Nombreux sont ceux, amis et adversaires, qui se sont interrogés sur les raisons pour lesquelles l’Action française, malgré une œuvre immense, malgré les talents exceptionnels et les extraordinaires dévouements qu’elle a réunis, n’a pourtant pas réussi, selon l’expression toute simple que Boutang utilisait, à « faire le Roi ».
Mais le Comte de Paris – qui avait rompu avec l’Action française aux alentours de 1936 – n’y a pas réussi davantage, ce qui, d’ailleurs, élargit l’interrogation bien au-delà de l’Action française…
Certains se souviendront que dès l’Enquête sur la Monarchie, qui ouvre le XXème siècle, puisqu’elle est datée de l’année 1900, Barrès avait opposé à Maurras une objection de principe, radicale, qui tenait à l’esprit public de cette période : « Vous ne réussirez pas parce que vous n’avez pas avec vous les puissances du sentiment ».
Elles étaient, à l’époque, en grande partie, bonapartistes, républicaines ou, comme on disait alors « poignardes ».
Barrès en était lui-même imprégné.
On pourrait s’interroger, d’ailleurs, sur ce qu’elles sont devenues aujourd’hui, si tant est qu’il en existe encore de convenables …
Curieusement, quelques vingt-cinq ans plus tard, dans son « Cahier pour moi » (publié par Dickès, dans son Bainville, la Monarchie des Lettres, page 1106), Bainville reprend lui aussi le problème que Barrès avait posé et, avec la clarté et la concision qui le caractérisent, il lui oppose, à son tour, un point de vue bien différent, sur lequel, nous aussi, aujourd’hui, pourrions réfléchir. Voici la réflexion qu’il se fait à et pour lui-même, puisque ces notes n’étaient pas destinées à être publiées :
« Principalement, la faiblesse de l’AF n’est pas, comme le croyait Barrès, de ne s’adresser qu’à la raison et de ne pas tenir compte des puissances des sentiments. C’est de ne s’adresser qu’aux sentiments nobles, désintéressés, à l’amour du bien public, à la vertu. »
Par là, Bainville retrouvait son propre stoïcisme…
Cette définition du maurrassisme et, en ce sens, de sa faiblesse n’a guère été mise en avant.
On lui a préféré la plupart du temps la caricature ou le rejet. Bainville savait de quoi il parlait : il a passé près de quarante ans à l’Action française….
Reste le problème qu’il pose, qui se pose plus encore en notre temps qu’au sien :
« ne s’adresser qu’aux sentiments nobles, désintéressés, à l’amour du bien public, à la vertu » est-ce une faiblesse pour l’éternité ?
Ce n’est pas si sûr….
* Voici l’intégralité de la très courte note du « Cahier pour moi », rédigé à partir de la fin 1929 :
« Nos impossibilités . Affaire de Rome : incompatibilité du nationalisme et de l’ultramontanisme.
En général, pessimisme. Mais le nationalisme interdit d’aller jusqu’au bout de la théorie de la catastrophe. De 1914 à 1918, l’Action française professe la confiance et annonce la victoire.
Principalement, la faiblesse de l’AF n’est pas, comme le croyait Barrès, de ne s’adresser qu’à la raison et de ne pas tenir compte de la puissance des sentiments. C’est de ne s’adresser qu’aux sentiments nobles, désintéressés, à l’amour du bien public, à la vertu.
Pendant la guerre un soldat demandait une faveur à mon frère et se recommandait de son état de ligueur. Paul, qui n’était pas AF, lui répondit : » Eh ! bien, puisque vous lisez l’AF, vous savez qu’elle vous apprend à faire votre devoir.
Programme austère. Et les opportunistes romains accusent l’AF d’immoralisme. »
Je pose simplement la question: et si l’ AF avait échoué à cause du boulet du « compromis nationaliste ».
En 1917 elle soutenait CLEMENCEAU, ce fut lui le Père la Victoire et non MAURRAS.
De 1940 à 1944 soutien au Maréchal PETAIN, or à partir de novembre 1942, position intenable, résultat MAURRAS condamné pour intelligence avec l’ennemi. UN COMBLE quand on sait que l’ AF n’avait cessé de prévenir les Français du danger hitlérien.
En 1958 soutien à DE GAULLE, résultat décomposition de l ‘AF.
De nos jours combien de sympathisants s’engagent pour le FN , en oubliant notre combat. Certes à défaut de la Royale, je choisis la Marine, mais uniquement le jour de l’élection.
Et si l’ AF cessait de rouler pour les mainteneurs de la République??????????????? et seulement pour le retour du ROI!
Je vous rejoins SETADIRE,pour le jour des élections.C’est même là que nous verrons si les français réagissent positivement en votant contre les bonnets blancs et les blancs bonnets.Sinon,c’est à désespérer pour eux…nous nous gardons l’espoir pour le Roi.Bonne journée à tous.
Excellentissime question posée au-delà de l’Action Française ! …
Les commentaires précédents sont tout à fait pertinents. La cause du Roi en France ne peut pas triompher si l’on s’enfonce dans des débats rationalisants, intellectuellement compliqués et qui supposent des raisonnements à n’en plus finir. Les meilleures causes sont celles qui s’énoncent simplement, comme coulant de source ou supposant un consensus finalement évident.
A mes yeux, et je n’ai pas toujours ressenti une telle vision dans le passé, la cause du Roi se trouve dans toute l’histoire de la France depuis deux mille ans. L’empire a été un accident de parcours généré par les désordres de la Révolution. On ne peut pas faire l’impasse de la Révolution qui a été préparée et a muri sous les derniers rois dont les règnes ont précédé ses évènements cataclismiques.
Mais il n’était pas et il n’est pas fatal que de la Révolution résulte nécessairement la république. La république est un régime de compromis et de raison insatisfaisant pour l’âme, qui découle de la division des français entre eux. Or, qui peut réunir tous les français sur l’essentiel, la France bi-millénaire et en-deça, sinon le Roi qui incarne dans sa personne toutes les valeurs possibles et dans lesquelles tout le monde en France pourrait se reconnaître, au-delà de toute distinction de religion, de race, d’ethnie, de croyance ou de non croyance et de statut social.
Au cours de sa longue histoire, la monarchie n’a pas été statique. Elle s’est adaptée aux circonstances tout en demeurant. La violence de la Révolution dans ses dernières années a brisé le système monrachique sans lui laisser le temps de s’adapter. Les révolutionnaires ont fini par vouloir tout tout de suite. Un néant en quelque sorte. Cette état d’esprit toute en impatience existe encore à beaucoup d’égard mais finira par lasser.
Le Roi pourrait finalement mieux unir les français entre eux sur les valeurs essentielles que la république qui toujours divise et notamment au moment des élections. Comment croire qu’un président élu au suffrage universel par une moitié des français contre le choix d’une autre moitié d’entre eux soit à même, comme par magie, de réunir tous les français une fois élu.
Comme démocrate, il est naturel de vouloir un gouvernenemt élu par le suffrage universel.
Mais pour l’intérêt supérieur du pays, je ne vois que le Roi, héréditaire, pour incarner la permanence des valeurs sur lesquelles la France est fondée intellectuellement, rationnellement et même charnellement pourrait-on dire.