Le Président a parlé à la presse. Que peut-on en espérer ? Pas grand-chose ou moins que rien. Pourquoi ? Parce qu’il y a de forts risques qu’il échoue dans ce qu’on aimerait lui voir réussir : la relance de la croissance et pour cela une « mobilisation de tous », ou une réforme territoriale heureuse. Et parce qu’il y a de gros risques qu’il mène à bien certaines réformes porteuses de nouvelles dérives : le projet sur la fin de vie, par exemple.
La crainte est donc double que l’Etat continue de faire mal ce qui est bien, et bien ce qui est mal. Autrement dit que les mêmes hommes, avec leurs mêmes référentiels idéologiques, soient toujours aussi inefficaces à servir la France et si malfaisants dans leurs projets sociétaux, et cela en dépit du « tournant » annoncé. Mais faut-il s’illusionner d’un tournant quand on est sur la mauvaise route et dans la mauvaise direction ?
Qu’est-ce que cette social-démocratie dont se revendique désormais le chef de l’Etat ? Le renoncement à des errements qui ont aggravé l’affaissement de la France ? A voir, mais il n’y a rien dans les annonces du chef de l’Etat qui le laisse présager. Faut-il y déceler la volonté de donner la priorité à la recherche du compromis entre partenaires sociaux, à la façon dont fonctionna longtemps le modèle allemand ? On verra bien, mais c’est sans compter sur des pratiques et des habitudes mentales qui en sont l’exact contraire. Comment ceux-là qui les ont toujours soutenues peuvent-ils être entendus quand ils exhortent à leur abandon ? Les égoïsmes particuliers, institutionnalisés par le substrat nominaliste de l’idéologie démocratique, ont sapé depuis belle lurette le concept même de Bien commun. De surcroît, qui pourrait, ici et maintenant, prétendre l’incarner ? Il y faudrait un chef d’Etat, pas un sectaire porté au pouvoir. Il y faudrait quelqu’un dont le devoir d’État ne soit pas saisi par le malsain calcul politicien des élections à venir. Faute de cet atout comment s’étonner que la nouvelle étiquette de social-démocrate déclenche, entre autres réactions négatives, des accusations de vouloir ratisser large électoralement ? Ce qui revient à distiller le venin du doute, de la méfiance, et à tuer dans l’oeuf l’appel à la mobilisation universelle. Surtout quand celui qui le profère est si personnellement disqualifié.
L’absence de fédérateur véritable au sommet de l’Etat fait également craindre l’échec en ce qui concerne la réforme des collectivités territoriales. Pourtant comment, a priori, ne pas saluer l’intention de revoir de façon plus rationnelle le découpage des régions tel qu’il fut conçu en 1972 ? Plus profondément la question d’une vraie décentralisation est un bon chantier. Encore faudrait-il qu’il ne soit pas exclusivement fondé sur des impératifs financiers, mais soit conçu comme une libération à l’égard des féodalités actuelles, partisanes et idéologiques. Au total, « les Républiques sous le roi » reste une formule qui n’a rien d’obsolète mais souligne la double nécessité de l’autorité en haut et des libertés en bas.
Jean-Pierre Chevènement, connu pour ses courageuses positions souverainistes vient cependant de formuler une idiotie monumentale : « Au-dessus de la droite et de la gauche, il y a la République, qui est le nom moderne de la France. C’est mon credo. » Pourtant il y aurait une façon juste de comprendre cette phrase. C’est en interprétant le mot République dans son sens étymologique, la res publica, la chose publique, la politique. Car la France, fille de la politique, ne pourra s’en sortir et survivre que par l’État. Mais lequel ? Comment concevoir une meilleure autorité étatique, forte en son domaine et consubstantiellement liée au Bien commun ?
Ces questions que posent sans interruption les besoins français peuvent trouver leur réponse dans la conception royale de l’Etat. Le Cercle Vauban examine cette alternative dans la brochure qu’il vient de publier. Elle s’intitule : Une espérance pour la France : la monarchie*. Dans son avant-propos, SAR le duc de Vendôme écrit : « Je suis convaincu de l’utilité d’une telle réflexion, non pour un avenir lointain et incertain, mais pour envisager dès maintenant la nécessaire amélioration de notre vie collective ». Cette nécessité ne procède pas fondamentalement de la médiocrité des hommes qui nous gouvernent. Elle s’impose par le délabrement du système institutionnel actuel.
Comme Jean Sévillia l’explique dans les conférences qu’il prononce partout en France en marge de la publication de son Histoire passionnée de la France, notre pays a toujours trouvé en lui-même les ressorts de ses sursauts. Ceux-ci ont été durables quand ils ont trouvé une traduction politique, c’est-à-dire institutionnelle. Un sursaut français est toujours possible. Prétendre le contraire est participer de la manoeuvre subversive de démoralisation des meilleurs. Mais tout ce qui ressemble à un réveil français doit aujourd’hui avoir la lucidité et le courage de regarder en face la question politique.
C’est par là que la France perd depuis trop longtemps. C’est par là qu’elle pourra gagner.
* Cercle Vauban : Une espérance pour la France : la monarchie, avant-propos du duc de Vendôme, éditions Regalia, 118 pages, 6 euros. Pour se procurer la plaquette : envoyer un chèque de 8 € (prix franco de port) à l’ordre de Regalia, au Cercle Vauban, 1 rue de Courcelles – 75008 Paris
Le premier sujet de la démocratie, il ne faut jamais cesser de le rappeler, c’est le peuple. Le point de départ de la politique démocratique, c’est le pouvoir instituant du peuple. La souveraineté démocratique n’est pas la souveraineté nationale, mais la souveraineté populaire.
La politique est aujourd’hui appelée à renaître à partir de la base, par une recomposition du lien social et une réanimation sans exclusive de la dimension politique du social, sous l’horizon de l’autonomie locale, de la démocratie participative, de la vie associative et communautaire, et du principe de subsidiarité.