Ce vandalisme est également antimonarchique. Comment ne pas évoquer la profanation des tombes royales de Saint-Denis et la destruction des statues des rois sur la façade de Notre-Dame de Paris.
Mercier ira jusqu’à demander la destruction du château de Versailles ! Ne parlons pas de l’exécution du grand chimiste Lavoisier, même si le mot « la République n’a pas besoin de savants » est probablement apocryphe.
La partie sombre de la Révolution a été longtemps occultée et, avec elle, les œuvres des écrivains qui ont mis en doute les bienfaits de cette révolution. Le Livre noir les réhabilite. Ainsi Blanc de Saint-Bonnet, qui entend prouver que l’erreur et le mal sont à la source de la Révolution, retrouve-t-il toute sa place dans le courant philosophique français. Une place qu’il avait perdue pour avoir écrit : « On s’étonne de la fatalité qui porte la Révolution à répandre le sang. C’est oublier que chez nous, la plupart des crimes sont le résultat de l’envie. La Révolution n’est que l’application sociale de l’envie. »
Jacques Bainville et Pierre Gaxotte, qui ont donné de la Révolution une image si éloignée de la tradition républicaine, furent boycottés dans les milieux universitaires. Cochin, féroce censeur de la Sorbonne, n’a connu que tout récemment un regain d’intérêt. N’a-t-il pas osé montrer comment, à travers les sociétés de pensée, les Lumières du XVIIIe siècle ont engendré les massacres révolutionnaires loin des idées d’égalité et de fraternité. Qui lit Joseph de Maistre malgré les récentes rééditions de ses Considérations sur la France ? Il y prédit en 1796 les conditions de la restauration de la monarchie légitime dix ans plus tard. Et que dire de Rivarol, de Bonald, de Barruel, auteurs à redécouvrir grâce aux contributions savantes et objectives du Livre noir.
Stéphane Giocanti rappelle que cette occultation s’est faite sous une IIIe République triomphante où domine l’anticléricalisme et où persiste le souvenir d’une Commune de 1871 inspirée de celle de 1793. Les manuels scolaires des « hussards noirs de la République » visent à noircir l’Ancien Régime et à fixer en 1789 la naissance de la France. La preuve est facile à apporter. Ouvrons le manuel de deuxième année d’histoire de France d’Ernest Lavisse à l’usage des élèves de 11 à 13 ans, dans l’édition de 1914. On y lit que « le roi ne connaît que sa volonté, ou, comme il dit, que son bon plaisir. Il dépense à pleines mains ». Voilà qui justifie la chute de la monarchie. Quant aux révolutionnaires, « ils voulurent réformer l’État et entreprendre cette œuvre immense où le despotisme fit place à la liberté, les privilèges à l’égalité, les abus de toutes sortes à la justice ». Deux lignes sur les massacres de septembre, rien sur la répression en Vendée. Mais le mot « crime » est employé à propos des exécutions sous la Terreur. L’histoire officielle de la Révolution est désormais écrite. De là, ce Livre noir. Non qu’il conteste toutes les retombées d’une Révolution que stabilisa Napoléon.
Tout n’est pas négatif – loin de là – dans le bilan que l’on peut dresser en 1815, lorsque est restauré pour la seconde fois Louis XVIII et que semble se fermer la page de la Révolution. Les idées nouvelles – notamment l’égalité – sont consacrées dans le préambule de la Charte, ce à quoi s’était refusé le même Louis XVIII en 1795 dans sa proclamation de Vérone. Mais, jusqu’à aujourd’hui, l’histoire de la Révolution française semblait figée dans son moule républicain. Pourtant, comme l’observe le maître d’œuvre du Livre noir, Renaud Escande, « l’Histoire ne s’écrit pas comme la mythologie et son exigence de vérité ne devrait pas s’encombrer de visées utilitaristes », et, osons le mot, idéologiques.
Noël Stassinet sur On attend une vigoureuse réaction du…
“Alors les grands penseurs de la gôôôche on se réveille ? On a une panne de…”