Les Lundis.
Par Louis-Joseph Delanglade*.
La semaine dernière, deux annonces sont venues rappeler que, décidément, rien ne change dans la vie politique française
Lundi 14, M. Macron, chef de l’Etat fait savoir qu’il envisage de faire adopter par référendum une modification de l’article 1 de la Constitution (« La France est une République etc. ») dans le but apparent de complaire aux membres de la Convention Citoyenne pour le Climat : « Elle [la République] garantit la préservation de la biodiversité et lutte contre le réchauffement climatique. »
Il s’agit pourtant d’une modification aussi inappropriée qu’inutile. Inappropriée parce que cet énoncé à l’allure d’impératif moral catégorique n’a pas vraiment sa place dans une constitution. Inutile en second lieu puisque la France s’est déjà lié les mains en donnant à la Charte de l’environnement de 2004 (qui précise les principes, droits et devoirs en lien avec le respect de l’environnement) une valeur constitutionnelle.
On est donc plutôt incité à penser que, conformément à la réaction de JSF (« Quand Macron sort de son chapeau le référendum écologique », mercredi 16), M. Macron cherche plutôt à conforter sa candidature à sa réélection, bref à faire un de ces coups électoralistes dont ses prédécesseurs étaient coutumiers. En effet, l’alternative est claire : ou cette proposition aboutit avant l’échéance présidentielle de 2022, ou elle n’aboutit pas. Dans les deux cas, M. Macron peut penser que le résultat obtenu lui sera profitable : dans le premier cas, parce que le référendum serait une sorte de plébiscite piégeant de nombreux écologistes, plutôt obligés comme M. Jadot de voter une mesure qu’ils demandaient ; dans le second cas, vraisemblablement à cause de l’opposition du Sénat rebuté par le verbe « garantir », c’est la droite qui servirait de repoussoir. La route pour un second tour tant annoncé contre Mme Le Pen en serait , dans les deux cas, plus grande ouverte.
Mais qu’on se rassure, Paris et l’Etat central n’ont pas le monopole de la magouille. Dès le lendemain, soit mardi 15, Mme Rubirola, maire de Marseille, annonce qu’elle démissionne de son mandat. Les raisons invoquées, concernant son caractère et son état de santé, sont sans doute fondées, sauf que la chose a manifestement été programmée de longue date.
Certains propos antérieurs de Mme Rubirola, ne faisant pas mystère du fait qu’elle ne resterait pas plus de quelques mois à son poste, avaient déjà accrédité les rumeurs et indiscrétions d’avant premier tour au sujet d’un accord passé avec M. Payan, futur premier adjoint, avec lequel elle entretenait des relations très amicales depuis leur accession commune au conseil départemental. En fait, l’écologiste EELV avait décidé de servir de prête-nom au socialiste Payan qui, tête de liste initiale du Printemps marseillais, n’avait pas réussi à faire l’unité à gauche sur son nom. On sait ce qu’il advint : la gauche minoritaire mais unie remporta la mairie.
Le Printemps marseillais avait promis « la transparence et la démocratie locale ». M. Demorand se pose donc la question de savoir s’il y a « entourloupe démocratique » (France Inter, mercredi 16). Son compère de la matinale lui répond par l’affirmative mais ajoute que « lors d’une élection municipale on ne vote pas pour un homme ou une femme mais pour une liste et un projet. » On comprend ainsi que ce n’est pas grave. Il est piquant d’entendre écolos et socialistes si prompts à donner des leçons de morale ne pas se les appliquer à eux-mêmes. Qu’on le veuille ou pas, il y a eu tromperie, voire escroquerie. Il est vrai que M. Payan a été à bonne école : politicien professionnel de 42 ans, avec déjà une (longue) carrière d’apparatchik et d’élu socialiste, dans la lignée et le giron de Mme Carlotti ou de MM. Guérini et Vauzelle, il reste un adhérent du PS comme l’était Gaston Defferre. C’est tout dire.
Au fond, la semaine dernière, deux annonces sont venues rappeler que, décidément, rien ne change dans la vie politique française, le principe même de l’élection semblant autoriser tout et n’importe quoi. Les politiques ne sont que des politiciens. Cela s’appelle la démocratie. ■
* Agrégé de Lettres Modernes.
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