C’est « l’arroseur arrosé ». On a eu beau alerter les naïfs, tâcher – mais en vain – de les appeler à un minimum de réflexion, rien n’y a fait. Hier, notre intelligentsia n’avait pas de mots assez durs contre Ben Ali, en particulier, et hurlait avec ceux qui (et « pour » ceux qui) aujourd’hui, se révèlent au grand jour pour ce qu’ils étaient, sont et resteront : des salafistes purs et durs, qui ne jurent que par la charia, et chez qui la simple vue d’un short sur une plage déclenche une hystérie « lyncheuse »; selon les propres termes du député PS qui en a été victime…
Et tout ce qu’a trouvé à dire Laurent Fabius est que cette agression est « inacceptable ». Dans quelle pièce trouve-t-on la réplique célèbre : « C’est un peu court, jeune homme !… »
Jamel Gharbi, 62 ans, élu régional socialiste dans la Sarthe depuis 2010 a été roué de coups le 16 août à Bizerte par des militants islamistes. Après avoir crié à ses proches de s’enfuir, Jamel Gharbi a vu les agresseurs se ruer sur lui et le « frapper à coups de matraques et de gourdins ». « Personne ne m’a secouru. Je n’ai dû mon salut qu’au fait que j’ai réussi à m’enfuir. Si j’étais tombé à terre, ils m’auraient lynché ». Normal : les gens ont peur, là-bas, maintenant que les salafistes et autres purs et durs ont pris une telle importance, bien aidés par l’aveuglement de certains, ici. Beau résultat, beau « printemps », qui porte des fruits si pourris….
Soyons éclectiques; quelques liens et autres articles archivés au hasard ; c’est déjà consternant que la France ait perdu les archives de son Histoire coloniale, de ses Troupes de Marine, de ses administrateurs … etc , au point de ne plus savoir ce qu’est le monde arabo-musulman, mais cela devient grotesque quand des faux savants nous expliquent, ici même d’ailleurs , que l’islam en France sera intégré en deux générations. Comment peut écrire des conneries pareilles ?
http://www.lefigaro.fr/international/2012/08/19/01003-20120819ARTFIG00189-les-salafistes-tunisiens-imposent-leur-ordre-moral.php
http://www.marianne2.fr/La-deshumanisation-guette-la-revolution-tunisienne_a220424.html
Le Monde 13 Juin 2012
Violences en Tunisie, le couvre-feu instauré
Une vague de violences sans précédent a éclaté simultanément dans plusieurs régions du pays dans la nuit de lundi à mardi. Elles se sont poursuivies hier, impliquant des groupes de salafistes et de casseurs. Ils s’en sont pris à des postes de police et à des bâtiments administratifs. Les troubles seraient liés à une exposition à La Marsa (banlieue nord de Tunis) qui s’est tenue du 2 au 10 juin, et dont des œuvres ont été jugées offensantes pour l’islam. Le ministre de la culture tunisien, Mehdi Mabrouk, a d’ailleurs annoncé mardi qu’il allait porter plainte contre les organisateurs de cette exposition intitulée « Printemps des arts ». Face à cette situation explosive, le couvre-feu est entré en vigueur de 21 heures à 5 heures du matin et couvre le « Grand Tunis » (qui comporte quatre gouvernorats) et les gouvernorats de Sousse (Est), Monastir (Est), Jendouba (Nord-Ouest), et Medenine (Sud). C’est la première fois depuis mai 2011 que la capitale tunisienne est soumise à un couvre-feu. L’état d’urgence est toujours en vigueur dans le pays depuis le soulèvement qui a abouti à la chute de Ben Ali, le 14 janvier 2011
Ils sont passé d’un régime autoritaire à la charia… On a l’état que l’on mérite… Bienfait!!!
Le « Printemps Arabe », une belle formule inventée par des imbéciles mais c’est un mensonge éhonté, la bonne formule, c’est :
« L’HIVER ISLAMISTE » !
Rien d’autre ! Tous ceux qui gesticulent maintenant à propos de la Syrie ont vraiment la mémoire courte et n’ont rien appris des leçons de l’histoire, même très proche. La chute de Saddam Hussein n’a pas apporté la paix en Irak, que je sache, et la situation y est pire, notamment pour les Chrétiens. La chute de Moubarack en Egypte produit les mêmes effets et ce sont principalement les Coptes qui trinquent dans l’indifférence générale des crétins qui nous gouvernent aujourd’hui comme de ceux qui nous gouvernaient hier.
Fabius ou Jupé, la même nullité insondable, la même ignorance crasse de la géopolitique, aucune vision globale, aucune compréhension des interactions : la vacuité totale!
