Il nous est arrivé d’exprimer notre désaccord avec les orientations actuelles de l’Eglise catholique en certains domaines politiques précis. Précis et de grande importance pour l’avenir de nos sociétés. Par exemple, en matière d’immigration. Par exemple, encore, sur la vision qu’a l’Eglise de la mondialisation. Orientations, analyses, exhortations qui, parfois, nous sont apparues comme de dangereuses illusions. Dangereuses, en tout cas, pour notre pays et notre civilisation – ou ce qu’il en reste.
Y-a-t-il aussi, dans la mouvance catholique, tout près du Saint-Siège, tout près du Pape, des cercles d’influence, des communautés, des institutions, des intelligences, en qui l’on puisse reconnaître réalisme, lucidité, sagesse politiques, ampleur des vues et des idées ? Sans aucun doute si l’on se réfère à l’exemple de ce colloque, organisé au Collège des Bernardins et régulièrement diffusé par KTO, la chaîne de télévision catholique. On l’aura compris, il s’agit en grande partie de géopolitique.
La vidéo est longue; elle dure 1h40. Mais elle nous paraît importante. Et tous ceux que la réflexion géopolitique passionne devraient l’écouter avec intérêt et, même, avec un vrai plaisir.
Une recommandation, un souhait : que l’on ne se hasarde pas à écrire un commentaire sans l’avoir écoutée ! Les idées générales – toujours les mêmes – devraient céder la place, en l’occurrence, à la réflexion que peut susciter chez nous tous, les analyses réalistes et lucides de ce remarquable colloque.
Nous signalerons, en particulier, les interventions de Lucio Caracciolo, directeur de la revue italienne Limes et celle de Jean-David Levitte, ambassadeur de France, membre de l’Académie des Sciences morales et politiques, l’une et l’autre empreintes, à notre avis, d’une remarquable lucidité. •
Lafautearousseau
Diffusé le 08.07.2014 – Durée 100 mn
La géopolitique de la globalisation. Etat des lieux, Lucio Caracciolo, directeur de la revue Limes ; un monde en transition accélérée mais sans pilote, Jean-David Levitte, ambassadeur de France, membre de l’Académie des Sciences morales et politiques ; Que peut-on faire ? Quel chemin pour l’Europe dans la globalisation ?, Mario Giro, sous-secrétaire d’État aux affaires étrangères du gouvernement Matteo Renzi. Répondant : Andrea Riccardi, ancien ministre italien, fondateur de la Communauté de Sant’Egidio ; Modérateur: Antoine de Romanet, codirecteur du département Société Liberté Paix, Collège des Bernardins.
Très intéressante et instructive, cette conférence a le mérite de poser les bonnes questions et d’apporter des réponses originales à un phénomène qui constitue désormais le cadre de notre histoire présente. En effet, se déclarer « contre la globalisation » n’a aujourd’hui plus beaucoup de sens. On peut en revanche l’étudier et tenter d’agir sur ses formes et son contenu.
A l’époque de la guerre froide, il existait une frontière entre le monde communiste et ce qu’on appelait alors, audacieusement, le « monde libre ». Aujourd’hui, il n’y a plus de frontière. Les informations, les programmes, les flux financiers, les marchandises, les hommes eux-mêmes, circulent de plus en plus librement d’un pays à l’autre ou se distribuent simultanément dans tous les pays. A l’intérieur de chaque pays, la distinction entre l’intérieur et l’extérieur ne correspond plus à rien.
Dans une telle perspective, il faut se garder de commettre un certain nombre d’erreurs. L’une d’elles serait de croire qu’il est encore possible d’échapper aux effets de la globalisation en se repliant sur soi, en en appelant au maintien des identités dans un sens purement ethnocentrique. La « logique du bunker » n’est plus viable aujourd’hui, précisément parce que nous sommes dans un monde où tout retentit sur tout. Se désintéresser de ce qui se passe ailleurs, en croyant que cela ne nous concerne pas, empêche de voir que précisément cela nous concerne.