par Laure Fouré
Juriste, fonctionnaire au ministère des finances
C’est seulement par antiphrase, ou par modestie, que Laure Fouré dit s’être proposée de rappeler aux lecteurs de Boulevard Voltaire, quelques vérités historiques un peu oubliées. Ce sont des vérités d’importance qu’elle rétablit avec pertinence. Des vérités toujours occultées ou contrefaites par une pensée officielle avant tout soucieuse de jeter l’opprobre sur tout un courant intellectuel et politique qui lui était hostile. Ce que fut réellement la politique allemande de l’Action Française avant et pendant la deuxième guerre mondiale, notamment à l’égard d’Adolf Hitler et du nazisme, nous l’avons maintes fois rappelé ici. Laure Fouré y ajoute une contribution argumentée, accompagnée d’une vidéo où Eric Zemmour qui, décidément, connaît bien l’Action Française, son histoire et ses idées, rétablit la vérité, preuves à l’appui, sur ce que fut vraiment l’engagement des royalistes à cette époque. Lafautearousseau
Alors qu’une nouvelle polémique, lancée notamment par Jean-Luc Mélenchon comparant Le Pen à Hitler, se développe au sujet de la réédition de Mein Kampf, qui tombera dans le domaine public le 1er janvier 2016 – son auteur étant décédé depuis 70 ans -, il convient de rappeler quelques vérités historiques un peu oubliées.
En février 1934, la maison d’édition proche de l’Action française, Les Nouvelles Éditions Latines, décide, à la demande de Charles Maurras souhaitant disposer d’une traduction fidèle de Mein Kampf pour comprendre l’idéologie hitlérienne, de le faire traduire et de le publier : l’ouvrage sera édité quelques mois plus tard et tiré à 8.000 exemplaires, avec en exergue la phrase du maréchal Lyautey :« Tout Français doit lire ce livre. »
Furieux de cette initiative prise sans son consentement, Hitler, qui envisageait de diffuser une traduction de son texte adaptée à chacun des pays destinataires, c’est-à-dire expurgée de tout ce qui pouvait attirer l’attention des États voisins de l’Allemagne sur ses intentions belliqueuses, engagea une procédure contre le patron des Nouvelles Éditions latines, Fernand Sorlot, à l’issue de laquelle la justice accorda au plaignant un franc symbolique de dommages-intérêts, considérant qu’il n’y avait pas lieu à la destruction d’un ouvrage que tous les Français ont intérêt à connaître.
Rejoignant l’inquiétude manifestée par Mgr Pacelli, futur Pie XII, alors nonce apostolique en Allemagne, qui qualifiait Mein Kampf de « livre à faire dresser les cheveux sur la tête », M. Sorlot soulignait, dans un avertissement introductif à l’édition incriminée, que « ce livre, répandu en Allemagne à plus d’un million d’exemplaires, a eu sur l’orientation soudaine de tout un peuple une influence telle qu’il faut, pour en trouver l’analogue, remonter au Coran ».
Germanophobe impénitent, Maurras ne collaborera jamais avec l’Allemagne (il sera condamné en 1945, non sur ce chef d’accusation, mais pour intelligence avec l’ennemi, crime inventé pour la circonstance), et s’il accueillit comme une « divine surprise » l’arrivée au pouvoir du maréchal Pétain, c’est qu’il pensait que le vainqueur de Verdun parviendrait à redresser la France, affaiblie par une République impuissante et corrompue qui avait conduit le pays à la défaite.
Si quelques brebis égarées, à l’instar de Robert Brasillach séduit par la liturgie virile des défilés de Nuremberg, furent compromises dans la collaboration, la majorité des royalistes et des nationalistes de toutes obédiences rejoignirent les troupes de la France libre, tels Honoré d’Estienne d’Orves ou le Colonel Rémy, comme Alain Griotteray l’a justement démontré dans son ouvrage 1940 : la droite était au rendez-vous. Qui furent les premiers résistants ?