Nous pouvons d’ores et déjà prier pour tous nos frères chrétiens du Moyen-Orient qui sont et seront les premières victimes de l’impéritie des tiédes et molles démocraties occidentales.
Une expression couvre la une des journaux depuis la révolution tunisienne, le « Printemps arabe ». Formule balancée par les media couchés. Toutefois, personne ne cite ou ne semble connaître l’origine de cette formule, expression qui fait référence au titre d’un livre de Jacques Benoist-Méchin, qui connut un très grand succès à la fin des années 50.
Deux mots sur l’auteur, d’abord. Jacques Benoist-Méchin est mort le 24 février 1983, à Paris, il avait près de 80 ans. Sa vie, assez extraordinaire, peut être divisée en trois périodes distinctes, dont le pivot est la seconde guerre mondiale. Avant 1939, il exerce comme journaliste, spécialisé dans la politique internationale. Doté d’une très solide formation musicale, il écrit aussi un opéra et rédige un essai sur la musique dans le monde de Marcel Proust.
La période de sa vie qui court de 1939 à 1954 est marquée par son rôle dans la politique vichyste jusqu’à sa démission, en 1942, du gouvernement de Pierre Laval. Incarcéré en 1944, condamné à mort en 1947, gracié par le président Auriol, il est libéré en 1954.
En prison, un peu au hasard d’une lecture, Benoist-Méchin se passionne pour le monde arabe et rédige, à l’aide de la documentation que lui apporte sa mère à la Santé, deux excellentes biographies, l’une consacrée au roi d’Arabie Ibn Seoud, l’autre à Mustapha Kémal.
S’ouvre alors une nouvelle période de son existence. A sa sortie de prison, il lui reste en effet à vivre trente ans, durant lesquels il développe une œuvre abondante d’écrivain et d’historien, focalisée en particulier sur l’histoire du monde arabe. Plusieurs gouvernements lui confient aussi des missions plus ou moins officielles, pour les besoins de la politique française au Moyen-Orient.
En novembre 1957, Jean Prouvost, directeur de Paris Match, lui demande de se rendre en Orient pour écrire une série de reportages. Accompagné d’un jeune interprète algérien (qui deviendra son fils adoptif), il parcourt plus de dix mille kilomètres à travers l’Egypte, la Syrie, le Koweït, l’Arabie Saoudite, la Jordanie, l’Irak et la Turquie. Il rencontre trois rois, deux présidents de la République ainsi que de nombreux ministres et ambassadeurs.
Mais sous la pression de Paul Reynaud, qui lui voue une haine féroce, le reportage n’est jamais publié. Benoist-Méchin envoie tout de même ses papiers chez Albin Michel, qui, en 1959, publie « Un Printemps arabe ».
Le livre connait d’emblée un très grand succès. A côté des relations d’entretiens, descriptions de lieux et évocations d’événements, « Un printemps arabe » laisse place à une rêverie poétique, éloquente et sans doute amoureuse. Tombé définitivement sous le charme de l’Orient et des Arabes, Benoist-Méchin se reconnait profondément changé par ce voyage, qui lui revient en mémoire comme un rêve :
« Mais ai-je fait un voyage ? N’ai-je pas plutôt fait un rêve ? J’ai vu et entendu tant de choses que malgré les notes prises au jour le jour, j’ai peine à les ressaisir (…). J’ai entendu la voix des millénaires et le cri aigu des instants (…). Voyage ou rêve, ceci seul est évident : c’est qu’après des expériences aussi fortes et aussi contrastées, ce n’est plus tout à fait le même homme qui est revenu en Occident (…). Le voyage est devenu à mon insu une aventure personnelle, une expérience intérieure ».
Document passionnant, admirablement bien écrit, témoignant d’une finesse d’analyse hors pair, ce livre se révèle particulièrement instructif et finalement très actuel pour la compréhension du monde arabe et l’analyse des moments tragiques qu’il vit en ce moment.
Il m’a été donné d’écouter récemment dans une école d’officiers une conférence sur le thème « La place Tahir, un an après ». Par une journaliste à la mode, je dirais une pisseuse de copie mme Claude Guibal. Elle se targue de bien connaître l’Egypte. Rarement entendu une telle médiocrité. La piètre couverture des évènements contribue beaucoup à rendre incompréhensibles les évènements qui se déroulent depuis Décembre 2010 dans le monde arabo-musulman. A croire que c’est délibéré …
il n’ a plus qu’à tirer l’échelle
J’en ai connu de ces soi-disant grands reporters venus dans les pays où j’étais en poste. Tout fraîchement débarqués, la tête pleine d’a-priori et de connaissances livresques, voire de ragots. Ils prétendaient tout connaître. Il va de soi que les expatriés et les diplomates sur place étaient des crétins incapables d’analyser correctement la situation locale. Nombre de ces journaleux boursouflés, avides de reconnaissance et d’égards, une fois rentrés en France, pondaient des articles dans la presse dite d’opinion où le ridicule de M. Jourdain le disputait à la vulgarité d’âme de Chrysale. De fait, de fort piteux et creux articles, mais rédigés dans les règles strictes de la langue de bois. Ces bourgeois gentilshommes continuent d’ailleurs à gesticuler avec succès dans le théâtre d’ombres de la bien-pensance parisienne.
