Ce lundi 26 juillet, le tribunal correctionnel a tranché en faveur de plusieurs acteurs de la tauromachie nîmoise, poursuivis à la demande de la SPA. L’article qui suit a été publié par Le Figaro du même jour d’où nous le reprenons volontiers. La corrida a toujours suscité d’âpres débats. En Catalogne – Outre-Pyrénées – elle est combattue et même boycottée avec le dernier sectarisme comme symbole du colonialisme espagnol. Chez nous, au nom de la cause animale. Et, ultimement, au nom de la Cancel culture. Raison de plus pour la défendre comme un art subtil né du sentiment tragique de la vie et comme une antique tradition bien vivante.
Ce lundi, un mois après le procès qui s’était tenu le 30 juin, le tribunal correctionnel de Nîmes a tranché en faveur de la torera à cheval Léa Vicens, de l’organisateur de corridas Simon Casas et de sa société ainsi que de la mairie de Nîmes, représentée par son maire Jean-Paul Fournier. La SPA avait déposé à l’encontre de ces derniers une citation directe devant le tribunal correctionnel pour «sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux».
«Le tribunal a prononcé une relaxe générale, comme on s’y attendait, et a condamné la SPA à payer 3000 euros au titre des frais de procédure. Nous sommes satisfaits, cela rentre dans l’ordre des choses», commente Me Jean-Pierre Bigonnet, l’avocat de Simon Casas, auprès du Figaro. Les juges n’ont cependant pas fait droit aux demandes de dommages et intérêts des prévenus. «On est évidemment déçus», réagit quant à lui Jacques-Charles Fombonne, le président de la SPA.
L’association se basait sur l’article 521-1 du Code pénal, qui prévoit des peines allant jusqu’à deux ans de prison et 30.000 euros d’amende. Mais le Code pénal précise que «les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être invoquée». Ce qui a motivé le rejet de la requête de l’association. «Nîmes est la capitale française de la tauromachie, et le monde entier le sait», appuie Me Bigonnet.
«La SPA, qui a été de tous les combats contre la corrida depuis sa création, connaît parfaitement la loi et la jurisprudence. Il est consternant et condamnable d’utiliser un tribunal correctionnel comme une tribune quand on connaît le volume d’affaires traitées par les juridictions, le manque de moyens qu’elles subissent, les retards qu’elles doivent gérer…», souligne l’avocat. «C’est inqualifiable de dire ça!», tempête en retour Jacques-Charles Fombonne.
La « tradition locale » prend le dessus
Depuis quelques années, la SPA a adopté une stratégie judiciaire afin d’atteindre un objectif clairement défini et assumé : l’interdiction de la corrida. Elle n’hésite donc pas à multiplier les actions devant les tribunaux. Jusqu’ici, toutes ces actions ont cependant échoué. L’association a été déboutée à Bayonne le 19 novembre 2020 et à Béziers le 5 mai 2021. Le tribunal de Dax, devant lequel une audience a eu lieu le 2 juin 2021, ne s’est pas encore prononcé. La date du procès de Carcassonne n’a quant à elle pas encore été fixée.
Dans leurs décisions, les tribunaux ont certes reconnu les «importantes souffrances» infligées aux taureaux lors des corridas – «ce qui fait pourtant débat même chez les vétérinaires», glisse Me Bigonnet. «Le simple rappel des étapes – intervention des picadors, pose des banderilles, mise à mort – permet de qualifier le déroulement de la corrida d’actes de cruauté envers les taureaux, les sévices étant accomplis intentionnellement dans le but de provoquer la souffrance ou la mort de l’animal», ont ainsi estimé les juges nîmois.