En revanche, non seulement la gauche républicaine et pacifiste demeura longtemps attentiste, mais d’anciens hauts responsables communistes ou syndicalistes comme Jacques Doriot et Marcel Déat s’engagèrent sans état d’âme du côté de l’Allemagne en vue de la construction d’une Europe unie.
Avant de se livrer à des amalgames douteux, le représentant du Front de gauche devrait balayer devant sa porte…
Oserais-je douter de la pertinence de ce billet ?
Jean-Luc Mélenchon ne met en cause d’aucune façon ni les royalistes ni l’ancienne Action française dont la germanophobie est maintenant de notoriété publique.
Pourquoi donc nous amalgamer aux « affaires » Le Pen ?
Ma langue au chat… 🙂
Je ne crois pas aux partis. Je n’ai aucun lien avec les « affaires » Le Pen. Il n’y a pas de raison de s’y amalgamer. Mais il ne me semble tout de même pas correct du tout, ni sérieux, de comparer Le Pen à Hitler. Ce genre de procédé n’est tout simplement pas admissible. A qui que ce soit qu’on l’applique.
Mutatis mutandis, des amalgames de même veine ont souvent été opposés à l’Action Française et c’est ce qui est dit ici à son propos – par Laure Fouré et Eric Zemmour – qui me semble devoir être retenu. Les partis sont ce qu’ils sont et passeront. La pensée politique maurrassienne demeurera dans le patrimoine intellectuel français quoiqu’il arrive.
Pourquoi aller chercher ici autre chose que le positif ? .
Bonjour, il est étrange de lire dans votre lettre si proche des idées de Charles Maurras qu’il aurait vue dans l’arrivée de Pétain une divine surprise…. Charles Maurras écrit un article en décembre 1940, après l’arrestation de Déat et de Pierre Laval, pour la revue « Le petit Marseillais » ou il compare la politique de Pétain à une divine surprise. Article publié en février 1941. Donc redisons-le ce n’est pas la défaite, ni l’armistice, ni l’arrivée de Pétain, ni même les votes du 9 et 10 juillet que Maurras compare à une divine surprise….
Merci M. Fleutot pour cette importante précision jamais entendue ailleurs (ou qui m’avait échappé).
Oui, merci ami Fleutot d’apporter cette précision qui est d’une grande importance ; je ne suis pas loin de penser que l’AF confite en pétainisme de mes années militantes la dissimulait soigneusement…
Même si l’engagement immédiat de la droite contre l’Allemagne à l’issue des «soixante jours qui ébranlèrent l’Occident», est très connu des passionnés d’Histoire de cette période catastrophique, le rappel de mme Fouré n’est pas inutile dans un climat d’intoxication massive. A commencer par les horreurs que l’on inflige à nos jeunes cervelles dès le collège. L’entretien d’Eric Zemmour joint au texte est d’une grande valeur en ce qu’il dirige vers cet ouvrage remarquablement documenté de l’historien franco-israélien Simon Epstein «Un paradoxe français», qui n’a eu quasiment aucun écho (2008) (on y lit subsidiairement des extraits de lettres du Capitaine De Gaulle, en poste en Pologne en 1919, critiquant en mots très durs le comportement de la communauté juive après la guerre ; vaste sujet …). S’agissant du fond du débat, je ne partage pas l’accusation facile en 2015 contre les «pacifistes», ou tous ceux qui refusaient la guerre, de droite ou de gauche. Ce rejet venaient de Français rescapés de l’horreur de la Grande Guerre, dans une France rurale où pas un village n’avaient sa cohorte d’estropiés, les Gueules Cassées. Le souvenir du carnage était sous les yeux de tous. La déclaration du dimanche 3 Septembre 1939 à cinq heures de l’après midi fut reçue comme un drame (le brave curé du village de notre famille dans les Hautes Alpes, ancien combattant quatre ans au front, éclatant en sanglots). Epstein décrit sans juger. Engagement de notre pays, entrainé par un personnel politique d’une médiocrité égale à celui qui nous gouverne aujourd’hui. Démonstration que l’on ne tire aucun enseignement de l’Histoire, même la plus tragique.