Bravo et merci à Jean-Louis Faure pour ce passionnant commentaire. J’avais lu « Ibn Séoud, ou la naissance d’un royaume », qui m’avait beaucoup plu, mais ma connaissance de Benoist-Méchin s’arrêtait là; je comprends un peu plus, et un peu mieux maintenant…
En fait trois ouvrages se suivent dans la série que J B-M a intitulé « Le loup et le léopard » : Mustapha Kémal , Ibn-Séoud , et Le Roi Saud ou l’Orient à l’heure des Relèves. Ce dernier fils du précédent. Avec 35 pages d’histoire authentique donc sans passion sur la fondation de l’Etat d’Israel, l’expédition de Suez … etc, jusqu’en 1958.
Je suis en Tunisie depuis un mois. La situation est loin d’être aussi simple voir simpliste que vous évoquez.
La personnalité socialiste dont vous parlez a été victime de délinquants de droit commun.
Les hôtels sont pleins et las touristes se promènent sur les plages en costume de bain ou pour certains en bikini comme d’habitude.
Surtout j’ai été à la messe du 15 Aout à la Goulette quartier populaire,L’Eglise était pleine de fidèles débordant sur le parvis
comme on en trouve peu en France, sans le moindre opposant à l’horizon, les prêtres et les soeurs que j’ai interrogés ne sont aucunement opprimés.
La Tunisie n’est ni l’Egypte, ni la Lybie, ni la Syrie ni L’Irak.mais elle souffre d’un grave manque d’autorité étant sous un gouvernement provisoire chargé essentiellement d’établir une constitution et d’expédier les affaires courante d’où un manque de sécurité mais pas beaucoup plus grave que chez nous.Les Salafistes sont une extrême minorité mais très voyante et souvent composé de casseurs quand au parti majoritaire il est religieux mais essentiellement débordé par les évènements, très critiqué par la presse qui s’exprime librement et les radios que je peux lire et écouter car il y a toujours autant de journaux en Français dont deux très opposés au gouvernement : « Le Temps » et « La Presse ».et RTCI radio qui s’exprime en Français et très librement
Enfin Ben Ali n’est pas regretté surtout parce qu’il a pillé la Tunisie au profit de sa belle famille.
Quel est le devenir de la Tunisie? nul ne le sait exactement .Il faut attendre la nouvelle constitution mais la grande majorité et les femmes en générale qui manifestent à chaque fois qu’elles le jugent nécessaire ne sont pas prêtes à accepter n’importe quoi
Jean-Pierre Lussan
(A Lussan) Merci pour ces informations. Il y a en effet des résistances fortes – en Tunisie, et ailleurs, dans les mondes musulmans – qui montrent quelles sont les personnes à soutenir : par exemple, il y a peu, cette importante manifestation de femmes en Tunisie contre l’islamisation de la société. Il est regrettable, néammoins, que les extrêmistes mususlmans aient marqué des points partout, et partout renforcé considérablement leut pouvoir et la pression qu’ils exercent; et cela avec l’accord formel ou « l’inconscience qui laisse faire » de la part de beaucoup, ici…
Cher Jean-Paul Lussan
Si vous souhaitez nous souligner que la Tunisie n’a pas encore basculé dans l’islam fondamentaliste wahabite, nous le savons. Mais une tendance lourde s’est installée, dont les effets ne sont pas plus réduits que ce que nous observons en France. Loin de ce que Bourguiba rêvait de définitivement implanter dans son pays. En particulier n’ayons pas d’illusion sur la situation de la femme, elle rejoindra le statut de la femme musulmane. Pour ceux qui n’ont pas encore compris, parlez en à vos médecins. Il s’agit d’une des corporations les plus impliquées dans la société civile ; demandez leur comment la femme musulmane est traitée en consultation en cabinet de ville, ou à l’hôpital. Et en Tunisie Marzuki sera incapable de contrer cette évolution vers le fondamentalisme. Un signe ne trompe pas : sa tendance chronique à accuser la France de tous les maux. Un peu court mais rien d’autre à dire …
S’il s’agit de dénoncer les prédateurs auxquels la foule s’en est pris, et le clan de la famille de madame, vous avez raison de le rappeler mais sans oublier de dénoncer aussi l’incurie inexcusable des administrations françaises qui ont laissé s’installer cette double économie avec pillage du pays en toile de fond. C’étaient des Villepin, Chirac, Juppé, Kouchner, et l’on pourrait remonter à ceux qui ont installé Benali. Tout cela sous le nez de quelques grands ambassadeurs. Monsieur Yves Aubin de La Messuzière n’a pas ménagé sa peine sur toutes les ondes et dans la presse pour rappeler comment l’administration centrale a été en permanence alerté, jusqu’à la catastrophe finale.
