Par Jacques DAUPHIN*
Cet article est paru dans l’Ordre provençal en mai 1974. Il tente de définir une ligne politique et militante d’Action Française, face à l’événement et à l’avenir qui se profile. En un sens, transposée en d’autres temps et circonstances, il s’agit, nous semble-t-il aujourd’hui, d’une ligne ne varietur qui pourrait tout aussi bien, dans son fond, s’appliquer à l’ère Macron. Les observateurs ont souligné à juste titre ces dernières heures, des points forts de ressemblance entre Valéry Giscard d’Estaing et Emmanuel Macron : deux présidents jeunes, épris d’une modernité qu’ils prétendent incarner et servir, centristes, sans majorité digne de ce nom, coupés l’un et l’autre de la confiance populaire, réformateurs empêchés de réformer par les crises qui entravent leurs velléités réformatrices, idéologiquement européistes, et, finalement, tout deux persuadés du primat de l’économie et du monde marchand. C’est sans-doute en ce sens que reprendre et relire cet article d’un temps moins révolu qu’on le croit, garde un intérêt certain. Rappelons que L’Ordre provençal est à inscrire dans la suite des publications des royalistes provençaux [U.R.P], suivi de Je Suis français mensuel papier, lafautearousseau, et aujourd’hui de nouveau Je Suis français, quotidien royaliste sur la toile. Bonne lecture.
* Ce pseudonyme tait alors celui de Gérard Pol.
LA LIGNE POLITIQUE DU MOUVEMENT
Nous ne sommes pas des conservateurs. Nous n’avons pas fait partie du nouveau Rassemblement de la Peur qui vient, en moins d’un mois, de porter au pouvoir Valéry Giscard d’Estaing. Nous n’avons pas tremblé pour nos postes, ou pour nos portefeuilles. Nous ne faisons pas de la politique pour défendre de petits ou de grands intérêts, ni pour sauver la mise d’une bourgeoisie dorée et pléthorique qui a perdu en général tout sens de la nation, de la civilisation, de nos valeurs héritées pour se vautrer dans les médiocres jouissances de la société de consommation.
Nous sommes des militants d’Action Française et en regardant s’affronter les deux candidats d’une même Révolution, en voyant s’opposer leurs partisans, nous pensions, quant à nous, à la France, à tout son peuple, à l’Histoire, à notre civilisation en danger, à nos provinces vouées à la mort, à nos familles, et à l’Avenir.
Seront-ils rassurés, les libéraux, les modérés et les « centristes » par les quelque 0,7 % de suffrages qui ont manqué à François Mitterrand pour s’emparer du pouvoir ? La marge est si faible que tous les jours qui passeront seront pour eux un répit. Pour l’instant, qu’ils poussent, comme en mal 68, leur veule soupir de soulagement. Plus dure sera la chute.
Pour nous donc, la Révolution continue. La Révolution n’est pas à faire. Elle se fait. Elle est dans l’Etat. Elle gouverne. Elle détruit. Elle mûrit le fruit que d’autres mangeront. Elle travaille pour François Mitterrand. Elle lui prépare son terrain. Si près du pouvoir, un jour ou l’autre son heure viendra. Et ce ne sera qu’à peine différent. Mitterrand, ce sera la même révolution.
Alors, pour nous, la lutte aussi continue. La lutte du Pays Reel.
Quelle est notre route ? Quelle sera notre stratégie ?
Soyons assurés d’abord que la vie future du régime issu de ce 19 mai n’ira pas sans crises profondes. La majorité présidentielle est dérisoire. La majorité parlementaire est incertaine. Mais surtout il y aura la crise de notre Société et ses contradictions que les difficultés économiques prévisibles pour 1975 et 1976 vont multiplier et intensifier : excès du centralisme bureaucratique ; problèmes créés par la concentration industrielle ; professions menacées par le capitalisme financier; problèmes universitaires et crise de la jeunesse ; montée des forces révolutionnaires, etc …
Bien sûr, les mouvements hostiles au régime seront en partie récupérés par les bureaucraties en place: grandes centrales syndicales, associations de droite ou de gauche. Ils pourront aussi grossir les groupuscules gauchistes.
Notre tâche à nous sera de faire alliance avec toutes les forces du Pays Réel qui s’opposeront, sans arrière-pensée idéologique, à la destructuration de notre Société par les puissances coalisées du Pays Légal et du capitalisme apatride.