Mais les magistrats ont systématiquement invoqué la disposition précédemment citée de l’article 521-1 du Code pénal. «Depuis plus d’un siècle, des corridas sont organisées annuellement» à Nîmes et les chiffres de fréquentation de ces événements «démontrent l’attachement de la population locale à la culture taurine et à la pratique de la corrida, de sorte que la persistance de l’intérêt que porte un nombre suffisant de personnes permet de retenir la tradition locale ininterrompue au sens de l’article 521-1 7ème alinéa», est-il inscrit dans le jugement du tribunal correctionnel de Nîmes.
Face à ces échecs répétés, la SPA n’entend toutefois pas déposer les armes. À l’appui de son combat, elle évoque notamment un sondage réalisé par l’Ifop pour la Fondation Brigitte Bardot en mai 2018. À la question «Êtes-vous favorable ou opposé à la suppression des corridas avec mise à mort des taureaux en France ?», 74% des 1010 personnes interrogées ont répondu «favorable».
Une proposition de loi déposée en janvier
Les combats judiciaires locaux de l’association servent aussi à porter le sujet sur la place publique, même si la SPA se défend de «se faire de la pub devant les tribunaux». Les anti-corrida sont bien conscients que le terrain qui leur permettrait d’arriver à leurs fins au niveau national est législatif. Dans une interview accordée au Figaro en juin 2019, son président Jacques-Charles Fombonne assumait ainsi son intention de demander «au législateur d’interdire tout bonnement la tauromachie».
Une proposition de loi en ce sens, déposée le 26 janvier 2021 à l’Assemblée nationale, portée le député Éric Pauget (LR) et co-signée par huit députés LR ainsi qu’un député LREM, a d’ailleurs été renvoyée à la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. «Elle n’est pour l’instant pas inscrite à l’ordre du jour», précise le service presse de l’Assemblée nationale au Figaro.
Vent debout contre un texte qu’ils qualifient d’«amoral» et évoquant la «lutte contre la maltraitance animale», les élus demandent la suppression de l’exception de la «tradition locale ininterrompue». Cet alinéa du Code pénal «apparaît dorénavant comme une tolérance dépassée du législateur répondant à des pratiques d’un autre temps, qui tente encore de légitimer la mutilation et les souffrances abominables de milliers de taureaux», soulignent-ils dans l’exposé des motifs.
Précédemment, un amendement déposé par le député Bastien Lachaud (LFI) sur le projet de loi constitutionnelle «pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace», qui avait pour but d’interdire tout acte de cruauté envers les êtres doués de sensibilité et visait explicitement la corrida dans son exposé des motifs, avait été rejeté en séance publique en juillet 2018.
Pas d’interdiction pour les mineurs
Les anti-corrida avaient également tenté de s’attaquer à la tauromachie par l’angle de la minorité. En octobre 2020, un amendement visant à interdire la corrida aux mineurs, déposé par la députée LREM Samantha Cazebonne lors de la discussion de la proposition de loi relative au bien-être animal, avait finalement été «jugé irrecevable au titre de l’article 45 de la Constitution».
Dans une tribune publiée dans Le Figaro, une quarantaine de personnalités du monde de la culture s’étaient insurgées contre cet amendement. «La corrida, davantage qu’un spectacle, est un art, culminant dans la rencontre de courage et d’honneur qui se joue dans l’arène. […] Interdire un art est indigne d’une démocratie moderne», écrivaient les signataires. «On peut débattre de la corrida. On peut la trouver violente ou belle, ou violente et belle. Nul n’est tenu d’y assister. Nous demandons au gouvernement que nul n’en soit exclu.»
En novembre 2019, le Comité radicalement anti-corrida (Crac) avait quant à lui essuyé devant le Conseil d’État un rejet de sa requête visant à dissoudre les écoles taurines d’Arles, Béziers et Nîmes au nom de l’intérêt de l’enfant. Cette demande avait précédemment été écartée par les préfets des Bouches-du-Rhône, de l’Hérault et du Gard, puis par les tribunaux administratifs de Marseille, Montpellier et Nîmes et enfin par les cours administratives d’appel territorialement compétentes. ■
Le patrimoine cela se conserve !
Ici culturel et identitaire,
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