Et je vous assure que personne ne fait d’approche simpliste. Des agressions et des destructions seront toujours traitées comme du droit commun. Pas de revendication au nom d’Allah, le miséricordieux …
Je suis finalement d’accord avec Jean – louis Faure , mais il faut tout faire pour aider ce pays à vaincre l’islamisme et c’est encore possible mais c’est de Tunisie que doit venir l’effort essentiel.
J.P.Lussan
Le regain actuel d’islamisme, dont on parle tant aujourd’hui et qui stimule tant les fantasmes de ceux qui ne connaissent à peu près rien du sujet, est d’abord un phénomène politique, ainsi qu’en témoignent les revendications de ceux qui s’en réclament.C’est un « produit » politique libellé dans une terminologie religieuse.
Résultant de l’échec historique des mouvements nationalistes laïcs dans le monde arabe, échec auquel ont puissamment contribué les Etats-Unis d’Amérique à l’époque de la guerre froide, il est avant tout entretenu par des problèmes politiques non résolus, et appelle à ce titre une solution politique.
Plus généralement, il témoigne, non pas tant d’une hostilité envers la modernité que d’une frustration née de la difficulté d’y participer. Il est une réponse violente au défi global lancé par l’appropriation des instruments de la modernité, qui revient bien
souvent à moderniser sous couvert de contester la modernisation.
Les fondamentalistes musulmans se réclament d’une tradition, alors même qu’ils sont contraints de la reconstruire ou de la réinventer et que le véritable moteur de leur action est, là comme ailleurs, la conviction personnelle.
Paradoxalement, les fondamentalistes travaillent à la sortie de la religion dont ils s’efforcent désespérément de restaurer le règne.
C’est toujours présomptueux et méprisant de dénigrer les connaissances d’autrui surtout sur un forum où les contributions sont par nature anonymes. Mais la critique tourne au grotesque quand votre propre intervention est truffée de clichés particulièrement flous. Utilisant des notions qui n’ont aucune signification en terre d’islam, telle la laïcité (d’ailleurs péniblement limitée à la France, à Gambetta et à ses républicains, illisible dans tout autre pays …, mais vaste sujet). La France est riche de savants orientalistes, de Gardet à Jomier en passant par Massignon et Dermenghem. Pour ma part je n’utilise jamais le mot “islamisme” qui n’a aucun sens précis, et autant d’interprétations que d’auteurs qui l’emploient. Le nationalisme arabe ne s’est jamais écarté du Livre fondant leur civilisation, et l’on ne sache pas que Nasser ait persécuté l’université Al-Azhar. De même que les pétro monarchies n’ont jamais hésité à aider les finances de pays en faillite (Egypte).
Pour au moins deux pays (la Tunisie et l’Egypte), la question cruciale est une économie qui ne parvient plus à maintenir sa population au seuil de pauvreté (norme ONU, 2 USD / jour). Votre question de la modernité est donc incongrue.
Politique ? Les tentatives d’imperium de la bannière étoilée (et pour moi ce ne sont rien d’autre que des tentatives sans lendemain, sur une échelle de temps historique) sont ressenties comme une agression généralisée et paranoïaque contre l’islam, et le monde arabo-persique.
La France avait une position privilégiée et s’est fait sortir. Quand les émeutes sont devenues incontrôlables contre Ben Ali, le premier geste du chef d’Etat Major des armées tunisiennes a été de prendre ses consignes auprès de mme Clinton … Insupportable quand on pense aux liens historiques entre la Tunisie et la France. Reste une plaque au col vosgien du Honeck, rappelant le sacrifice du 4ème Régiment de Tirailleurs Tunisiens (le Sidi Brahim des neiges), en Décembre 1944.
Lussan a raison de souligner qu’il n’y a aucune unicité de motivations à travers le mouvement de foules, de la Tunisie au Yémen, en passant par l’Egypte et Bahrein depuis Décembre 2010 (et on peut ajouter des traitements médiatiques adaptés au seuls intérêts de la bannière étoilée). Le seul dénominateur commun est bien le Coran.