Giscard – ou demain Mitterrand – seront pour l’avortement. Ils poursuivront l’un ou l’autre une politique antifamiliale : nous ferons alliance avec les hommes et les femmes, avec les associations qui s’y opposeront.
Par dirigisme techno-capitaliste – ou demain Mitterrand avec sa bureaucratie – Giscard poursuivra une politique antirégionale: nous ferons alliance avec les régionalistes « purs « , ceux pour qui les provinces sont des communautés historiques et non pas des tremplins pour la Révolution ou pour l’Europe, contre la France.
Sous Giscard – ou sous Mitterrand – la Société de consommation et ses excès, susciteront mille réactions.
Contre un urbanisme échevelé, contre la pollution et la destruction de la nature, contre la « déculturation » de nos esprits et de notre jeunesse au profit de modes importées : nous serons à la tête ou aux côtés de ces mouvements de contestation et de réaction.
Il y aura ceux qui regretteront comme une défaite que l’Etat soit retombé aux mains des clans et des partis ; ceux qui avaient rêvé d’en restaurer la légitimité et le retrouveront livré aux vieilles combines ; ceux qui aspireront avec nous à cet « arbitrage supérieur » dont le Comte de Paris évoquait récemment l’urgente nécessité. Deux Frances dressées l’une contre l’autre ? Il y aura ceux qui attendront un Rassembleur. Avec eux nous· ferons alliance.
Et puis il y aura aussi, surtout si l’on regarde la faune lecanuettiste qui entoure Giscard, le clan de l’Anti-France, les habitués de la trahison, ceux qui rêvent d’une France à genoux. Et si Mitterrand arrivait au pouvoir, ce serait au profit d’autres ennemis de nos libertés. Alors, il nous faudra faire alliance avec tous ceux pour qui la France n’est pas à vendre, pour qui la Patrie doit rester libre.
Avec Giscard à l’Elysée, le combat continue.
Combien dureront les premières heures euphoriques du nouveau septennat ? ■
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Merci à Michel Franceschetti d’avoir remis ce texte politique et militant en lumière
Merci pour ce document, il montre que l’esprit de nos gestionnaires républicains n’a pas changé. Ils appliquent leur idéologie depuis 1791. Idéologie d’enfants gâtés , que l’on nomme de nos jours le mondialisme heureux ou libéralisme mondialisé, la politique du bisounours qui crée les guerres. Ils seront toujours du coté de l’ennemi de la France et contre le Français moyen qui n’a toujours pas compris. Souvenez vous: 1937-1940, ils étaient pour les Nazis, de 1958-1962 ils étaient pour le FLN, cette fois ils imposent la chute mortelle de l’enseignement public pour favoriser l’émergence d’écoles de haute qualité pour émigrés, ils sont pour l’islam en sacrifiant la culture judéo chrétienne.
Ce document montre votre clairvoyance, dans l’analyse politique. La persévérance payera peut être un jour prochain.
Mais comment réveiller tous ces malheureux esprits qui sont trompés et qui croient encore à cette idéologie soutenue par la finance mondiale. Quant on s’approche de la fin , le vécu suffit pour vous comprendre, mais les plus jeunes sont tellement endoctrinés par le mensonge républicain, qu’ils ne peuvent voir le mal.
Ce qui est amusant c’est que GISCARD et MITTERRAND, ont été TOUS les DEUX, élevés dans une famille……d’Action française
Remarquable . Ce journal avec ce titre d’article « A compter de 19 Mai : l’adversaire s’appelle Giscard » montre bien que dés le début , ce Président ( R.I.P ) en dépit de son intelligence , d’un passé de grand ministre , ne convainquait pas les esprits lucides ; c’est peu de le dire . L’argumentation est par ailleurs fort juste . Très bon papier . Bien de l’avoir exhumé !
Les « deux français sur trois » ; quelle illusion ! Vers la fin du mandat , alors que les journalistes télévisuels faisaient sa cour imaginant sa réélection (les temps n’ont pas changé sur ce plan) , on n’entendait que critiques , « il va perdre » ; et pas seulement chez les socialos.
~ Voici » un ancien président ruineux & profiteur en moins à payer !!! !! ! ;
* Message d’un « Royaliste-Lozérien ».