Par Xavier Raufer.
Xavier Raufer donne à Atlantico, Boulevard Voltaire et divers autres médias des entretiens et des articles réguliers – celui-ci (daté d’avril) vient de paraître – intéressants pour leur expertise minutieuse des divers domaines de la délinquance, souvent enchevêtrés les uns aux autres. Ils sont un signe de l’état de notre société et de la déliquescence du Pouvoir. Nous ne pouvons manquer de nous en tenir informés.
Xavier Raufer revient ici sur la situation en France et sur la prolifération de la violence et ses causes. JSF
Les syndicats de police n’hésitent plus, comme à Rennes récemment, à diffuser des vidéos montrant de violentes agressions. Est-ce le signe d’un craquement progressif qui nécessite d’alerter les citoyens ?
Ce qu’en France, on appelle de façon bien floue (et depuis près d’un demi-siècle) les « violences urbaines », résulte quasiment toujours de l’activité de bandes (organisées) ou de meutes (s’agrégeant plus spontanément). L’activité de ces deux notoires types d’entités criminelles repose sur un triptyque simple : -un territoire (cité, grand ensemble, immeuble, quartier parfois), – des trafics nourrissant les bandits et leurs clans (le business) trafic de stupéfiants… proxénétisme… marchés aux voleurs... racket… squats pour marchands de sommeil et exploitation d’immigrés clandestins, etc. La violence pour protéger son business, éloigner la concurrence et tenir au loin la répression quand, timidement, les forces de l’ordre osent investir leurs territoires.
Lassés d’être accusés de violences – souvent fictives et visant purement et simplement à les intimider – les policiers de terrain montrent désormais la réalité de ces quartiers hors-contrôle : la sauvage violence des bandits, émeutiers, trafiquants, etc. Les mêmes en fait, selon leur cycle d’activité illicite, diurne ou nocturne. Qui cette exposition du réel criminel dérange-t-il ? Sans doute les idolâtres de la mondialisation heureuse, ces bandits provenant souvent de l’immigration ; et certains sociologues-anarchistes, en fait complices fascinés des bandits, plus qu’observateurs neutres de la situation.
Les émeutes récentes en banlieue ont démontré, une fois de plus, la faiblesse de l’Etat. A quoi faut-il s’attendre prochainement ?
L’État français est tout sauf faible : en quelques semaines, la colonisation criminelle des zones hors-contrôle pourrait disparaître – pour de bon. D’ailleurs, ça s’est ainsi produit à peu près partout ailleurs. Il faut savoir que les émeutes à-la-française sont une quasi-exclusivité de notre pays – de telles exactions étant impensables ou à peu près, ailleurs en Europe. Exception, la Belgique, empêtrée dans son chaotique fédéralisme.
La réalité est que la France de 2020 est idéologiquement sous la coupe de libéraux-à-l ’Américaine, au premier chef M. Macron. Lui et ses proches sont des libertaires-mercantilistes pour qui l’État-nation, la sécurité – bref, le régalien -sont un fâcheux héritage du néolithique. D’où son choix de deux incompétents aux ministères-clé du régalien, M. Castaner et Mme Belloubet – car finalement, pour M. Macron & Co., tout cela est futile, ne compte pas, n’existe pas.
On peut faire ici un parallèle avec le point aveugle des marxistes-léninistes, pour qui l’économie réelle n’existait pas. Pour Lénine, l’économie devait fonctionner comme le service des postes du Reich de Guillaume II. Tu postes une lettre un jour à Hambourg ; le lendemain, hop ! la voilà à Munich – aussi bête que ça.
Je vois des gens au contact de M. Macron et de ses proches. Des amis à moi approchent Philippe et son entourage. En matière de sécurité me disent-ils tous, leurs questions sont inouïes de naïveté et d’ignorance. Clairement le régalien n’est pas leur truc. Tel est le seul problème de la France aujourd’hui, en matière de sécurité.
La presse mainstream a donné la parole au délinquant en scooter, multi-récidiviste, appelant au calme de son lit d’hôpital. N’est-ce pas ubuesque, comme si on donnait la parole aux criminels eux-mêmes dans certaines affaires criminelles ?
Vendu à deux glauques oligarques, l’essentiel de la presse d’information reste la seule arme d’une macronie privée d’un parti sérieux, de cadres aguerris ou de dirigeants politiques sûrs. Asservis à Castaner, ces journalistes se bornent à retransmettre au bon peuple les consignes issues de son cabinet. Quand on voit l’incompétence de M. Castaner et de son entourage, rien d’étonnant à ce qu’à la fin, on supplie un bandit endurci de bien vouloir appeler, aujourd’hui, à la paix publique ; demain, pourquoi pas ? À la concorde nationale. Ubuesque ? Je dirais consternant.
Les citoyens doivent-ils encore se fier aux autorités ? Où doivent-ils sérieusement songer à s’organiser et à assurer leur sécurité eux-mêmes ? Sommes-nous en danger ?
Rien ne serait pire qu’une quasi-guerre civile pour notre pays. Méfiance envers les incompétents qui nous gouvernent, certes-mais confiance envers les forces de l’ordre légitimes et qualifiées, en premier lieu, s’agissant d’émeutes, la Gendarmerie nationale. Dès qu’elle en recevra l’ordre du pouvoir légitime ; ou à défaut, si ce pouvoir sombre dans l’impuissance, dès que ses chefs l’auront décidé, cette arme efficace, au grand sang-froid, rétablira bientôt la paix civile.
Voici pourquoi : contrairement aux fantasmes de divers hurluberlus, ce qui s’agite dans les banlieues n’est pas une sorte de néo-« Wilaya-France du FLN », mais une marqueterie de bandes territoriales ; fondées, non sur l’idéologie de la libération nationale – mais sur le business. Quiconque lit le journal sait que dans les cités hors-contrôle, ces gaillards et leurs caïds s’entretient à tout bout de champ – mais là, hop ! Tous ces voyous, unis comme au front, direction la place de l’Étoile ? Comme on dit chez les jeunes : Même pas en rêve…
Entre la crise économique, violente, le Ramadan confiné, les émeutes de banlieue, à quoi faut-il s’attendre pour les prochaines semaines ?
Les caïds des cités et quartiers veulent vite reprendre leur business criminel, trafic de stups, etc. Et ils ont des arguments pour calmer les jeunes : pour les plus réticents, la kalachnikov. Bien sûr, en être tombé là en matière d’ordre public est une honte – mais on l’aura compris, M. Castaner n’est pas vraiment Napoléon au pont d’Arcole. Les cités vont se calmer- pour l’essentiel, elles le sont déjà. Cependant, les récentes et sporadiques émeutes inciteront-elles le gouvernement à y rétablir cet ordre qui y fait défaut depuis parfois un demi-siècle ? Ne rêvons pas. ■