Cet article intéressant et qui rejoint beaucoup d’analyses est paru sur le site Contrepoints : on peut être libéral et raisonner avec réalisme et bon sens. Il nous semble que c’est le cas de cet éditorial en date du 12 mai. Evidemment, sujet à débat. On sait que l’inflation modérée n’est pas nécessairement un mal. Galopante et incontrôlée, l’Histoire nous enseigne ses effets désastreux. En la matière comme en d’autres, dosis facit venenum. Point de dogme en ce domaine : c’est la dose qui fait le poison. Or, au vu des quantités hors normes de liquidités déversées par les banques centrales à travers le monde entier, on peut craindre que la dose sera du même ordre.
Payer les gens à rester chez eux et distribuer des chèques d’argent des autres est la recette assurée pour la croissance, c’est connu !
Par h16.
La pandémie aura eu au moins le mérite d’occuper les esprits : on compte les morts, puis les infectés, puis les cas contact, puis les variants, les doses de vaccin et les vaccinés, avant de bientôt passer aux petits passeports vexatoires de preuve de bonne santé. Au moins pendant ce temps-là on ne compte pas les petits soucis qui pourraient se poser du côté économique.
C’est quelque peu dommage surtout si l’on considère que pour être en bonne santé, il vaut mieux une économie saine : ceux qui ne peuvent plus se déplacer, puis travailler, puis qui n’ont plus d’endroit pour dormir, ne mangent pas à leur faim finissent par avoir des petits soucis de santé, celle-là même que les énergiques gesticulations gouvernementales entendent pourtant tout faire pour conserver au plus grand nombre, quoi qu’il en coûte et tralalilalère.
Force est de constater qu’empêcher les activités économiques de reprendre finit par avoir un impact négatif sur tout le reste. Et compenser la misère provoquée par une distribution magique d’argent sorti directement de l’arrière-train des licornes keynésiennes n’est pas réellement une bonne idée, même si les escrocs actuellement en charge des banques centrales tentent de nous convaincre du contraire.
Les signes s’accumulent de diverses tensions sur le marché, qui ne pointent guère vers une résolution des problèmes posés de façon rapide, à l’amiable et dans la bonne humeur. Eh oui, à force d’intervenir sur les marchés, en bousculant franchement les chaînes logistiques dans une économie mondialisée en flux tendus, on aboutit à des déséquilibres parfois gênants.
Par exemple, l’actuelle pénurie de composants électroniques dont on a pu entendre discrètement parler dans quelques médias a fini par toucher l’industrie automobile, gourmande de ces composants à mesure que les voitures en embarquent de plus en plus : pousser tout le monde au télétravail résulte inévitablement en un gonflement massif de la demande en matériel électronique apte à permettre ce nouveau mode de travail. Renouvellement des écrans, des ordinateurs, extension majeure des centres de données partout dans le monde, multiplication de l’usage du commerce en ligne pour éviter les déplacements inutiles, tabassage fiscal du conducteur automobile… Autant d’éléments qui, mis bout à bout, impliquent une réorganisation très rapide des chaînes de production d’électronique et une remise en question de l’importance des voitures dans le monde.
Ce qui aurait probablement pris une ou deux décennies a été compressé en quelques mois et il était inévitable que quelques effets de bords apparaissent ; au moins la France, dont l’industrialisation était déjà en berne, ne souffrira plus trop de la mort lente de ses constructeurs automobiles, écrabouillés entre les problèmes logistiques, la culpabilisation incessante des automobilistes et le poids des charges sociales du premier pays de taxation au monde.
Par exemple, il y a aussi l’actuelle tension observée sur les matériaux de construction dans le secteur du bâtiment, que certains expliquent par les politiques américaines (oh, regardez, c’est encore la faute de Trump !) de protectionnisme sur le bois canadien (mais pas certaines manœuvres plus calculées d’un petit nombre de firmes) qui entraîne un réapprovisionnement des industriels américains du secteur vers l’Europe, provoquant une pénurie locale et une hausse marquée des prix.
En réalité, on découvre progressivement différentes pénuries de matériaux (béton, métallurgie, adhésifs, verre) qui se traduisent toutes par une hausse des prix : des vitrages en hausse de 30 %, des prix qui montent de 10 à 40 % sur l’aluminium, le cuivre, le laiton, l’acier, le zinc… À tel point que le gouvernement commence à éprouver quelques moiteurs sur les commandes publiques, dont on pressent qu’elles vont pourtant continuer bon train, youkaïdi, youkaïda, c’est l’État qui paie (en retard).
À ces hausses de prix des matières premières, on peut aussi ajouter une hausse des prix des biens alimentaires : encore modeste, elle n’en est pas moins présente et commence à se faire sentir progressivement sur un nombre croissant de biens de consommation courante. Pour le moment, on parle d’une hausse timide de 2 %, mais le détail de certains produits (lait, céréales, huiles) ne laissent guère de doute sur la direction générale prise par les prix dans les prochains mois : ne vous attendez pas à faire d’économie sur la nourriture…
Eh oui : de façon réellement surprenante, les masses réellement colossales d’argent qui ont été injectées dans le système monétaire mondial depuis la crise de 2008 commencent à perfuser un peu partout.
La crise sanitaire, véritable opportunité pour un paquet d’idiots utiles et de politiciens incompétents trop heureux de l’utiliser pour augmenter leurs pouvoirs, commence maintenant à présenter la facture, la vraie, pas celle que les clowns à roulettes s’imaginaient payer les mois passés à coups de distribution d’argent des autres, de facilités de paiements et autres couvertures sociales plus ou moins bidon. Cette facture réelle se traduit par des prix en hausse, un pouvoir d’achat qui stagne, une augmentation des faillites et du chômage : payer les gens pour rester chez eux veut dire qu’à la fin, le travail n’est pas fait et, au bout, une demande n’est pas satisfaite…
Et l’inflation qui arrive ressemble fort à ce moment délicat où l’on entend le barrage qui grince et qui craque, qu’on le voit se fendiller et se lézarder rapidement : cela fait des années que sont accumulées de façon obscène des dettes monstrueuses, que l’argent gratuit des autres est distribuée à des industries et des secteurs manifestement peu ou pas rentables, que le dépensier est favorisé sans vergogne par rapport à celui qui épargne, que le capitalisme de connivence est dorloté au détriment du capitalisme naturel. Il semble inévitable que les montants ainsi gonflés et mal alloués finissent un jour par se déverser dans toute l’économie, noyant les uns et les autres dans des liquidités rapidement devenues sans valeur.
La hausse de l’immobilier (par ailleurs assez mal reprise dans les calculs statistiques de l’inflation, minimisant cette dernière), la hausse du prix de l’or, l’irrationalité des marchés boursiers (Gamestop ou Tesla étant des illustrations frappantes), la hausse récente mais symptomatique des cryptomonnaies, tout pointe vers une unique direction : l’inflation revient, et elle n’est pas contente.
Et au fait, c’est exactement la même équipe de clowns qui a géré l’actuelle crise sanitaire qui devra gérer la crise inflationniste qui nous pend au nez. Rassurant, n’est-ce pas ? ■