( A consulter : Le Site de Politique magazine ).
Le corps électoral français, qui penche globalement à droite, s’est donc choisi un président de gauche. C’était presque écrit d’avance. Conséquence d’un « vote sanction » contre le président sortant, usé par ses cinq années de pouvoir et par les polémiques incessantes qui auront émaillé son passage à l’Élysée. L’accession de François Hollande à la présidence de la République est une des incohérences fondamentales de ce scrutin. Combien sont-ils à avoir choisi le candidat socialiste par adhésion réelle à l’homme et à ses idées ? Une certaine forme de suffrage universel montre ici ses limites qui consacre un chef de l’État avec près de 20% d’abstentions et plus de deux millions de bulletins blancs ou nuls. Sorti de sa fonction raisonnable de mode de désignation du ou des représentants de la nation, érigé en principe même du pouvoir qui se transforme en réalité en plébiscite du chef de l’exécutif, ce qui est le cœur de notre modèle institutionnel est toujours marqué de cette ambiguïté. La légitimité du président sorti des urnes ? Plus de 11 millions de Français ont refusé de se prononcer pour l’un ou l’autre des deux candidats !
Ces considérations ne sont pas celles de nos médias, tombés en véritable pâmoison devant chaque fait et geste du nouveau président. Que ce soit pour la formation du gouvernement ou pour ses premiers pas à l’étranger, les commentateurs, énamourés, sont sous le charme. Grâce à lui, la France et l’Europe sont sauvées ! Et Angela Merkel n’a qu’à bien se tenir. N’a-t-elle pas vu Barack Obama, himself, se rallier à la cause de la « croissance », cette « croissance » avec laquelle renouerait la zone euro comme par magie, ou plutôt, grâce au prestige et à la force de persuasion du président français ? Mieux, le monde entier adhérerait sans discuter aux positions de François Hollande !
Il apparaît une fois de plus que l’information en France est orientée et qu’elle l’est toujours dans le même sens. Mais cette escroquerie médiatique n’aura qu’un temps. La réalité s’imposera ; dans peu de temps, il faudra déchanter et les commentaires triomphaux ne seront plus de saison. À l’évidence, l’Allemagne, qui, de plus, se trouve en période préélectorale, refusera de financer les fameux « eurobonds » réclamés à cor et à cris par les socialistes français. Sous les applaudissements des députés du Bundestag, Angela Merkel a d’ores et déjà rejeté toute idée d’une politique de relance en Europe fondée sur la dépense publique. Au nom de quoi son pays accepterait-il d’entretenir à crédit des Grecs qui ne tiennent aucun de leurs engagements ou des Français qui ne parlent qu’embauches de nouveaux fonctionnaires et retraites à 60 ans ?
Dans de telles conditions, François Hollande aura du mal à tenir son pari de la croissance à crédit. Et pendant que les déficits s’aggraveront, que la dette française sera de plus en plus incontrôlable et que les comptes publics se détérioreront toujours plus vite, passeront les réformes « sociétales » : « mariage homosexuel », assouplissement de la loi sur l’euthanasie, droit de vote des étrangers… et quoi d’autre encore ?
Mais le plus urgent, pour lui, aujourd’hui, c’est de gagner les élections législatives. On sait que, sous la Ve République, le président élu obtient toujours dans la foulée une majorité à l’Assemblée nationale. Et cette victoire pourrait être encore amplifiée par les divisions au sein de la droite entre, d’un côté, une UMP déjà déchirée par la guerre des chefs, et, de l’autre, un Front national bien décidé à lui faire payer son refus de toute alliance, même localisée et temporaire. Refus stupide et attitudes suicidaires qui laisseront aux socialistes le champ libre pour remettre en cause tout ce que Nicolas Sarkozy a fait et surtout ce qu’il a fait en bien. « Droite », « gauche » : où est la vision d’avenir à long terme ? Où est la continuité ?
L’élection présidentielle – et même les législatives qui en sont, dans notre système, le prolongement – ne règle aucun problème. Pire, elle en crée de nouveaux en divisant les Français et en entretenant un climat de guerre civile qui ne se trouve pas à ce degré-là dans les autres pays démocratiques.
Pour s’en convaincre, on lira dans ce numéro les articles consacrés à la reine d’Angleterre, Élisabeth II. Voilà une souveraine, arbitre du jeu politique, qui, depuis 60 ans, suscite l’admiration et l’affection du peuple le plus anti-conformiste de la planète. La vieille dame de 85 ans a, certes, peu de pouvoirs concrets, mais elle est le symbole vivant de l’unité d’un pays dont le plus haut sommet de l’État n’est pas l’enjeu de luttes partisanes. Toute ambition personnelle politicienne trouve dans cette institution nationale qui domine l’histoire son frein naturel et sa mesure. Il devrait y avoir là matière à réflexion sur la pérennité de nos propres institutions. ■
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