Le délégué général du parti, Stanislas Guerini, a annoncé que cette candidate « ne sera pas soutenue par La République en marche », et a déclaré retirer son investiture. [Le Figaro du 11.05]. Confirmation : c’est de bien des façons et sur tous les terrains de la vie publique que la question migratoire est en train de faire éclater les institutions ou pseudo-institutions de la République. Les suites pourraient bien s’enchaîner les unes aux autres assez rapidement. Sur diverses pistes, le train est lancé, désormais. Décidément, le Kairos, les vents favorables, ont abandonné depuis longtemps le quinquennat d’Emmanuel Macron. Volens, nolens.
Par Pierre Lepelletier
C’est une photo qui a mis le feu aux poudres. Sur un visuel de campagne de La République en marche pour le canton de Montpellier 1 aux départementales, la candidate remplaçante, Sara Zemmahi, apparaît voilée. Rapidement, le cliché a circulé sur les réseaux sociaux lundi soir. Le vice-président du Rassemblement national, Jordan Bardella, s’est engouffré dans la brèche. « C’est cela la lutte contre le séparatisme Marlène Schiappa ? », a-t-il lancé.
Clarification nécessaire ou erreur stratégique ? Stanislas Guerini, le délégué général de La République en marche a jugé bon de faire une mise au point… en retweetant l’interpellation de Jordan Bardella. «Les valeurs portées par LREM ne sont pas compatibles avec le port ostentatoire de signes religieux sur un document de campagne électorale », a-t-il tenu à rappeler. Avant de lancer un avertissement : «Soit ces candidats changent leur photo, soit LREM leur retirera leur soutien. »
Si le tweet de Stanislas Guerini a été relayé par Marlène Schiappa, ministre chargée de la Citoyenneté, il a surtout soulevé une bronca au sein de l’aile gauche de la majorité. « L’extrême droite ne doit pas dicter notre agenda politique, et encore moins les règles électorales. Aucun texte de loi n’interdit le port des signes religieux dans une campagne électorale ou lors d’un mandat », a par exemple souligné mardi matin Cécile Rilhac, députée LREM du Val-d’Oise.
« Je suis en désaccord total avec ces propos tant sur le fond que la forme. La légalité et la liberté de conscience prévalent. Les électeurs disposent », a martelé son collègue, Sacha Houlié. « Quant à relayer un cadre du FN, c’est injustifiable. Ce parti, leurs opinions, leurs dirigeants, je les combats », a également affirmé le porte-parole du groupe LREM à l’Assemblée. Ce dernier a même réclamé, auprès de Libération , la démission de Stanislas Guerini.
Après avoir soutenu le délégué général en likant son tweet, le porte-parole Roland Lescure a, lui, semblé faire machine arrière. Le député a en effet reconnu que « retweeter Bardella était sans doute maladroit de notre part car donnant l’impression qu’on réagissait suite à son interpellation ».
Guérini persiste et signe
Malgré les critiques, Stanislas Guérini a campé sur ses positions, ce mardi sur RTL. «Je dis les choses très clairement. Avec les instances dirigeantes du parti, je fixe une ligne politique. On ne remet pas en cause le droit. Mais la loi dit aussi que les mouvements politiques peuvent décider du soutien apporté à leurs candidats. Notre mouvement politique considère que les signes religieux n’ont pas leur place sur une affiche de campagne dans le cadre d’une campagne électorale», a-t-il précisé, annonçant que cette candidate «ne sera pas soutenue par La République en marche» et déclarant retirer son investiture.
Même son de cloche du côté de Gabriel Attal. Interrogé mardi matin sur France Inter, le porte-parole du gouvernement a indiqué que LREM ne souhaitait pas «présenter un candidat avec un signe ostensible religieux». «C’est une question de choix politique», a développé le porte-parole du gouvernement sur les ondes de la radio publique.
Angle mort
Ces péripéties sont révélatrices : elles prouvent que la question de la laïcité reste un éternel angle mort pour La République en marche tant les positions peuvent varier d’un parlementaire à l’autre. Pour calmer le jeu, Christophe Castaner a voulu rappeler la ligne du mouvement mardi matin lors d’une réunion de la majorité. « Quand on est candidat au nom d’un parti politique, on est un candidat qui rassemble et qui ne doit jamais imposer son choix religieux », a affirmé le président du groupe LREM à l’Assemblée nationale.
Les candidats montpelliérains ont finalement retiré le visuel des réseaux sociaux. « Je suis choqué par cette réaction. On respecte la loi sur la laïcité », a reconnu mardi Mahfoud Benali, candidat titulaire, à Midi Libre. « Pour nous, c’est un non-sujet et beaucoup de gens nous suivent. Y compris des Marcheurs ». ■