Et je ne comprends toujours pas ce que vous mettez derrière le mot “modernité”. Pas possible de comprendre les Balkans sans relire Thucydide …
Quant à voir « des fondamentalistes travailler à la sortie de la religion », vous allez faire rigoler.
@ Jean Louis FAURE
Je ne méprise personne et surtout pas vos commentaires souvent excellents.
Je voudrais insiter sur le prétendu « retour du fondamentalisme », qui n’est à mon sens, qu’un symptôme parmi bien d’autres de la crise identitaire qui caractérise notre époque. Il joue avant tout le rôle d’un marqueur identitaire pour des populations qui ne parviennent pas à trouver leur place dans la société.
Ce n’est tant le religieux qui fait retour en tel que tel, mais l’exigence identitaire qui se dote d’un habillage religieux, moins d’ailleurs pour faire sécession, ainsi qu’on le croit trop souvent, mais bien plutôt dans l’espoir de se faire reconnaître comme composante à part entière de la mondialisation.
Un ouvrage, bien plus formidable, que tous les autres de Benoist-Méchin, ce sont ses mémoires réédités il y a peu. Une merveille tant dans le fond que dans le forme. Pour ma part, grand admirateur d’Alexandre le Grand, j’avoue un faible pour sa biographie de l’Achille macédonien.
Jean Louis FAURE et de Wargny ont eu, je crois, bien raison d’évoquer la vie et l’œuvre de Jacques Benoist-Méchin, à propos des prétendus « printemps arabes » et à propos de l’Islam. Je l’avais, moi aussi, cité, dans ces commentaires, à d’autres occasions.
Les puristes d’Action française s’en étonneront peut-être, Benoist-Méchin ayant suivi, dans les années d’après la Grande Guerre et, naturellement, entre 1939 et 1944, une voie bien différente, sans-doute utopique, de celle de Maurras. Est-ce d’ailleurs si sûr ? La formule de Bainville, à propos du traité de Versailles, n’est, en effet, pas univoque : « trop dur pour ce qu’il a de mou et trop mou pour ce qu’il a de dur ».
Après 1918, Benoist-Méchin eût voulu une politique de rapprochement franco-allemand. Celle, au fond, que De Gaulle et Adenauer ont faite 40 ans plus tard. Il pensait qu’une France victorieuse aurait dû en avoir l’initiative. Dans l’extraordinaire récit qu’il fera, dans ses Mémoires, de l’entrevue franco-allemande de Berchtesgaden, le 11 mai 1941, il raconte comment, se trouvant seul avec Hitler, à la fin des entretiens, il eut un instant l’idée de lui proposer une même politique de rapprochement franco-allemand, dont, cette fois-ci, l’Allemagne victorieuse aurait eu l’initiative… Hitler voudrait-il réaliser ce que la France de 1918 n’avait pas, selon lui, su faire ? Idée folle, sans-doute, que le simple regard du Führer, finalement, ne lui permit pas d’exprimer…
Mais, dans l’entre-deux-guerres, Benoist-Méchin avait écrit son Histoire de l’Armée Allemande qui fera autorité et que De Gaulle, en 1944, fera réimprimer pour l’Ecole de Guerre, alors que son auteur venait d’être condamné à mort pour collaboration. Cette étude monumentale sur l’armée allemande avait aussi pour but d’inciter les autorités françaises à armer la nation. On sait ce qu’il en a été.
Artiste, musicien, poète, grand styliste, Benoist-Méchin était aussi un puissant observateur, un grand connaisseur des peuples, de leur Histoire, de leurs dirigeants, de leur géographie, de leurs forces et de leurs faiblesses. Il a été, comme son père, mais en un sens bien différent, un grand voyageur. Il a vécu quelques uns des grands moments de l’histoire contemporaine, s’est entretenu avec nombre de Chefs d’Etat, a traité avec eux des grands problèmes de ce monde. Il est, parfois, devenu leur ami et leur conseiller. Il a fait de ces expériences d’extraordinaires récits, dans les livres que Jean Louis FAURE et de Wargny ont évoqués.
Soit dit en passant, pour conclure et revenir au sujet initial, si l’on veut comprendre vraiment le monde arabe et l’Islam en général, il est beaucoup plus utile de relire Benoist-Méchin que des idéologues en chambre, seulement capables de disserter à l’infini, dans l’abstrait, de ce qu’ils ne connaissent pas ni ne comprennent vraiment.
Merci donc à Jean Louis FAURE et de Wargny. En toute amitié d’esprit.
Vous avez comme à votre habitude une vision téléologique de l’histoire.
Vous vous contentez de camper sur des positions inamovibles, presque anhistoriques. Vous ne cessez de militer pour la « vérité politique » sans voir que la politique n’est pas seulement affaire de principes, et que la « vérité » en politique caractérise avant tout une réponse appropriée, non seulement aux »principes », mais à des circonstances social-historiques nécessairement changeantes.
