques Goldnadel par la main en le faisant passer pour son fils et le conduisit en zone libre au péril de sa vie.
Elle décéda à 101 ans, trois jours trop tôt avant que de pouvoir recevoir de son vivant la médaille des Justes de Yad Va Shem.
J’ignore quelles étaient les idées politiques de Madeleine et je m’en fous.
Que madame Buzyn dise ce qu’elle a droit de penser de la politique du Rassemblement national et s’occupe des hôpitaux en crise ou d’un nouveau virus, elle a assez à faire.
Mais celui qui instrumentalise cyniquement la mémoire des morts au service de sa vie politicienne me trouvera toujours sur sa route. ■
Je lis et j’écoute depuis longtemps ce qu’écrit et dit Monsieur Gilles William Goldnadel et ai toujours été frappé par son honnêteté intellectuelle et son courage politique. Je ne connaissais pas l’histoire familiale de Madame Buzyn mais respecte sa sensibilité. Ceci étant, je déplore comme le fait Monsieur Goldnadel la déclaration purement politicienne et déplacée dans le contexte visé, dans la période électorale où nous nous trouvons, de Madame Buzyn, alors qu’il est de notoriété publique que Marine Le Pen a toujours condamné de façon claire et explicite toute forme d’antisémitisme dans son parti.