Le roi Idriss de Libye
Par Péroncel-Hugoz
Notre confrère Peroncel-Hugoz, qui fut longtemps correspondant du Monde dans l’aire arabe, et a publié plusieurs essais sur l’Islam, travaille maintenant à Casablanca pour le 360, principal site de la presse francophone en ligne au Royaume chérifien. Il tient aussi son Journal d’un royaliste français au Maroc, dont la Nouvelle Revue Universelle a déjà publié des extraits. Nous en ferons autant désormais, en publiant chaque semaine, généralement le jeudi, des passages inédits de ce Journal. LFAR •
QUAND KADHAFI GOUVERNAIT SANS PARTAGE… UN FANTÔME ROYAL (2/3)
Mon guide turco-libyen francophone lève les sourcils, comme ahuri, lorsque, à dessein, je laisse tomber dans la conversation des bouts de phrase du genre : « au temps du roi Idriss » (dont le nom est banni par le régime kadhafiste) puis, m’enhardissant, « au temps du bon roi Idriss » ou encore « au bon temps du roi Idriss »…
A ma troisième allusion, le brave homme, après m’avoir jeté un regard mi-apeuré mi-joyeux, me lance mezza-voce : « A qui le dites-vous ! », et, après un petit silence : « C’était le paradis ! Aujourd’hui nous ne pouvons même pas le dire à nos enfants, de peur qu’ils le répètent à l’école ou au stade, et alors, comme il y a des oreilles du colonel (c’est le grade atteint jadis par Kadhafi) partout, on risque de se retrouver bientôt en prison… »
Quand on passe, un peu plus tard, devant le Palais royal de Tripoli, transformé, paraît-il, en bibliothèque, mais où on ne voit jamais personne, mon cornac me dit : « Si c’est pas malheureux, ce palais vide, où résidait souvent jadis le prince héritier, neveu de Sa Majesté, laquelle préférait résider en Cyrénaïque; ce palais abandonné, où « il » a fait enlever le prince Reda et sa famille, après son putsch de 1969, pour les jeter dans une geôle, alors que cette famille n’avait fait que du bien au pays, après avoir longtemps résisté aux Italiens, avant la guerre de 1939 ! »
Néanmoins pas latinophobe, mon interlocuteur enfin complètement décomplexé me confie : « En 1969, il y avait encore 20.000 Italiens en Libye, surtout en Tripolitaine. Grâce à eux on avait de meilleurs agrumes qu’en Tunisie et de meilleures pizzas qu’à Naples ! »
J’y penserai un peu plus tard quand, au restaurant de mon hôtel, on me servira de caoutchouteuses pizzas surgelées importées d’Egypte… S’il n’y avait que ça dans cette pauvre Libye si riche, privée de sa dynastie nationale par un coup d’Etat militaire et à présent livrée à une dictature ubuesque… •
[Suite et fin la semaine prochaine]
VERDU sur Éloquence : Tanguy à la tribune,…
“Il est bon !!”