Pour revenir à notre sujet, je citerais la dialectique du maître et de l’esclave : les deux rôles s’échangent inéluctablement. Qui a colonisé ne saurait s’étonner d’être envahi à son tour. Qui détruit l’identité d’un autre ne renforce pas la sienne, mais la rend plus vulnérable, plus menacée encore dans un monde qui a perdu un peu plus de sa diversité.
On ne retrouvera pas la fraternité dans une société où chacun a pour seul but de mieux « réussir » que ses voisins. On ne restituera pas le vouloir vivre-ensemble en faisant appel à la xénophobie, c’est-à-dire à une détestation de principe de l’Autre qui, de proche en proche, finit par s’étendre à tout un chacun. Parce qu’elle est chose commune, l’appartenance ne saurait se réduire à un seul point de vue.
Et vous, vous avez comme à votre habitude un discours abscond.
De belles phrases, un bel emballage, mais vide de sens. J’ai du mal à suivre le flou de votre pensée. Qui êtes-vous donc ? Et que pensez-vous réellement ? Le savez-vous vous-même, vous qui avez besoin de vous dissimuler derrière un pseudo finalement assez révélateur de votre état d’esprit ? Baphomet, un des symboles de l’Hermétisme. Ceci explique cela.
Quant à nous reprocher une approche téléologique, c’est un argument bien souvent employé par l’athéisme militant.
Cela explique aussi la difficulté d’entretenir une discussion avec vous car il semblerait ainsi que, peu à peu, se dessine votre profil : athée et franc-maçon, ou, au moins, proche des thèses de cette confrérie à qui vous empruntez sa phraséologie. Non ?
Il est possible que le dernier commentaire de Baphomet veuille répondre au mien. Dans ce cas, il m’est incompréhensible.
Primo, j’ignore tout à fait si l’Histoire, dans le temps long, obéit – ou non – à une quelconque téléologie, même si, en effet, il me semble qu’il existe une physique sociale, dont les lois peuvent être considérées comme relativement stables. Il n’en résulte, me semble-t-il, aucune nécessité historique de type « téléologique ». De ce point de vue là, nous sommes dans le flou et le confus.
Cela dit, que les circonstances sociales ou historiques soient changeantes est une évidence qui, à mon sens, ne change rien, en elles-mêmes, aux lois d’une physique sociale, si l’on en accepte l’existence; au contraire.
Encore faut-il observer les situations et les caractéristiques du temps où l’on vit avec réalisme, méthode et sens du concret. Non pas avec de simples « raisonnements » sortant les uns des autres comme on enfile des perles. Et c’est pourquoi je me suis félicité que Jacques Benoist-Méchin ait fait, ici, l’objet de plusieurs commentaires, à propos des « printemps arabes » et de l’Islam.
En effet, Benoist-Méchin connaissait le monde arabe et l’Islam en profondeur. Il les connaissait d’expérience et non en « théorie », comme il a été dit par moi et les autres. Si l’on peut faire un reproche à ses analyses, à ses livres, les concernant, ce serait peut-être, au contraire de ce que présuppose Baphomet, de les avoir trop aimés, d’avoir conçu, à leur endroit, une trop violente passion. Au point d’avoir été, au moins en partie, l’un des inspirateurs de ce que l’on a appelé la politique arabe de la France, sous De Gaule, Pompidou, Jobert … Politique, à mon sens, malheureusement abandonnée par leurs successeurs au profit d’une politique plus liée à celle des Etats-Unis et d’Israël.
S’il est un historien, un intellectuel qui ne nourrissait aucune détestation de principe de l’Autre, qui avait même, peut-être, le défaut inverse; quelqu’un que l’identité d’autrui attirait spontanément, qui refusait un monde qui aurait perdu sa diversité, c’est bien Jacques Benoist-Méchin, objet de mon commentaire à la suite des autres sur cet auteur.
L’interprétation qu’en donne Baphomet est donc un pur contre-sens.
J’ajoute que le respect de l’identité d’autrui vaut aussi, bien évidemment, pour la nôtre. Et que la fusion – ou confusion – d’identités trop différentes est justement contraire à la diversité du monde. Au sens plein, leur métissage aussi.
Quant à distinguer « identité » et « religion » cela n’a aucun sens pour un musulman qui se définit avant tout, essentiellement, et en tout, comme un « croyant ». C’est cela, pour lui, son identité, individuelle (si l’on peut dire), sociale, politique, culturelle, etc.. Inutile de plaquer sur lui les schémas habituels pour nous. C’est de peu d’effet.
