Dans Le Monde du 4 juin 2008, il n’avait pas craint d’écrire: « Ce qui fait fondamentalement l’unité de l’Algérie, en effet, c’est son islamité. Là demeure l’identité profonde de son peuple (merci pour les six cents ans de christianisme romain ! ndlr).….
L’urgence se fait sentir d’une réflexion sereine sur la légitimité, ou non, du prosélytisme chrétien en terre d’islam. Car si l’on ne peut que défendre le droit de chaque individu à aller librement vers la foi de son choix, en revanche il peut paraître moins sûr que soient permises les tentatives de ramener à soi, par des techniques diverses, des hommes et des femmes appartenant à la foi musulmane. »…..
L’Évangile, certes, demande aux chrétiens d’annoncer le Christ, mais pas au prix du déchirement d’un peuple, pas au prix de l’engendrement de situations de violence. »
Ces propos ont suscité un nombre important de commentaires. Venant du cardinal Barbarin, les réserves n’ont pas tellement étonné. Ou de Monseigneur Hyppolyte Simon, évêque de Clermont (dont on peut lire la très intéressante réponse au père Delorme en cliquant sur ce lien: http://catholique-clermont.cef.fr/article.php3?id_article=1641). Elles ont, par contre, été plus surprenantes venant du pasteur Claude Baty (président de la Fédération protestante de France) et, surtout, de notre excellent ennemi Philippe Val (directeur de Charlie Hebdo) qui en a parlé dans sa chronique sur France Inter….
On retiendra, ici, trois aspects des propos du père Delorme.
Le premier, presq’uniquement religieux, tient à l’affirmation de l’islamité comme « identité profonde du peuple algérien ». Or ceci semblerait vouloir dire que, pour le père Delorme, la foi chrétienne n’a pas vocation à s’incarner (s’inculturer) dans toutes les cultures humaines. Surprenant, de la part d’un prêtre, et notoirement en contradiction avec la tradition bi-millénaire de l’Église, directement héritée de l’ordre reçu de Jésus-Christ lui-même (le dernier ordre qu’il ait laissé…) : « Allez, et de toutes les Nations faites des disciples…. » Le père Delorme se rend-il compte qu’en parlant comme il le fait il est « scandaleux », au sens propre du terme ?…..
Le deuxième est que le père Delorme semble accepter ( ! ) une évangélisation, à condition qu’elle ne se fasse pas « au prix du déchirement d’un peuple ». Là aussi, il contredit directement les enseignements de Celui qu’il devrait en théorie servir: Jésus n’a-t-il pas dit plusieurs fois qu’à cause de Lui les familles seraient déchirées, les frères s’opposant aux frères etc…. Le témoignage chrétien s’est toujours accompagné de contradictions. Et le père Delorme est donc, sur ce point aussi, objet de scandale…..
Le troisième est cette proposition -à proprement parler ahurissante…- d’une « réflexion sereine sur la légitimité, ou non, du prosélytisme chrétien en terre d’Islam ». Peut-il donc être conforme à la foi -c’est ce qu’il laisse entendre….- d’exclure par principe une catégorie d’êtres humains (ici les musulmans) de l’annonce évangélique ?
Dans cette étrange position, que l’on pourrait presque, en un certain sens et par moquerie, qualifier de « fixisme », on peut faire deux observations au père Delorme:
Premièrement, dans son raisonnement, laisse-t-il encore une place à la liberté individuelle, à la liberté des personnes (à la Liberté tout court…); et, au fond, laisse-t-il encore une place à l’Histoire ?…. Si on le comprend bien, dans le cas de ces populations musulmanes auxquelles il fait référence, aucun évènement extérieur ne peut plus, ni ne doit plus venir changer en rien un cours des choses fixé une fois pour toutes, une « islamité pour toujours » ? N’invente-t-il pas, là, une sorte de nouveau concept: les marxistes parlaient de sens de l’Histoire, lui raisonne en termes de congélation, de pétrification de l’Histoire : est-ce bien raisonnable ?
Deuxièmement, le père Delorme est-il raciste ? La question ne relève qu’en apparence de la polémique stérile. En excluant de facto une catégorie d’êtres humains (les musulmans) de l’annonce évangélique parce que ils sont musulmans, il accorde à un groupe humain, du simple fait qu’il est ceci ou cela, une liberté qu’il n’accorde pas aux autres. Il y a, c’est vrai, reconnaissons-le, un peu d’excès à poser la question en ces termes (est-il raciste ?) mais il est clair que la formulation de la question renferme sa part de vérité…..
Il serait intêressant de ce demander ce qu’en pense un indou, lui qui n’a jamais envoyé de missionnaire nulle part, mais que les prêtres chrétiens et les guerriers musulmans ont depuis toujours essayé de convertir.
Avez-vous-lu le texte de Mgr Simon que vous recommandez,, auteur d’un livre contre le Front national, intitulé « la France païenne »? Dans cet article, Mgr Simon critique les opinions du P.Delorme au nom..des Droits de l’Homme. Pour ma part, je rejette au moins autant l’article d’Hippolyte Simon que celui du P. Delorme. Celui de Delorme s’oppose au christianisme, celui de Simon s’oppose à notre identité française. Je refuse de choisir.