Si les faits sont têtus, les chiffres sont éloquents. M. Seux, économiste sérieux, consacre sa chronique quotidienne du 11 septembre sur France Inter à « la déroute de nos comptes publics ». Si on compare déficit public et chômage en France et en Allemagne depuis les décisions du pic de crise de 2010, notre pays est distancé, victime d’un « différentiel » alarmant. Et M. Seux d’affirmer : « politiquement, le couple franco-allemand tangue ; économiquement, nous en sommes au divorce ». Constat accablant qui prouve que M. Hollande n’a pas fait mieux en 2012-2014 que M. Sarkozy en 2010-2012. Et surtout que l‘avenir proche est plutôt (très) sombre.
On se préoccupe pourtant davantage des scandales qui, l’un après l’autre, émaillent le quinquennat de M. Hollande. L’un des derniers en date, l’affaire Thévenoud, est particulièrement révélateur. Dans un papier joliment intitulé « Thomas l’imposteur », M. Jamet, qualifie à juste titre M. Thévenoud de tartuffe qui a eu « des mots particulièrement accablants pour M. Cahuzac » et même « le culot de stigmatiser les mauvais citoyens qui fraudent le fisc ou qui se dérobent à leurs obligations fiscales » ! (Boulevard Voltaire).
Le vrai scandale, ce sont moins les faits que l’exploitation qui en a été faite par les ex-« amis » de M. Thévenoud. Celui-ci n’est pas le premier à se faire épingler depuis le début de ce quinquennat prétendument exemplaire. Or, à chaque fois, les responsables socialistes, jurent, la main sur le cœur, qu’il s’agit d’une anomalie, oubliant tout simplement qu’ils sont comme les autres et que, pour être socialiste, on n’en est pas moins homme (ou femme).
Raison de plus pour ne pas trop en rajouter dans la condamnation grandiloquente : M. Valls, au Palais Bourbon, avait des accents dignes d’un tribun de l’Antiquité. A l’heure où le pays semble empêtré dans une de ces crises qui le plombent pour longtemps, la posture moralisatrice confine à l’imposture car elle permet de se défausser momentanément de son inconsistance sur une victime expiatoire. M. Thévenoud est coupable ? Qu’il soit châtié (par le fisc) comme il convient ! Mais qu’on cesse de confondre la politique et les cours de catéchisme : M. Hollande a été élu en 2012 sur un programme « de gauche » destiné à « redresser la France ». A mi-parcours, les résultats sont calamiteux : pour les siens (la moitié de la gauche lui est hostile) mais surtout pour le pays (qui s’enfonce dans l’austérité et le déficit).
Etre gouvernés par des gens prétendument « moraux » (mais en l’occurrence plutôt hypocrites) n’est pas une fin en soi. L’Etat a d’abord besoin de serviteurs compétents et efficaces. u
Cette analyse est excellente.Où allons-nous ?
Une fois de plus, vous dites avec fermeté et concision, ce qu’il convient de dire. On débute intelligemment la semaine avec vos analyses, qui éclairent l’actualité, nationale ou internationale, et ce, sans tomber dans aucun travers politicien ou inutilement polémique : c’est vraiment de l’analyse politique, du « sérieux », qui guide la réflexion, et il est bon de trouver, régulièrement, de tels textes sur des sites royalistes…
Je m’associe, bien entendu, aux appréciations ci-dessus, de Patrick Haizet et Academos.
On pourrait, toutefois, objecter à M. Louis-Joseph Delanglade – mais c’est très classique – que la mécanique du système électoral français, le retour au régime des partis, l’élection du président de la République au suffrage universel et le calamiteux quinquennat, le tout sous le regard, voire sous l’étroite surveillance de la doxa médiatique, rendent quasiment impossible aux hommes qui s’y risquent, d’être ou de rester longtemps, comme il le souhaite, des « serviteurs compétents et efficaces » de l’Etat. Pour cela, ne faudrait-il pas qu’il y ait un Etat distinct d’eux-mêmes, un Etat qui ne soit pas eux-mêmes, mais autre chose qui les transcende radicalement ? Et c’est pourquoi je crois que les monarchies, même lorsque leurs pouvoirs semblent évanescents, rendent au moins ce service d’incarner un Etat qui soit distinct de ceux qui sont censés être destinés à le servir; un Etat qui soit en quelque sorte imprenable. Et qui, notion abstraite sans cela, s’incarne dans une permanence, en somme inaccessible à ses serviteurs.
L’Histoire nous enseigne profusément que la politique et la morale cohabitent mais ne fréquentent pas le même lit, on le saurait!! Rappelons que Richelieu et Mazarin ne furent pas des parangons de vertu ou de moralité et leurs actions furent accompagnées discrètement par des exécutants dont l’Histoire a estompé et le nom et le souvenir. Qu’un gredin soit un gredin ne me gène pas, dès lors que la Nation y trouve son compte. Au fond c’est une notion de « gagnant-gagnant » un peu perverse sur un plan moral, mais qui peut être fructueuse sur un plan matériel. La politique d’un pays est censée être menée au bénéfice du pays et de son peuple. Aujourd’hui, nous sommes très loin de compte et les gredins pullulent à leur propre service et profit!!!
Riche l’analyse de LJD et excellents les commentaires. Bravo à Lafautearousseau. Le meilleur de la réflexion royaliste interactive !
Au sommet de la pyramide médiatique, les « autorités morales » exercent leur magistère au nom d’une légitimité qui reste à déterminer au sein d’une société démocratique.
Tout ce discours « politico-moral » sert en fait à donner une manière de respectabilité à une action politique qui se ramène désormais à la plus plate gestion des affaires quotidiennes.
Comme le souligne parfaitement JLD, la réduction de la politique à la morale manifeste bien entendu une totale méconnaissance de la nature du politique, qui ne saurait avoir pour vocation de réaliser des objectifs moraux.
L’Etat est partout.
Dès qu’il sort du domaine régalien, le plus mal gouverné soit dit en passant, il apparaît comme un obèse sur la plage, en bikini ficelle. Ridule et pervers.
Grotesque mieux que ridicule 🙂