C’est pour quoi, sans vouloir peiner nos amis Français d’Algérie, ou d’ailleurs, je rappellerai, pour conclure ma participation à ce débat, le scepticisme de Maurras lui-même à l’idée d’assimiler des masses de civilisation aussi différente de la nôtre.
Je cite :
« L’assimilation est-elle possible dans tous les cas ? Des nègres venus d’Afrique, transportés aux Antilles, entrés dans les plantations des Blancs et devenus ainsi, peu à peu, par l’école, par l’Eglise, par la vie commune, membres d’une famille européenne, au sens large du mot, ont reçu aisément l’assimilation historique dont parle M. René Boisneuf (député de la Guadeloupe qui demandait l’assimilation des indigènes).
Le même procédé est-il applicable quand une poignée de colons militaires et civils débarque dans un vaste pays comme Madagascar ou l’Indochine, pour ne pas citer l’Algérie et le Maroc ? Est-ce que l’assimilation y est seulement concevable ? Est-il sage de vouloir substituer de fond en comble notre civilisation à des états sociaux aussi avancés ou, si l’on veut, aussi déterminés que ceux de l’Extrême-Orient ou de l’Afrique du Nord ? Il y a des points du monde où de grandes races sont, en quelque sorte, nouées. On peut y introduire certaines institutions et coutumes occidentales ou superposer au fond des sentiments et des idées certaines nouveautés d’utilité indubitable, d’usage immédiat. Mais peut-on tenter autre chose que cette association discrète et féconde ? Je serais bien surpris que M. René Boisneuf nous le démontrât et je ne serais pas enchanté, car enfin où passerait la variété de notre pauvre monde et quelle affreuse monotonie submergerait tout ! (Action Française, 23 décembre 1922).
@baphomet
D’une manière générale l’usage d’ésotérisme et du vocabulaire abscons qui l’accompagne, comme le remarque Yves très justement, est un moyen éculé de camoufler une cruelle carence de connaissances. C’est vrai pour tous ces pseudo philosophes produits d’une Normale Sup usée et dégénérée, désormais largement déconsidérée mais qui imprime hélas sa fausse science au reste de l’université. Sortir la pierre philosophale, faire chauffer la cornue de Johan et Pirlouit pour parler de l’islam a quelque chose de quasi puéril. Pour consolider l’hermétisme, un usage immodéré de néologismes (j’ai vainement cherché le mot anhistorique dans mon Petit Robert … édition trop ancienne ?). Il se trouve qu’il n’y a nul besoin de tous ces ustensiles de grand sorcier pour découvrir l’islam pour ceux qui ne le connaissent pas, ou pour approfondir les connaissances pour ceux qui ont vécu au contact du monde arabo-persique. Il n’est pas prévu qu’il se réforme, et qu’une convergence s’installe avec d’autres religions et philosophies, nous le subissons tous les jours en France. Et partant restons en à étudier et à comprendre ce qu’il est. Loin de chimères.
A l’attention de « Yves » qui me fait un procès d’intention et m’accuse de conspiration maçonnique, je citerai Raoul Girardet qui écrit dans son livre » Mythes et Mythologie politique »: « L’ordre que l’Autre est accusé de vouloir instaurer ne peut-il être considéré comme l’équivalent antithétique de celui qu’on désire soi-même mettre en place ? Le pouvoir que l’on prête à l’ennemi n’est-il pas de même nature que celui qu’on rêve de posséder ? ».
Dans le domaine du discours ou de la pratique politique, je rappellerai à jean Louis Faure, que le procès d’intention consiste généralement à faire dire à un individu ce qu’il ne dit précisément pas. La méthode employée relève du soupçon systématique et de la recherche policière du « non-dit ». Elle implique elle aussi un décodage. Devant le texte à « décoder », on partira de l’idée que, si le texte dit quelque chose, en réalité il veut dire autre chose.
On attribuera à son auteur une stratégie de recours à la « subtilité lexicale ». On cherchera les idées « réelles », sous-jacentes, auxquelles sont censés renvoyer subtilement les mots « apparents », grâce à tout un système de correspondances dont le « décodeur » s’attribue bien entendu le secret. On dira alors qu’il suffit pour comprendre ce qu’il en est de » savoir lire », de » savoir lire entre les lignes », de « savoir lire au-delà des mots » —autrement dit de savoir lire autre chose que ce qui est écrit.
Toutes les hypothèses deviennent dès lors envisageables, sauf bien entendu celle de la sincérité de l’énonciateur, lequel ne peut être qu’un dissimulateur, puisqu’il ne dit pas franchement ce qu’on voudrait qu’il dise.
Je ne peux que vous souhaitez que vous vous compreniez ! Le reste est sans importance …Echanges sans intérêts.
la Tunisie, où, peu de ceux qui écrivent et analysent sans comprendre ce peuple, parce qu’ils n’y ont jamais vécu comme certains sur quatre générations, était un pays libre de pratiquer ses coutumes à l’époque.
après c’est une autre histoire,
aujourd’hui,
c’est à eux de choisir sans influence aucune et de redevenir eux-mêmes.
Je sais que ce n’est ni conforme ni souhaitable de reproduire des textes en anglais sur ce site, mais parlant des évènements du monde arabo-persique, il est impossible de ne pas faire un détour vers les propos des anglo-américains. Vu dans le quotidien britannique « The Independent », un papier de leur correspondant Robert Fisk, fixé à Beyrouth. De très loin l’un des meilleurs connaisseurs de cette région jusqu’à l’Afghanistan. Fisk rapporte l’entretien avec le ministre des Affaires Etrangères syrien, Walid Muallem, jamais rencontré par personne depuis le début de la crise (plus d’un an), ce qui en dit long sur le verrouillage de l’information, de pair avec l’intoxication de masse organisés sur les bords du Potomac. Situation qui n’a jamais gêné le maire de Bordeaux. Et s’agissant de la Tunisie, Muallem croise le chef du parti tunisien Ennahda à l’entrée d’une réunion de la Ligue Arabe. Il apprend ainsi que l’Emir du Qatar a versé 150 millions USD pour la campagne électorale de ces grands démocrates … Comme nous le dit très justement Jacqueline, il faut laisser la Tunisie à l’écart de toute influence étrangère pour qu’ils redeviennent eux-mêmes. Mais néanmoins en tenant compte, comme dans la Ferme des Animaux, qu’il y a des influences plus égales que d’autres !
http://www.independent.co.uk/news/world/middle-east/exclusive-we-believe-that-the-usa-is-the-major-player-against-syria-and-the-rest-are-its-instruments-8082457.html
Contrairement à ce qu’en pensent certains, les islamistes n’ont pas été à la pointe des mouvements de révolte dans les pays arabes. Certes, dans les sociétés arabes, l’affirmation identitaire reste profondément liée à la pratique religieuse et à la dimension sociale de l’islam. Mais c’est à un islam différent qu’elles se réfèrent désormais. Un islam délivré du vocabulaire halluciné du djihadisme comme du littéralisme wahhabite. La nouvelle génération veut moins un islam politique qu’une islamisation conservatrice de la société. Elle reste fermement musulmane, mais elle a aussi constaté l’échec du néofondamentalisme, que ce soit en Arabie séoudite ou en Iran.
Toute la question, maintenant, est donc de savoir comment les mouvements actuels pourront résister aux récupérations de toutes sortes. « On osa jusqu’à la fin, parce qu’on avait osé d’abord », disait Saint-Just à propos de la Révolution de 1789. Mais les révolutionnaires français savaient au moins ce qu’ils voulaient. L’anonyme « printemps arabe », qui n’a pour l’instant fait émerger aucune idée neuve, aucune figure capable de remplir le vide du pouvoir, aucune classe intellectuelle capable de théoriser ses aspirations, osera-t-il « jusqu’à la fin »? Les révoltes permettront à de nouvelles générations d’accéder au pouvoir, pas forcément de
changer de régime.
Les Etats-Unis s’intéressent d’abord aux retombées du réveil arabe sur l’ordre géopolitique. Hosni Moubarak était, avec Israël, un pilier de leur politique régionale depuis trente ans. La Tunisie de Zine el-Abbidine Ben Ali leur était favorable, tout comme le régime
de Saleh au Yémen. Il s’agit maintenant pour eux de retrouver les moyens de contrôler la région, le problème étant de s’assurer que les nouvelles équipes dirigeantes ne remettront pas en cause leur alliance avec Washington, leur soutien aux accords de Camp David de 1978, ni leur opposition au régime de Téhéran.
Pour reconquérir la région, les Etats-Unis disposent de deux alliés de poids : Israël et l’Arabie séoudite (en particulier, chez les Séoudiens, les gérontocrates du clan Sudairi). Mais le pays-clé, c’est évidemment l’Egypte, le pays plus peuplé et l’épicentre stratégique du monde arabe. Que l’Egypte bascule dans un sens ou dans un autre, et toute la région en sera affectée. C’est ce dont s’inquiète Israël. L’Etat juif a longtemps pu compter avec le soutien de fait des deux grandes puissances régionales que sont l’Egypte et la Turquie. Mais la Turquie a viré de bord, et l’Egypte, dont l’avenir est incertain, pourrait bien succéder à l’Iran comme principale source de cauchemar pour les Israéliens.